Plusieurs groupes culturels et styles céramiques sont reconnus avec des statuts variables. En Provence, le mieux documenté est le Couronnien, connu depuis les travaux de M. Escalon de Fonton à La Couronne à Martigues et implanté en basse Provence occidentale (Escalon de Fonton 1977 ; Courtin 1974, p. 152-162). Les céramiques de formes simples à rares décors plastiques, le débitage de grandes lames épaisses retouchées de préférence aux lamelles, l’emploi de la retouche plate biface sur éclats démarquent ce groupe du Chasséen, et un hiatus semble exister entre la fin du Néolithique moyen et le Couronnien (D’Anna 1995). En Vaucluse et en Lubéron est défini le groupe de Fraischamp, dont la céramique soignée aux formes simples présente de nombreux décors variés gravés ou plastiques tels les cordons lisses (Sauzade, Carry et Chambert 1990). Il est daté dans la seconde moitié du IVème millénaire av. J.-C. et relève d’ascendances chasséennes et du début du Ferrières languedocien (infra). Deux pôles semblent lui succéder dans la même région : le groupe Rhône-Ouvèze, où les formes céramiques se diversifient avec la réapparition des profils segmentés à carènes, associés à des décors plastiques de cannelures ou obtenus par incision ; et un pôle encore mal documenté dénommé Nord-Vaucluse, associé aux hypogées présentés plus haut (D’Anna 1995).
En Languedoc oriental, après une phase de transition où le répertoire céramique chasséen s’efface55, deux cultures sont classiquement décrites sur la base d’une abondante documentation de sites d’habitats et de dolmens (Gascò et Gutherz 1986 ; Gutherz 1990 ; Gutherz et Jallot 1995) : dans une phase ancienne, le Ferrières aux céramiques de formes simples, à décors plastiques de cordons fréquents de thèmes et de techniques variés qui permettent de distinguer des faciès locaux ; dans une phase postérieure, le Fontbouïsse en continuité évolutive avec le Ferrières mais marqué par la présence des vases carénés, des parois fines et par les décors, en particulier de damiers (décor métopal). Les faciès céramiques du Fontbouïsse ont une répartition moindre que ceux du Ferrières et ont peu d’impact en vallée du Rhône et en Ardèche.
En moyenne vallée du Rhône, l’étude des faciès céramiques permet de reconnaître des évolutions contrastées entre les deux rives (Beeching 1986). Côté Ardèche, le Ferrières est bien attesté en particulier en stratigraphie à la Baume de Ronze à Orgnac, avec évolution sur place, tandis que l’impact du Fontbouïsse est plus difficile à discerner. Près du fleuve prennent place le style des Bruyères en rive droite, qui présente des affinités en rive gauche avec le groupe d’Allan reconnu en Drôme jusqu’à la basse vallée de l’Isère, tous deux définis par des céramiques non décorées. Plus à l’est, dans le bassin du Buëch et de la haute Durance, le Néolithique final est bien attesté mais demeure très mal caractérisé : son rattachement aux influences méridionales sur la base de l’industrie lithique des sites de plein-air et des ensembles sépulcraux ne pose guère de problème mais ne permet pas d’avancer dans la reconnaissance de groupes régionaux (D’Anna 1991 ; Lombard 1999).
Dans les Alpes françaises du Nord et leurs avant-pays (Dauphiné, Savoie), la connaissance du Néolithique final est liée en grande partie aux sites littoraux. La phase ancienne est absente, sauf aux Balmes de Sollières en Maurienne où des occupations d’affinités nord-orientales sont reconnues (Vital, comm. orale). A partir de la fin du IVème millénaire av. J.-C., les occupations littorales surtout caractérisées sur les rives des lacs d’Annecy, du Bourget et de Paladru peuvent être mises en parallèle avec l’évolution des séquences culturelles reconnues sur les sites littoraux du plateau suisse56 et du Jura.57 L’appellation de Civilisation Saône-Rhône (Thévenot, Strahm et alii 1976 ; Bocquet 1988) retenue un temps pour unifier les mouvements culturels du bassin de la Saône, du Jura, du Plateau suisse et des Alpes françaises du Nord ayant été battue en brèche au profit d’une vision plus dynamique des évolutions culturelles (Pétrequin, Chastel et alii 1987-88), la caractérisation du Néolithique final des avant-pays savoyards et dauphinois s’établit actuellement par comparaisons externes. En contrepartie, le degré d’autonomie du Néolithique final de ces régions est encore mal cerné (Rey 1999, p. 52-59). Les comparaisons permettent de reconnaître une possible phase proche du Horgen à Annecy-le-Vieux/Petit-Port suivie d’occupations à rapprocher du Lüscherz58 puis de l’Auvernier59 (Marguet 1995 ; Rey 1999). Des composantes plus méridionales sont relevées sur le lac d’Aiguebelette (Bocquet 1976e). Dans les vallées internes, l’ouverture sur les influences extérieures est illustrée aux Balmes de Sollières par les affinités méridionales des niveaux supérieurs du Néolithique final (Vital, comm. orale), mais les autres occupations connues demeurent très mal caractérisées (Rey et Thirault 1999).
Le Campaniforme est bien attesté dans le Sud-Est de la France (Combier et Thévenot 1959), mais sa place chrono-culturelle et sa relation au Néolithique sont encore mal comprises. Il est présent tant en habitats qu’en sites funéraires, en particulier dans des sépultures collectives occupées antérieurement. En Provence, la complexité du phénomène est illustrée par la reconnaissance de sites d’occupations Néolithique final où sont présents des éléments campaniformes (céramiques) et de sites à mobilier campaniforme «purs», ces derniers placés dans des lieux d’accès difficile : grottes, sites perchés, etc. (Courtin et Onoratini 1978 ; Barge-Mahieu 1989 ; Müller 1989 ; D’Anna 1999). Les mêmes variations sont reconnues en vallée du Rhône : dans la grotte de la Chauve-Souris à Donzère, les niveaux supérieurs du Néolithique final montrent quatre composantes céramiques synchrones dont le Fontbouïsse, le Remedello et le Campaniforme, tandis que deux phases d’occupations du site de plein-air de Roynac/Le Serre sont purement campaniformes (Vital à paraître). De même à Géovreissiat dans le Bugey a été fouillé un vaste habitat campaniforme (Bailly, Besse et alii 1998).
Sites de la grotte de l’Avencas, aven de La Boucle à Corconne, habitat de la Mort-des-Anes à Villeneuve-les-Maguelonne (Gascò et Gutherz 1986).
Schifferdecker et Beeching 1976 ; Schifferdecker 1988 ; Wolf 1993, 1995.
Pétrequin 1988 ; Pétrequin, Chastel et alii 1987-88 ; Giligny, Maréchal et alii 1995.
Sites de Conjux/La Châtière, Aiguebelette, Thonon/Port de Rives, La Novalaise/Gojat, Charavines/Les Baigneurs.
Annecy/Le Port, Veyrier/Vieugy, Conjux/La Chatière, Brison-Saint-Innocent/Mémars.