1.1.2.1 Les modèles de course technologique

Les modèles de course technologique ont pour objet la détermination du montant investi en R&D et donc in fine l’issue de la course. Dans ce cadre, l’environnement décisionnel est incertain en raison des possibilités de dépassement. Le cadre analytique de ces modèles se présente comme suit.

Deux concurrents (i = {1,2}) - cherchant à remplacer un procédé technologique permettant de produire un bien au coût unitaire c (c>0) par un nouveau procédé dont le coût de production est inférieur - investissent un montant xi en R&D. La firme qui innove la première devient titulaire d’un brevet la protégeant complètement de l’imitation et de la duplication. La probabilité que la firme i innove (h(xi)) est indépendante non seulement du temps passé dans la compétition mais aussi des dépenses en R&D passées investies28. Par conséquent, la probabilité que l’innovation soit réalisée au plus tard à la date t, pour tout message URL FORM01.gif, est notée message URL FORM02.gif désigne la date de découverte de l’innovation et h(.)la fonction hasard29.
Les fonctions de profits dépendent de la situation concurrentielle. Si la firme i est en situation de monopole, alors ses profits seront désignés par message URL FORM03.gif. Si la situation concurrentielle devient duopolistique consécutivement à l’entrée d’un concurrent alors ses profits seront désignés par message URL FORM04.gif avec j = {l,f} et j = l (resp. j = f) désignant la situation de leader (resp. de suiveur) de Stackelberg. Il est alors possible d’en déduire les fonctions de profits espérés escomptés de la firme i à savoir :
message URL FORM05.gif

De ces fonctions de profits espérés escomptés se déduisent les motivations à investir en R&D des deux acteurs. Deux cas polaires s’opposent : la persistance de la situation de monopole et les sauts technologiques (leapfrogging). Dans le premier cas, l’incitation à investir de la firme en place est supérieure à celle de l’entrant ; l’effet efficacité est favorisé. En revanche, lorsque les situations de dépassement et d’éviction sont réalisables (second cas), l’incitation à investir de l’entrant est supérieure à celle de la firme en place. Il y a alors effet de remplacement 30.

Ces modèles de course à l’innovation intègrent l’incertitude quant aux rendements futurs puisque le cadre analytique retenu est celui des choix d’investissement en environnement incertain. Toutefois, ils ne considèrent ni :

  • l’irréversibilité de l’investissement en R&D,

  • ni l’anticipation d’une arrivée d’information étant donné que la valeur espérée des flux de profits est définie sur une même séquence de temps,

  • ni l’interdépendance des décisions dans la mesure où bien souvent, seuls, les montants d’investissement optimaux sont déterminés indépendamment des considérations stratégiques,

  • ni les opportunités d’investissements futurs en raison de l’assimilation des dates de préemption par l’innovation et par les brevets.

La problématique des modèles de course à l’innovation a également été appréhendée dans la cadre de la théorie optionnelle financière.

Notes
28.

Fudenberg et al [1983] proposent des modèles de course à l’innovation intégrant les dépenses passées en sus de celles courantes.

29.

La fonction hasard est deux fois continûment différentiable avec et (Loury [1979], Lee-Wilde [1980]). Cette spécification traduit la décroissance des rendements d’échelle.

30.

L’effet de remplacement est mesuré par la valeur privée de l’innovation acquise par l’agent. Il traduit la faiblesse de l’incitation du monopole à investir en R&D comparativement à l’entrant.