Détenir une option d’abandon offre au décideur le droit mais non l’obligation de suspendre irrévocablement (Dixit-Pindyck [1994] chap. 6, Abel et al [1996]) ou temporairement (Dixit [1989], Dixit-Pindyck [1994] chap. 7) un investissement l irrécouvrable. L’option d’abandon est évaluée à la valeur des flux de profit d’exploitation que la firme aurait pu percevoir si elle avait maintenu son investissement.
L’investissement est poursuivi tant que les flux de profits sont positifs. En revanche, s’ils deviennent négatifs, la firme peut avoir intérêt à suspendre l’opération. Dans la mesure où le redémarrage est coûteux, il existe une valeur d’option liée au maintien en vie du projet. L’abandon du projet devient optimal lorsque les pertes sont suffisamment grandes. Le problème de décision de l’agent tient alors dans la détermination d’une valeur seuil (VC) à partir de laquelle le projet doit être abandonné. La règle de décision est telle que : le projet est maintenu en vie tant que la valeur actuelle des cash-flows à laquelle s’ajoute la valeur espérée des flux de profit liés à la poursuite de l’investissement excèdent les coûts d’exploitation.
Soit une firme engagée dans un projet de valeur V lui permettant de produire un bien au coût variable constant de production C. Par hypothèse, l’évolution du prix de la production suit un processus stochastique admettant pour expression :
lorsque μ et σ désignent les moyenne et écart type instantanés du processus et dz l’accroissement standard du processus de Wiener. Deux options se présentent à la firme. Elle peut, soit abandonner ou suspendre son projet, soit le maintenir en vie.
La valeur espérée escomptée du projet Vj(P) dépend du choix du décideur :
s’il décide de suspendre (ou d’abandonner) le projet (j=1), la valeur de ce dernier ne dépend que des profits futurs escomptés pouvant être obtenus si le prix de vente est supérieur au coût. Dans ce cadre, la valeur espérée escomptée du projet est :
où A1 est une constante d’intégration et β1 une constante.
s’il décide de maintenir son projet lorsque celui-ci est rentable (j=0), les flux de profit se composent de flux courants et futurs d’exploitation. La valeur espérée escomptée du projet devient :
lorsque r désigne le taux d’intérêt sans risque, B2 une constante d’intégration, β2 une constante positive.
si le prix de vente fluctue entre les deux seuils, la politique d’investissement de la firme n’est pas modifiée.
Modélisation de Dixit [1989] : Investir dans un projet offre au décideur non seulement une option de croissance sur les opportunités à venir mais aussi une option de vente c’est-à-dire la possibilité de suspendre temporairement ou définitivement le projet. Cette dernière dépend de l’incertitude à laquelle est soumis le décideur supposé neutre au risque.
Les firmes se définissent par leur technologie de production. Elles peuvent, soit :
investir une somme irrécouvrable k dans une nouvelle technique de production leur permettant de produire au coût variable ω,
abandonner leur technique de production ; dans ce cas, elles supportent des coûts de sortie l supposés irrécouvrables.
L’incertitude à laquelle est soumis le décideur porte sur le prix du marché. Celui-ci suit un processus de Wiener se caractérisant par une différentielle stochastique du type :
où α représente le taux de variation instantané moyen, σ l’écart type et dz l’accroissement du processus de Wiener standard. La valeur espérée escomptée des profits dépend de l’incertitude sur le prix de vente et de la politique technologique de la firme.
En maintenant le projet en vigueur, la firme perçoit les revenus d’exploitation suivants :
où μ représente le taux de croissance du prix du marché162, ρ le taux d’escompte. Poursuivre l’exploitation du projet offre à la firme des opportunités d’exploitation. La valeur présente nette espérée V1(P) lorsque le projet est maintenu en vigueur admet pour expression :
avec A une constante d’intégration et α une constante positive. En revanche, si le projet est interrompu, sa valeur actuelle nette espérée V0(P) correspond à la valeur de la fermeture du projet à savoir :
Il montre que :
dès lors qu’il y a incertitude, l’effet hystérésis existe et cela même si les coûts irrécouvrables sont faibles,
l’incertitude accroît la zone d’inaction.
Modélisation de Pindyck [1993] : En investissant dans un nouveau projet, la firme subit une incertitude portant, soit :
sur les rendements ultérieurs dans la mesure où elle ignore quel sera le prix du marché et/ou la demande ultérieure,
sur les coûts de production en raison de l’évolution aléatoire de l’état de la technique (incertitude technique) et/ou des prix des facteurs de production (incertitude portant sur les facteurs de production).
Aussi, il est possible de mettre en lumière les conséquences sur la valeur de l’opportunité d’investissement F(K) de ces incertitudes.
Soit une firme investissant dans un projet générant des rendements V supposés connus. Les coûts K sont supposés incertains. Leur expression est :
où z(t) ;w(t) désignent les processus de Wiener supposés non corrélés et g(l,K) caractérise la structure des coûts. Le taux d’investissement l est tel que l’investissement est abandonné si l=0 et poursuivi si l=k où k désigne le taux d’investissement maximal d’une firme. Si γ=0, l’incertitude est de nature technique ; en revanche si β=0, l’incertitude porte sur les facteurs de production. La valeur de l’opportunité d’investissement F(K) admet pour expression :
si seule l’incertitude technologique joue un rôle, alors la valeur F(K) devient :
Si r=0, la valeur critique K* est une fonction croissante de β. Aussi, plus l’incertitude technologique est grande, plus grande est la valeur de l’opportunité d’investissement.
Si r>0, F(K) est une fonction croissante (resp. décroissante) de β et k (resp. K).
Si r=0, il n’existe aucune incitation à entreprendre l’investissement.
Si r>0, F(K) est une fonction décroissante de K ; K* est, quant à elle, une fonction décroissante de γ.
Modélisation de Dixit-Pindyck [1994], chap. 6 : Exercer une option d’abandon offre à son détenteur le droit mais non l’obligation de suspendre, soit temporairement, soit définitivement son investissement. Suspendre temporairement un investissement lui évite de supporter les coûts irrécouvrables de sortie et d’entrée.
Soit une firme, neutre au risque, investissant dans un projet de valeur V lui permettant de produire un bien au coût variable constant de production C. L’évolution du prix de la production suit un processus stochastique admettant pour expression :
lorsque μ et σ désignent les moyenne et écart type instantanés du processus et dzs l’accroissement standard du processus de Wiener. L’expression des flux de profit est alors :
Deux configurations se distinguent :
Ils montrent que :
la valeur V(P) est une fonction croissante de σ,
la valeur seuil P* à partir de laquelle le projet est entrepris est une fonction croissante de (μ-α).
En , le prix initial est . Aussi .
Les coûts de suspension de l’exploitation sont supposés nuls.