Conclusion : L’économie des réseaux de bibliothèques au carrefour de plusieurs théories économiques

La participation aux réseaux de coopération représente de plus en plus une variable stratégique dans le management d’une bibliothèque. Le modèle de la machine relationnelle met en exergue toute la complexité du réseau qui nécessite une évaluation, elle aussi, complexe.

Nicolas Currien (1993)résume l’approche économique des réseaux dans l’étude :

  • de l’organisation fonctionnelle stratifiée en trois couches (infrastructure, services intermédiaires et services finals ou d’utilisation) d’une part ;
  • et d’un “ ensemble de caractères en rapport avec cette organisation et se rapportant aux fonctions de production et de coût, à la fonction de demande, à la nature de la tarification, à l’organisation industrielle, ou aux mécanismes de régulation. ” de l’autre part.

Cela veut dire que les effets économiques réels du réseau ne peuvent être appréciés que sur la base d’une combinaison de critères quantitatifs et de critères qualitatifs ; autrement dit que sur la base de la combinaison de deux modèles :

  • le modèle quantitativiste : se basant sur les techniques économétriques et comptables (statistiques, études de coûts, etc.), il étudie les aspects chiffrables des réseaux.
  • le modèle comportemental dit aussi “ béhavioriste ” : plus enclin à l’analyse qualitative, il étudie les aspects qui échappent à la mesure arithmétique, mais qui ont un rapport direct avec l’économie, tels que la bureaucratie, l’opportunisme, la rationalité, l’apprentissage, etc. La prise en compte de ces aspects comportementaux dénote d’une conscience que l’économie n’est pas simplement une affaire de chiffres et que la rentabilité dépasse l’acceptation stricto sensu de profit. Albert Bressand et Catherine Distler (1995) parlent des économies relationnelles en ce sens que la relation est en soi génératrice de richesse. Selon ces deux auteurs, les économies relationnelles se nourrissent de quatre sources :
    • les moyens techniques (voir technologie plus haut)
    • la normalisation (voir plus haut).
    • les innovations relationnelles ou les réseaux à relations ajoutées : Cela veut dire qu’une fois les acteurs entrés en contact, d’autres relations et initiatives imprévues viendront s’ajouter aux interactions prévues par les accords formels passés pour constituer la réalité du réseau. L’évolution du réseau et l’atmosphère qui règne en son sein joueront, selon les cas, soit le rôle d’un effet multiplicateur de ces interactions, soit l’effet d’un dénominateur de ces mêmes interactions.
    • la productivité multilatérale : cette notion rejoint la notion d’effets de clubs déjà évoquée plus haut. Elle est basée sur l’élargissement de la relation d’un simple jeu à deux acteurs à une configuration multirelationnelle.

Les effets économiques du réseau sont donc la résultante de plusieurs dynamiques et facteurs (technologiques, politiques, relationnels, scientifiques, conjoncturels, historiques, etc.) Il s’ensuit que l’économie des réseaux se situe au carrefour de plusieurs branches de la science économique, véritables alluvions auxquels l’économie des réseaux doit sa grande richesse, (mais aussi sa difficulté) telles que l’économie des services, l’économie publique, l’économie marchande, l’économie des organisations, etc.

L’analyse économique des effets du réseau se trouve de ce fait tiraillée entre les impératifs de la concision et ceux de l’exhaustivité. Au premier impératif correspondent les approches micro-économiques appréciées pour leur tangibilité et caractère opératoire mais contestées pour leur manque d’exhaustivité. Le deuxième impératif favorise les approches qualitatives redoutées pour leur complexité et critiquées pour leur généralité, mais souhaitées pour leur exhaustivité.