A. —assan al-Bann…, vie et personnalité

Sa vie et sa personnalité sont une des clés d’explication pour comprendre et l’organisation de l’association et l’idéologie.

—assan al-Bann… est né en 1906 dans une famille dont le père, le šay¢ AŸmad ‘Abd al-RaŸm…n al-Bann…, est im…m (il a reçu une éducation de type traditionnel à l’Université d’al-Azhar où il a suivi les cours de M. ‘Abduh). L’éducation de son fils commence donc dans une kutt…b puis il intègre une école primaire. Dès l’âge de 12 ans, —assan al-Bann… dirige dans son école une association dont l’objectif est de sensibiliser ses membres aux offenses morales 238 . Dans cette période, il s’affilie à un ordre mystique. Une société de charité est créée par la confrérie pour la préservation de la moralité islamique et la résistance au travail des missionnaires chrétiens, al-Bann… en devient à 13 ans le secrétaire 239 . Il poursuit son initiation mystique et devient en 1922 membre à part entière 240 . L’année suivante il entre à D…r al-‘UlŽm au Caire. Le contexte politique de la période a une influence directe sur lui. De violentes campagnes anti-britanniques secouent l’Égypte de l’après-guerre et lui font prendre conscience de son anti-impérialisme Au Caire il fréquente les milieux de la « cause islamique » 241 et déplore le manque de dynamisme d’al-Azhar « in the face of the ‘missionary and atheistic currents’ disrupting islamic society » 242 .

Inscrit à D…r al-‘UlŽm, il n’a jamais suivi un enseignement religieux supérieur du type de ceux dispensés par al-Azhar : « he was never in the traditional sense a man of religion » 243 . Cependant sa culture religieuse est indéniable. N’ayant pas suivi un cursus d’études religieuses spécialisées, son approche des sciences de la religion n’est pas traditionnelle mais le résultat d’une réflexion personnelle. Il élabore lui-même sa méthode d’interprétation du texte qur’…nique et des Ÿad€ミ-s.

Durant ses années d’études au Caire il organise un groupe composé d’étudiants d’al-Azhar et de D…r al-‘UlŽm qui offrent leurs services de prédicateurs aux mosquées tout en développant une prédication dans les cafés et autres lieux de sociabilité 244 . À l’issue de ses études, il est envoyé comme enseignant en septembre 1927 à Ism…‘€liyya, dans la zone du canal de Suez. Cette ville est le symbole de la main mise britannique sur l’Égypte car s’y concentrent les dominations économique et militaire britanniques. Il poursuit ses activités apostoliques à l’école, à la mosquée, dans les cafés... Son but est d’atteindre tout le monde et il acquiert rapidement un grande capacité d’adaptation à ses auditoires. Il soutient la création en décembre 1927 de l’association des Jeunes Hommes Musulmans 245 ce qui ne l’empêche pas de fonder l’association des Frères Musulmans en 1928. La suite de l’existence de —assan al-Bann… est intimement liée à l’activité de l’association (ou est-ce l’inverse ?).

Son charisme est tel, qu’il est, sa vie durant, l’âme du mouvement sur lequel il exerce une véritable fascination qui s’explique : « [...] some of the elements in Banna which inspired this devotion to his person emerge for the limitless eulogies and encomiums written after his death. Chief among them are his personal and oratorical eloquence and his ability to convey, a sense of sincerity, humility and selflessness [...] » 246 . C’est donc un homme au contact facile, imprégné d’une vaste culture religieuse, au charisme indéniable, au sens de l’organisation acquis par une participation précoce aux mouvements associatifs, profondément égyptien qui fonde l’un des mouvements les plus puissants de l’islam contemporain.

Pendant les trois premières années de sa fondation, l’association des Frères Musulmans tente d’élargir son audience en se livrant à une prédication tout azimut 247 . À cette époque, les Frères Musulmans fondent leur première mosquée à Ism…‘€liyya et leur première école de garçons bientôt suivie par celle des filles 248 . Leurs activités sociales se multiplient et s’étendent dans toute la zone du delta, puis au Caire. Un tel succès s’explique en partie par l’organisation de l’association 249 .

Notes
238.

R.P. MITCHELL, The society of the Muslim Brothers, New York, Oxford University Press, 1993 (1ère éd. 1969), p. 2.

239.

Ibid.

240.

Ibid., p. 3.

241.

Ibid., p. 5.

242.

Ibid.

243.

I.M. HUSAINI, The Moslem Brethren, Beyrouth, Khayat, 1956 (1ère éd. arabe 1952), p. 25.

244.

R.P. MITCHELL, op. cit., p. 5.

245.

Ibid., p. 7.

246.

Ibid., p. 297.

247.

Ibid., p. 9.

248.

Ibid.

249.

Ibid., p. 164-184.