3.1.1.3 Les vallées alpines piémontaises

Tous les sites sont implantés à faible distance des affleurements en place ou des gîtes peu remaniés, jamais à plus d’une vingtaine de kilomètres.

• Sur le site de Castello del Versino à Viù dans une des vallées de Lanzo (n° 929-1), une vingtaine d’e pièces en roches tenaces ont été recueillies mais sont aujourd’hui perdues (Barocelli 1961). Les roches sont décrites comme des amphibolites et des pyroxénites qui en fonction des connaissances de l’époque peuvent être interprétées comme appartenant à la famille des éclogites. D’après les descriptions et les photographies publiées, les lames de hache sont longuement travaillées par bouchardage, le polissage est limité aux biseaux voire inexistant, ce qui suggère fortement, pour les pièces fragmentées, la présence d’ébauches brisées au cours du bouchardage. Un percutant sphéroïde et deux grands éclats bouchardés renforcent l’idée d’un site de travail.

• Dans le Val de Suse, le site de Rumiano à Vaie (n° 928-1) a livré depuis un siècle une douzaine d’e pièces en roche tenace, récemment publiées avec des dessins détaillés (pl. 55 ; Bertone et Fozzati 1998, fig. 24 et 25). Outre trois grandes lames polies, trois autres petites et trois tranchants, trois pièces se rapportent au travail des éclogites : deux moitiés distales d’ébauches longuement bouchardées de section ovalaire, portant des traces d’essai de polissage sur les biseaux et une pièce massive grossièrement triangulaire de 15 cm de long environ, taillée et bouchardée vers la base, qui peut être une ébauche et/ou un percutant lourd.

• Plus en amont dans le val de Suse, la fouille de la Maddalena à Chiomonte (n° 913-1), inédite et en cours d’étude, a livré une abondante industrie lithique polie. Une petite ébauche de lame de hache en éclogite est signalée mais il est probable que le nombre de pièces techniques soit plus important (Fozzati et Bertone 1996, p. 141-142).

• La fouille du site Néolithique final de Balm’Chanto à Roreto dans le Val Chisone (n° 922-1) a fait l’objet d’une publication monographique (Nisbet et Biagi dir. 1987). Deux types de productions en roches polies sont attestés : des armatures de flèche en serpentinite, et des lames de hache en serpentinites et en éclogites. Le travail des éclogites est démontré par treize fragments sciés, ainsi que par deux ébauches taillées relativement plates, à l’image des lames polies achevées en éclogites et en serpentinites qui sont des éclats tranchants non façonnés ou vite polis sur les faces (types C et D), probablement réalisés sur place en relation avec le travail des armatures de flèche et le sciage. Trois percutants en éclogites et un polissoir portatif complètent cet assemblage (pl. 31 et 32).

• Du Val Chisone au Val Pô, quatre sites ou ensembles de points de découvertes de surface issus des prospections du Centre d’Art Préhistorique de Pinerolo permettent d’entrevoir la production de lames polies dans ces vallées où les connaissances relatives au Néolithique sont des plus faibles. Dans le Val Chisone, le site de Sertas à Bric Castelletto (n° 909-1) a livré une extrémité distale d’ébauche (Cinquetti 1987-88, p. 19) ; sur le Monte Muretto, au débouché de la vallée (n° 917-1), quatre ébauches entières ou fragmentées, taillées et bouchardées, ainsi qu’un percutant, proviennent de plusieurs points de découverte (Cinquetti 1987-88, p.16-19, pl. IX-X). Dans la basse vallée du val Pèllice, le site de San Bernardo à Bibbiana (n° 907-1) a livré deux fragments d’ébauche parmi un mobilier dispersé sur les versants (Cinquetti 1987-88, p. 14-15). Au débouché du Val Pô, les prospections sur le Monte Bracco (n° 916-1) ont permis de ramasser plusieurs éclats et fragments d’ébauches (Cinquetti 1987-88, p. 8-13, pl. IX-X).

• Situé en plaine face au débouché du Val Pèllice, le site de Rocca di Cavour (n° 911-1) présente une grande importance pour les productions de lames polies. Les prospections systématiques effectuées dans les années 1980 ont permis de reconnaître des occupations néolithiques sur les flancs et le sommet du rocher qui émerge de la plaine, attribuées principalement au Néolithique moyen V.B.Q. Parmi le mobilier, une centaine de fragments, d’ébauches, de lames polies et de percutants en éclogites attestent le travail des roches tenaces. Bien que les affleurements primaires d’éclogites ne soient situés qu’à une vingtaine de kilomètres à l’est, le ramassage de roches dans le lit du Pèllice qui charrie beaucoup de galets d’éclogites (observation personnelle) et dans les paléovallons du Pô est avancé (Zamagni 1996a). Nous avons vu plus haut les raisons qui nous poussent à penser au contraire que les approvisionnements sont issus des roches en place ou peu déplacées. Les ébauches sont taillées sur les deux faces puis bouchardées. La présence de 50 éclats de décorticage des blocs, de 26 éclats de plein façonnage, de 17 fragments d’ébauches et de 3 percutants sphéroïdaux démontre la réalisation sur place de la taille puis du bouchardage (pl. 4 ; Zamagni 1996a).