3.2.1.2 Les circulations de hauteur

En opposition aux précédentes, les circulations de hauteur sont en apparence une contrainte, en particulier lorsqu’il faut franchir un col élevé pour traverser un massif, tels les massifs centraux de la chaîne alpine. Mais au sein des massifs internes ou préalpins, il s’agit du mode de circulation habituel des personnes résidentes. La question n’est pas tant celle de l’altitude absolue des itinéraires que de la perception qu’en ont les personnes. Pour les habitants des hautes terres, l’altitude des finages, relative car variable selon les massifs et l’implantation des villages, est une donnée du cadre de l’existence. Les plateaux du Vercors ou les vallées élevées des Massifs centraux sont considérés comme un tout homogène où les déplacements se font dans le cadre des finages, quelle que soit l’altitude absolue des lieux. La considération de déplacements en altitude, c’est-à-dire en montagne, commence quand l’on s’élève au-dessus des habitats, quel que soit la dénivelée (Mathieu 1997). Il s’en suit que selon le mode d’occupation du sol, la notion d’altitude n’est pas la même pour les mêmes lieux, par exemple à des époques différentes : un fond de vallée élevé ne sera pas considéré comme de la montagne si des villages permanents l’occupent. Qu’ils soient désertés, et les lieux prennent de l’altitude et deviennent montagnards. Il est donc nécessaire de connaître au préalable la localisation des habitats pour discuter du concept d’altitude dans une société donnée, ce qui, pour le Néolithique, pose de réels problèmes (cf. p. 409-411). Il est néanmoins reconnu que les habitats pérennes n’ont jamais dépassé, dans les massifs internes des Alpes occidentales, les altitudes de l’ordre de 2000 m durant les époques historiques (Coolidge 1913). Tous les itinéraires placés au-dessus de cette limite peuvent donc être considérés comme des circulations d’altitude, mais un s’agit là d’un plancher maximum rarement atteint : dans le Vercors par exemple, les plus hauts villages ne dépassent guère 1200 m d’altitude.

Les circulations d’altitude sont tributaires des formes du relief et en particulier des cols, aspect que nous détaillons plus loin. Leur caractéristique est de jouer avec les pentes pour atteindre, à partir des points bas, des zones de circulations plus aisées : hauts plateaux, lignes de crête, vallons perchés ou versants adoucis au sein desquels le cheminement se fait sans grande difficulté. Dans les Alpes du Sud, il existe ainsi de grandes étendues qui permettent sans beaucoup varier d’altitude de passer d’un bassin versant à l’autre. Il en est de même pour un massif comme le Vercors, difficile d’accès depuis l’extérieur mais de parcours interne aisé. L’avantage du choix des hauteurs apparaît par contraste avec les difficultés des circulations basses : cours d’eau faciles à traverser, lisibilité de l’itinéraire par le dégagement du paysage, discrétion par rapport aux zones habitées. Les contraintes sont essentiellement celles générées par l’altitude et le climat : danger des éboulements, des avalanches, des brusques changements de temps, éloignement des centres de vie.

Au contraire des itinéraires bas, les déplacement en altitude s’inscrivent dans des espaces peu marqués par la présence humaine, du fait de l’hostilité des conditions de vie. Mais ces milieux sont néanmoins appropriés par l’homme, qui y passe ou y stationne pour cinq raisons (hormis celles de la civilisation des loisirs) :

Les fonctions de passage et d’acquisition des roches concernent de très près la question des productions de lames de hache. Une attention particulière sera donc portée aux découvertes d’altitude (carte 9).