1.2.3.5 Synthèse

L’emploi du sciage montre de fortes disparités selon le type de roche : il est habituel pour les roches «valaisannes», bien attesté quoi que rare pour les éclogites et les jadéitites, anecdotique pour les ultrabasites et absent des autres groupes. Nous avons mis en évidence plus haut l’absence de relation entre le type de roche et le recours au sciage. Dès lors, l’emploi du sciage est un choix culturel : la carte de répartition des lames de hache sciées permet d’argumenter dans ce sens (carte 21). Le sciage est une technique courante sur le Plateau suisse (Willms 1980, Gross-Klee et Schibler 1995), et cet état de fait se prolonge sur le pourtour du Léman et dans le Valais, en particulier pour les roches «valaisannes», avec attestation d’un travail sur place par des ébauches et des déchets (cf. infra). Plus au sud, il faut distinguer les massifs internes des avant-pays. Dans les massifs internes, le sciage est pratiqué à Roreto/Balm’Chanto (n° 922-1) et à Sollières/les Balmes (n° 547-1), mais seul le premier site montre le travail sur place. L’ébauche d’Embrun (n° 315), bien qu’isolée, suggère l’emploi du sciage dans le bassin de la Durance. Dans les avant-pays et la vallée du Rhône, seuls des lames polies achevées sont recensées, à l’exception d’Annecy-le-Vieux/Le Petit Port (n° 601-1) et d’Injoux-Génissiat/la Bressane (n° 718-1), en relation probable avec le Léman proche. Les traces de sciage sont remarquablement peu nombreuses dans le sud-Drôme et le bassin du Buëch où les lames polies sont pourtant abondantes. Ces faits montrent le lien technique avec la Suisse et le caractère intrusif du sciage au sud du Léman et du Valais, mais l’interprétation n’en est pas aisée : le lien entre les hautes vallées de l’Arc et de la Chisone et le Haut-Rhône (Léman et Valais) semble clair puisque le sciage n’est pas employé ailleurs dans les Alpes italiennes, ni dans le bassin du Pô et la Ligurie. Mais l’absence de sciage en Val d’Aoste pose problème et laisse penser à un relais passant par la Savoie. Plus à l’ouest, tous les cas de sciage -sur éclogites- sont probablement à mettre sur le compte de diffusions depuis le nord, via le Sillon alpin et l’axe rhodanien, ce qui contredit le sens général des diffusions établi pour les éclogites des Alpes italiennes vers l’ouest (carte 18, chapitre 2). Mais ces circulations longitudinales aux Alpes ne concernent en l’état actuel des connaissances qu’une dizaine d’objets sur plusieurs centaines. Plus au sud, le sciage des éclogites et des jadéitites est inconnu en Provence et en Languedoc, alors qu’il apparaît en direction des Pyrénées sur des amphibolites calciques (Ricq-de Bouard 1996, p. 49-50).