3.1.2. L’impôt direct

L’une des caractéristiques de l’organisation économique de l’auteur est de préférer le financement des mesures sociales par l’impôt direct plutôt que par les cotisations des travailleurs, et ce pour deux raisons : d’abord parce que l’impôt direct s’applique à tous les membres de la collectivité en mesure de le payer et qu’il est, par conséquent, le signe de la participation de chacun au Bien Commun. Ensuite, parce qu’il répartit le coût de la politique sociale. Si celui-ci est supporté par les travailleurs, au moyen de cotisations à l’assurance maladie ou à l’assurance chômage, alors leur pouvoir d’achat devient trop bas. On peut évidemment compenser par une très forte augmentation des salaires, mais alors, dans la mesure où, dans l’économie actuelle, la charge salariale incombe à l’employeur, c’est lui seul qui porte le poids de la politique sociale. En revanche, l’impôt sur le revenu permet de faire financer celle-ci par tous les revenus et pas seulement par ceux du travail, de même qu’il permet d’éviter que ne soit mis en péril les entreprises qui emploient les travailleurs. Par conséquent, le financement des mesures sociales par l’impôt est le moyen de limiter la hausse des salaires :

‘It is true that, if one could suppose a sufficiently high universal standard of wages, they [the common risks of life] might be met by self-insurance, but, on the one hand, such insurance would have to be compulsory, since otherwise the improvident —as we could not let them starve— would have it both ways; and on the other hand, there is the practical difficulty of establishing sufficiently high rates without dislocating production. It is better, in view of the differential advantages inherent in production, to adjust the minimum to the needs of the ordinary worker in work and to meet the risks and the extras out of surplus. (TP 278)’

Toutefois, s’il faut éviter une trop forte hausse des salaires, il s’agit bien, pour Hobhouse, de pratiquer une politique de salaires élevés, et non pas de bas salaires compensés par des mesures sociales. Comme nous l’avons écrit, les salaires sont fixés par les Trade Boards, en fonction de la participation au Bien Commun (mérite) et des besoins liés au développement moral de l’individu. En effet, le salaire est plus propre à encourager ce dernier que les aides de l’État, parce qu’il est la propriété de l’individu et participe, par là, de sa liberté. Lorsque certains secteurs de l’industrie ne sont pas en mesure de dégager les bénéfices suffisants pour accorder de tels salaires, et que le fait de leur imposer une charge salariale trop forte les mèneraient à la faillite, on peut, alors, utiliser le surplus des entreprises bénéficiaires pour ajouter aux salaires octroyés par les entreprises en difficulté, de façon à ce qu’ils correspondent aux taux déterminés par les Trade Boards. Conformément à la conception organique, la redistribution du surplus exprime, alors, la coopération de toute l’économie :

‘In a municipal tramway system, given uniform charges and uniform running costs per mile, some routes will pay handsomely, while others, maintained for the benefit of the passengers, barely meet their costs. Such differential advantages are inherent in the nature of production, and they put a limit on the possibility of raising general minimum rates. (TP 278)’