1.3.1.2 Le bouchardage de façonnage postérieur au polissage

Bien que le bouchardage soit utilisé pour préparer les surfaces qui sont ensuite éventuellement polies, nous avons relevé 6 % de cas, toutes roches confondues (sur un effectif de 1230), où le bouchardage est effectué après une phase de polissage. Ce pourcentage, qui ne tient pas compte des cas de reprises suite à une cassure de la lame polie, est un minimum du fait de la difficulté à reconnaître dans de nombreux cas la succession des actions techniques. En théorie, un bouchardage postérieur à un polissage mord sur celui-ci, surtout s’il agit selon un angle ouvert comme cela est le cas à la jonction entre faces et côtés : la rupture est nette, et de petits éclats peuvent survenir sur le poli. Dans les autres cas, l’antériorité de l’une ou l’autre technique est difficile à établir et les objets sont classés a priori selon l’ordre bouchardage-polissage.

Un cas net de postériorité du bouchardage sur le polissage lors de la phase de façonnage est fourni par une ébauche du site des Eaux Vives à Genève (pl. 76 n° 1), débitée, taillée de manière semi-abrupte sur les deux côtés en direction de la face A, puis polie sur les deux faces. Un bouchardage intense est ensuite intervenu pour régulariser les côtés, bouchardage qui remonte sur la face A où il mord nettement sur le poli. Bien qu’il soit impossible de démontrer de manière formelle qu’il ne s’agisse pas d’une grande lame polie accidentée et reprise, cet exemple fournit un argument pour montrer le rôle complémentaire et récurrent du bouchardage-polissage. Un autre exemple de grosse ébauche cassée en cours de bouchardage (pl. 85 n° 1) montre une extrémité distale à nombreuses surfaces brutes en cours de bouchardage fin et régulier, et un poli sur une face. Là aussi, l’hypothèse d’une lame polie cassée et reprise ne peut être complètement écartée mais il semble plutôt qu’il s’agisse d’une opération cohérente où un premier polissage rapide sert à calibrer l’épaisseur et la régularité des faces, avant de poursuivre le travail par le bouchardage des côtés et de régulariser la jonction avec les faces. Autre exemple, une grande lame de hache entière et achevée provenant de Ribiers (pl. 141) est polie sur les faces et les côtés et bouchardée sur les côtés. Une partie au moins du bouchardage est postérieur au polissage des faces, comme en attestent les petits éclats à la jonction faces/côtés. Des reprises de bouchardage sur des surfaces importantes sans modification de la forme peuvent être notées sur une grande lame polie de Sigottier (pl. 132). Dans ce cas, la reprise de bouchardage est difficile à expliquer mais peut être liée à une remise en forme des biseaux. De telles successions, rarement décrites, ont été relevées sur le mobilier des sites d’Auvernier (Buret 1983, p. 117-118).