1.1.1 Méthodologie

Conformément aux principes présentés plus haut, la détermination des roches s’effectue au moyen des analyses à l’oeil nu et à la loupe binoculaire réalisées par nous-même sur l’ensemble des séries étudiées, et des analyses de laboratoire réalisées pour les Alpes françaises sous la direction de D. Santallier68, pour les Alpes occidentales italiennes sous la direction de M. Ricq-de Bouard et de R. Compagnoni. Toutes visent à caractériser la roche en présence, à des degrés divers et complémentaires selon la méthode retenue : diagnose globale à l’oeil, structure et minéraux en lames minces, minéralogie aux rayons X, géochimie des espèces minérales à la microsonde électronique. L’étape suivante consiste à grouper les individus en familles cohérentes du point de vue pétro-génétique, qui peuvent être associées dans les gîtes autochtones. A ce stade débutent les vraies difficultés, puisqu’il faut nommer les roches et opérer des choix
dans les groupements, ce qui n’est pas aisé dans le cas des roches métamorphiques car leur variabilité à l’affleurement est souvent rapide et importante. A l’inverse du géologue qui étudie la diversité d’un affleurement présent sous ses yeux, l’archéologue ou le géo-archéologue doit déduire un groupe de roches probable à partir d’individus plus ou moins distants dans l’espace. Pour identifier les provenances, nous avons choisi de créer des groupes pétrographiques cohérents avec les données de la géologie alpine. Au-delà de la détermination de roches proches qui peuvent être groupées sous un même nom géologique (par exemple les serpentinites), nous avons opéré des regroupements réunissant plusieurs roches de probable compatibilité à l’affleurement. Ce fait ne signifie pas qu’à un groupe corresponde un seul affleurement connu, ni même exploité : les Alpes présentent souvent pour chaque roche ou famille de roches une multitude d’affleurements autochtones, sans compter les transports importants opérés par la tectonique, les glaciers et les eaux courantes. Pour ces raisons, une approche purement géologique des provenances n’est pas possible et nous analysons plus loin les données pétrographiques et archéologiques qui permettent de préciser les interprétations géologiques. Nous sommes pleinement conscient du caractère artificiel de ces regroupements : ils ne sont destinés qu’à l’étude et devront sans doute à l’avenir être précisés, redéfinis, voire abandonnés. Mais ils constituent à notre sens le seul moyen de passer d’une stricte définition pétrographique objet par objet à des ensembles d’objets ayant un sens pour l’étude archéologique. Pour la commodité de l’exposé, un nom générique a été attribué à chaque groupe de roche, nom qui correspond à la roche emblématique et dont l’appellation est déjà usitée.

De manière quasi-absolue, les roches rencontrées dans notre zone d’étude sont alpines soit au sens géologique (alpin s. géol.), c’est-à-dire formées lors de l’orogenèse alpine au Secondaire, roches qui affleurent dans les Alpes mais aussi dans les Apennins liguro-piémontais ; soit au sens géographique (alpin s. géogr.), c’est-à-dire provenant des massifs métamorphiques des Alpes occidentales. Les quatre premiers groupes décrits (éclogites, jadéitites, glaucophanites et ultrabasites) sont constitués de roches alpines s. géol., de loin les plus fréquentes dans notre zone d’étude. Les métabasites épi- et mésozonales peuvent être alpines s. géogr et/ou s. géol., ou non. Les autres roches non alpines sont aisément identifiables, en provenance d’autres régions où elles ont déjà été étudiées : fibrolites d’Auvergne, métapélites vosgiennes, cinérite du Rouergue, silex.

Notes
68.

La liste des analyses concernant les lames de hache est placée en annexe 9.