Les cols sont les éléments les plus typiques des milieux montagnards et ont suscité une abondante littérature (cf. parmi les pionniers, Coolidge 1913). Nous avons par ailleurs étudié les modalités de l’appropriation humaine des cols depuis l’Antiquité (Thirault 1999a). Nous ne présentons donc ici que les points essentiels pour l’étude des circulations au Néolithique. Omniprésents dans tous les massifs, y compris aux plus modestes altitudes, les cols peuvent être définis comme les points hauts d’un itinéraire permettant de franchir une crête (aussi adoucie soit-elle) au moindre effort. Ces passages sont hiérarchisés selon leur altitude absolue, leur dénivelée, leurs pentes, leurs conditions d’accès (parois, glaciers, éboulis, risques d’avalanches, etc.), critères qui déterminent leur accessibilité naturelle. Ainsi, un col d’altitude élevée peut, si les pentes en sont douces et la dénivelée peu importante, être aisément accessible. Associées à la position géographique, ces données naturelles conduisent à l’idée de col historique ou de grand col, mais n’expliquent pas toujours le succès séculaire d’un passage. Interviennent alors les conditions politiques, stratégiques, économiques ou commerciales qui ont déterminé son rôle historique (Coolidge 1913, p. 194-195). C’est donc bien le choix des hommes qui détermine l’emprunt régulier de tel ou tel col. La carte 4 permet de situer les principaux d’entre eux, qui sont répartis entre les cols transalpins, dont six s’abaissent à des altitudes comprises entre 1800 et 2200 m (cols de Tende, de Larche, du Mont-Genèvre, du Mont-Cenis -deux passages- et du Petit-Saint-Bernard), les cols longitudinaux, qui assurent les circulations internes aux Grandes Alpes, et les cols préalpins qui relient le Sillon alpin aux bassins de la Durance et du Buëch et ce dernier aux bassins de la Drôme, de l’Eygues et de l’Ouvèze dans le Diois et les Baronnies.
A côté des grands cols existe une multitude de points de franchissement des lignes de crête dénommés col, collet, pas, passage ou forclaz. Pour les seules Grandes Alpes françaises, l’alpiniste anglais W.A.B. Coolidge a répertorié 114 passages étagés entre 1167 et 4332 m d’altitude (record dans le massif du Mont-Blanc). L’actuel département de la Savoie présente les cols en moyenne les plus hauts, tous situés au-dessus de 2100 m (Coolidge 1913, Appendice I et p. 381-383). Toujours en Savoie et à titre d’exemple, si nous focalisons notre examen sur la ligne de partage des eaux transalpine entre la haute Maurienne et les bassins piémontais, du Mont-Thabor aux Levanna, les chiffres augmentent considérablement. Nous avons en effet recensé, à partir des indications portées sur les cartes I.G.N. à l’échelle 1:25000°, 56 points de passage connus pour une longueur de crête de 120 km, soit en moyenne un col tous les deux kilomètres (fig. 4). La moitié d’entre eux sont perchés entre 3000 et 3300 m d’altitude, et deux seulement, les deux cols du Mont-Cenis, s’abaissent entre 2000 et 2200 m d’altitude22. Par beau temps, tous sont franchissables en une journée, et plusieurs d’entre eux ont eu autrefois une importance économique et sociale non négligeable (Tracq et Inaudi 1998).
Ces hauts cols, certains englacés, sont en majorité situés dans les massifs dominant Bessans et Bonneval, villages nichés en fond de vallée entre 1700 et 1800 m d’altitude. Les dénivelées extrêmes, du côté français, atteignent près de 1800 m, mais la plupart ne dépassent pas 1000 à 1500 m, soit 6 à 10 heures de marche montée et descente comprises pour un piéton robuste.