2.1.2.2 Bilan

La cartographie de la diffusion des éclogites et de plusieurs critères discriminants minéralogiques et visuels, mise en parallèle avec la géographie des affleurements de matières premières, permet de proposer sur des arguments croisés l’existence, à l’échelle du Néolithique dans les Alpes occidentales et le bassin du Rhône, de quatre ou cinq grands axes de circulation issus de sources distinctes (carte 18) :

* un premier mouvement mis en évidence par M. Ricq-de Bouard prend sa source dans les Apennins liguro-piémontais et balaie vers l’ouest la côte ligure, la Provence et le Languedoc, selon un axe haut-provençal et peut-être aussi maritime (Ricq-de Bouard 1981 ; Ricq-de Bouard, Compagnoni et alii 1990) ;

  • un second axe issu des affleurements de la partie Sud des Alpes piémontaises, entre autre la région du Mont-Viso, parcourt le Queyras, l’Ubaye, les bassins de la haute Durance et du Buëch, les Préalpes drômoises et la moyenne vallée du Rhône au moins entre la confluence de l’Isère et celle de l’Ardèche ;

  • un troisième mouvement issu du nord des Alpes piémontaises et peut-être du Val d’Aoste englobe la Savoie depuis la rive sud du Léman jusqu’au Grésivaudan et peut-être le bassin de Grenoble, puis les avant-pays occidentaux et le Bugey, la Dombes et la Bresse. Une distinction est peut-être possible entre la Haute-Savoie et l’Ain d’une part, la Savoie et l’Isère d’autre part, sur la base des couleurs de roche ;

  • au nord, le Plateau suisse tire parti d’éclogites issues des moraines régionales ou des affleurements du Valais ;

  • dans le Valais, la préférence va à des éclogites sombres d’origine régionale (?), peut-être liées au mouvement du Plateau suisse.

Ces quatre ou cinq axes de diffusion ne doivent pas être considérés a priori comme absolus : les limites respectives des diffusions de chaque zone ne peuvent à ce stade être établies. L’étude de leur variation chronologique est indispensable pour démontrer leur persistance ou leurs fluctuations dans le temps (cf. chapitre 5). Cependant, malgré des vides documentaires importants dans le Briançonnais et dans le département de l’Isère, la séparation semble nette entre les diffusions situées au nord et au sud de l’axe Briançonnais-Pelvoux-Trièves-Vercors, ainsi qu’entre Haute-Savoie et Valais. Une telle partition dans les axes de circulation transalpins a déjà été proposée à titre d’hypothèse (carte 20, reprise de Ricq-de Bouard et Fedele 1993, fig. 8). Les auteurs cités reconnaissaient que le schéma proposé était largement hypothétique, au vu de la carence d’analyses au nord de la Provence (ibid., p. 12-19). Mais si les limites proposées par ces auteurs doivent être à notre sens corrigées, l’intuition de zones de diffusion contiguës est pleinement confirmée.