2.1. L’Infrastructure

Il s’agit du premier étage de la machine relationnelle. Sa fonction est d’assurer la liaison entre les membres du réseau. L’infrastructure se présente souvent sous forme d’équipements matériels ; d’où sa nature physique. Mais en se focalisant de plus en plus sur la technologie, l’infrastructure du réseau a tendance à englober des éléments immatériels comme les standards, les logiciels et les normes. Pour Probst et al. (1997),

‘“ La technologie est l’étude des outils des machines, des matériaux, des techniques, des procédés et des méthodes employées au sein du système sociétal, et par extension, le savoir-faire découlant de cette étude. ” 59

En paraphrasant Carl Shapiro et Hal R. Varian (1999), nous dirons que l’infrastructure est au réseau ce que la bouteille est au vin. C’est ce que Jean-Louis Le Moigne appelle le contenant solide * dans sa définition du réseau. Carl Shapiro et Hal R. Varian (1999) insistent sur le rapport dialectique qui existe entre le contenant solide (l’infrastructure) et le contenu fluide. Ils considèrent que, pour les réseaux d’information, l’amélioration de l’infrastructure se traduit par une augmentation de la valeur de l’information elle-même.

‘“ Certes, la bouteille n’est pas le vin. Mais une infrastructure qui permet de réduire les coûts et d’augmenter la valeur du produit donne un avantage énorme aux entreprises qui en bénéficient. L’amélioration de l’infrastructure de diffusion de l’information a considérablement augmenté les capacités de stockage, de recherche, de tri, de filtrage et de diffusion de l’information, augmentant du même coup la valeur de l’information elle-même. ” 60

Quant aux acteurs de l’infrastructure, il s’agit d’abord des constructeurs des technologies du réseau, c’est-à-dire les fabricants de matériels (serveurs, ordinateurs, câbles, fibres optiques, modems, etc.), les concepteurs et fournisseurs des logiciels et des programmes, les ingénieurs systèmes qui installent les équipements et les programmes et en assurent le suivi et la maintenance.

L’analyse de l’infrastructure soulève nombre de problématiques relatives aux technologies des réseaux. Par opposition aux réseaux traditionnels, les réseaux modernes s’appuient de plus en plus sur la technologie, ce qui impose à toute organisation aspirant à faire partie d’un réseau de satisfaire à un minimum d’équipement et de maîtrise technologiques. Les réseaux se transforment de plus en plus en systèmes fermés allant jusqu’à “ exclure des acteurs du marché sur base de la possession de matériel. ” 61 La diversité des technologies proposées sur le marché pour répondre à un besoin donné ajoute à la complexité du problème et met le décideur face à des difficultés de choix et souvent face à des risques. Selon Albert Bressand et Catherine Distler (1995), les technologies d’information mises à la disposition des membres du réseau pour leur permettre d’entrer en contact et qui jouent sur ce plan un rôle déterminant, sont un élément à manier avec rationalité, faute de quoi, les acteurs “ risquent fort de ne pas voir se matérialiser les économies relationnelles, du moins pas en proportion des sommes dépensées. ” 62 Plusieurs facteurs doivent être pris en considération par un acteur opérant dans le cadre d’un réseau et qui s’apprête à adopter (ou encore à créer) une technologie : la base installée d’utilisateurs des technologies en compétition et leurs degrés de maturation, la compatibilité avec les technologies des partenaires et les comportements de ces derniers en matière de normalisation, la performance de la technologie à choisir, les coûts de changement, les risques de verrouillage, etc.

Notes
59.

- PROBST J. B., Gilbert [et al.]. – Organisation & Management, Livre 2 : Gérer le changement organisationnel, Paris, Editions d’Organisation, 1997, p. 23

*.

- “ le réseau est d’abord un contenant solide inintelligible sans un contenu fluide. ”

60.

- SHAPIRO, Carl & VARIAN, Hal R. – Economie de l’information : guide stratégique de l’économie des réseaux, Paris, De Boeck Université, 1999, p. 14

61.

- DUCATEL, Ken. - “ Les réseaux de technologies de l’information sont-ils de véritables réseaux? ”, in : TIS, 1993, n° 5 (4), p. 355

62.

- BRESSAND, Albert & DISTLER, Catherine. Op. Cit.