911. Faire exister un territoire par son projet

Selon V. Destot (1996) les acteurs locaux se sont heurtés à deux obstacles. Premièrement, l’intercommunalité initiée depuis les années 1970 n’a pu enrayer la déprise, et l’Etat a repris l’initiative de l’animation locale, les élus et responsables locaux étant mis en situation de faiblesse (multiplication des procédures sur la zone dans une logique d’opportunisme, faisant apparaître l’absence de ’gouvernail’). Deuxièmement, l’absence de stabilité de la population (flux de départs, de retours et d’arrivées) rend plus difficile l’identification collective à un même territoire.

D’où la démarche de projet de territoire – initiée avant la mise en place de la politique des ’pays’ (LOADDT, 1999) - comme facteur de mobilisation et de cohésion locale. Les images élaborées par les artisans de ce projet pour rendre compte à l’extérieur (articles parus dans la presse nationale) de la démarche révèlent les deux objectifs implicitement recherchés par ces acteurs. L’implication des habitants dans le ’même projet de territoire’, c’est à dire la diffusion et le renforcement d’une identité territoriale, correspond à : ’[] ‘L’image du puzzle qui se construit petit à petit, pour ne trouver son sens qu’une fois terminée. Le fait de construire ce puzzle, ensemble avec acharnement, est aussi important que sa réalisation finale’’365. La mise à disposition du ’district’ au service de l’ensemble des habitants du territoire, c’est à dire leur mise en réseaux sous le même gouvernail (le district), et l’articulation de leurs initiatives vers le même cap (le projet de territoire) sont associés à plusieurs images : ’impliquer toute la population : c’est l’image de la fusée qui ne peut atteindre son but que si tous ses moteurs fonctionnent de façon équilibrée : société civile, élus et administration ; identifier et reconnaître un outil de pilotage et d’exécution. Dans le Diois il s’agirait du District qui au travers de ses statuts a placé en priorité la mise en place d’un projet de territoire : c’est l’image du chef d’orchestre ; reconnaître les différences des points de vue. La reconnaissance des clivages permet de transformer positivement les conflits en coopération : c’est l’image de la chorale qui unit les différentes voix de qualités diverses et aboutit à une harmonie’ 366

Le district entend également contrôler l’animation globale de la zone en couvrant l’ensemble d’autres secteurs de la vie locale (agricole et socioculturel) tant il est vrai, comme le précise P. Houée367, que l’animation dans les zones rurales, constitue un vecteur de pouvoir important.

Concrètement, cela se traduit par la réalisation de conventions entre le district et diverses structures et organisations socioprofessionnelles (la chambre d’agriculture, le lycée de Die), la mise à disposition à temps partiel d’agents d’autres structures (office du tourisme, mission locale), l’hébergement dans les locaux du district du site de proximité (’toit unique’ regroupant plusieurs organismes d’aide à l’emploi et à la création d’activités), et l’accueil de permanences décentralisées (structure départementale d’aide au logement).

L’élaboration du projet de territoire, dès 1996, a abouti à la rédaction de la charte de territoire (1999). Il s’agit donc d’un processus long, non achevé, puisque le périmètre du Diois n’est pas reconnu par la Région. Mais cette démarche, avec ses différentes étapes368 et ’temps forts’, a été l’occasion de renforcer l’identité territoriale des habitants du Diois, de faire de son projet de développement un enjeu commun y compris à travers les conflits qui ont opposé les uns et les autres.

Notes
365.

GEFFRAY T., MEJEAN P., 1999 – Le Diois dessine sa charte, in : Territoires, avril, p. 8.

366.

MEJEAN P., GEFFRAY T., LANDEL P.A., 1997 – Le projet de territoire du Diois. Des ruraux acteurs de leur développement, in : Montagnes méditerranéennes, n° 6, p.130.

367.

HOUEE P., 1977 – L’animation du développement en milieu rural : un nouveau pouvoir ?, in : Etudes rurales n° 65, janvier - mars, pp.129-155.

368.

Voir en annexe n°1 du chapitre 9 : Les différentes étapes de l’élaboration de la ’Charte du Pays Diois’.