922. Insertion, ancrage et migration : la diffusion d’un modèle d’appartenance locale

Il ne suffit pas d’installer, encore faut-il favoriser l’ancrage durable de la population qui vit sur le Diois. Or l’ancrage ne va pas de soi sur une enclave où les forces incitant au départ sont nombreuses. La zone peut au contraire constituer une ’prison-refuge’ pour les populations les plus attachées. Elle peut enfin n’être qu’un lieu de transit pour les plus distanciées.

Il y a donc ceux qui partent et que l’on aimerait voir rester ou revenir (les forces vives). Il y a ceux qui restent et que l’on voudraient voir partir435. Et puis il y a ceux qui arrivent en tant que réfugiés sociaux. Ce sont les exclus de la ville que l’on ne sait pas gérer et qui interpellent d’autant plus que l’on a été soi-même étranger ailleurs (notables revenus au pays) ou marginal ici (néo-notabilisés, garde-fous). Enfin, il y a ceux qui disposent du luxe ’indécent’ de la multi-résidence, profitant du paysage et du cadre de vie que d’autres entretiennent et maintiennent à longueur d’année.

L’ancrage durable d’une population active est l’un des enjeux du projet de territoire. C’est une solution au problème chronique des variations saisonnières de fréquentation du lieu. Celles-ci alimentent les conflits d’usages et font peser sur les communes l’entretien de certains équipements, alternativement sous utilisés puis saturés (l’hiver et l’été), sans garantir le maintien des services publics qui conditionnent la vie locale. En bref, il s’agit de maintenir un pays vivant contre les deux risques qui le guettent : son appropriation urbaine comme espace de récréation ou sa transformation en ghetto social.

Si les échelles de référence et les modes d’appartenance qui se croisent en ce lieu sont sources de conflits, elles sont également constitutives d’une dynamique territoriale.

Constitutives, parce qu’il devient à la fois difficile et urgent de trouver à se loger et à travailler localement. Nous l’avons vu, il est peu aisé de trouver du travail, en l’absence d’un bassin d’emploi suffisant436. D’où la nécessité de favoriser la création d’activités, gage du maintien, voire de la croissance démographique, pour préserver les services publics et pour ancrer durablement les personnes qui s’installent.

Il est par ailleurs difficile de se loger car les effets conjugués de la faiblesse du bâti existant et de la présence de nombreux résidents secondaires accentuent la pression foncière qui pèse sur l’installation de populations permanentes. Il devient alors urgent de trouver à loger tous ces candidats, si l’on veut profiter de l’attrait nouveau du rural sur les populations urbaines, attrait que le Diois n’est pas seul à exercer437.

’Vivre et travailler au pays’, voici le défi à relever pour ceux qui sont investis dans le projet de territoire.

Deux ’populations-cibles’ représentent à cet égard un enjeu symbolique pour les zones rurales comme le Diois, qui luttent sur le front de la revitalisation : les résidents secondaires d’une part et les jeunes d’autres part. Les premiers parce qu’ils entretiennent la saisonnalité de l’activité sans vraiment garantir son maintien. Les seconds parce qu’ils sont les forces vives du territoire par excellence et que leur émigration sélective (les plus formés partent) se poursuit.

Notes
435.

Des jeunes notamment, qui s’enracinent dans ce ’pays de liberté’ et s’identifient au modèle des soixante-huitards en cultivant une certaine marginalité.

436.

Les deux principaux employeurs, la cave coopérative de Die et l’hôpital public ont chacun une centaine de salariés, le reste des employeurs étant soit des entreprises de petite taille, soit des entreprises liées aux services publics.

437.

Ainsi, de nombreux maires du Diois reçoivent-ils des lettres ’de candidature’ que les auteurs proposent également à d’autres régions.