II. Des institutions entre conservation et renouvellement

A première vue, la loi du 15 février 1902 n'entraîne pas de bouleversements radicaux dans l'organisation institutionnelle sanitaire locale. Elle conserve en effet le système des conseils d'hygiène de 1848, généralise l'institution des bureaux d'hygiène municipaux à certaines catégories de communes et laisse la possibilité aux conseils généraux de créer une inspection sanitaire départementale. La continuité l'emporte ainsi largement sur la rupture : les seules institutions imposées à l'ensemble du territoire restent les conseils d'hygiène et les services gestionnaires conservent leur caractère local.

A la différence de l'assistance et du travail, domaines de la protection sociale sur lesquels la République légifère parallèlement 805 , il n'est donc pas créé de corps d'Etat d'inspection de l'hygiène publique. Non que personne n'y ait songé, bien au contraire ! L'inspection était même le coeur de la réforme sanitaire, l'élément duquel procédait toute l'architecture du projet soumis au Parlement. Mais elle ne résista pas à l'hostilité des sénateurs qui en firent un service facultatif, laissé à la discrétion de chaque conseil général. Si cet échec pour le mouvement hygiéniste nous invite à plaider davantage en faveur de la continuité institutionnelle, il ne faudrait pas non plus conclure à une totale immobilité de l'organisation sanitaire locale. La loi du 15 février 1902 insuffle un nouveau dynamisme aux conseils d'hygiène tandis qu'elle trouve une " issue de secours" 806 à l'inspection mort-née en imposant, aux villes de 20 000 habitants et plus ainsi qu'aux stations thermales d'au moins 2 000 habitants, un service sanitaire municipal.

Notes
805.

Sur l'étatisation de l'inspection de l'assistance publique et de l'inspection du travail, voir Virginie DE LUCA BARRUSSE, op. cit.,en particulier, pp. 76-150 et Vincent VIET, op. cit., pp. 187-229.

806.

Lion MURARD, Patrick ZYLBERMAN, L'hygiène dans la République..., op. cit., pp. 236-237.