2.2.1.7 Zermatt/Garten

Dans une profonde vallée latérale du Valais, le cirque de Zermatt constitue un réservoir de roches tenaces exceptionnel et, entre les sommets célèbres du Mont-Rose et du Mont-Cervin, donne accès au col du Théodule (carte 4, n° 8). Bien que très haut perché (3317 m) et occupé par un large glacier de part et d’autre de l’échancrure, ce col a eu durant le Moyen-Age et jusqu’au XXème siècle une grande importance économique car il constitue l’un des rares passages naturels du Valais vers les plaines d’Italie du Nord, via le Val d’Aoste (cf. Thirault 1999a, avec bibliographie). Il a été fréquenté dès le Mésolithique et durant le Néolithique comme l’atteste le site récemment fouillé de l’Alp Hermettji (n° 823-1), abri-sous-roche placé vers 2600  m d’altitude entre le col du Théodule et celui d’Hérens, le long d’un itinéraire d’altitude plus praticable que la descente directe par la vallée de Zermatt (Curdy, Leuzinger-Piccand et Leuzinger 1998).

Mais le col du Théodule était auparavant connu des préhistoriens par la découverte d’une très grande lame polie sur un versant placé à quelques centaines de mètres de l’Alp Hermettji, vers 2400 m d’altitude, et publiée en détail (n° 823-2). «En mai 1959, au cours des travaux de construction d’un tunnel dans le cadre des grands travaux du barrage de la Grande-Dixence, M. Jules Pollinger, Saint-Nicolas, a trouvé une grande hache polie en roche verte, au lieu-dit Garten, à environ 200 m du chemin du col du Théodule, au dessous de l’ancienne moraine frontale du glacier supérieur du Théodule [...]. Elle se trouvait à faible profondeur (0,60-1 m). A faible distance on a observé, à 0,60 m de profondeur, une couche noirâtre riche en gros fragments de bois carbonisés, qui s’étend le long du chemin sur une centaine de m» (Sauter 1978, p. 4). L’absence d’archéologue sur place au moment de la découverte et l’ampleur des travaux effectués alentours depuis lors (percement d’un tunnel, pistes de ski, téléphérique) ne permettent plus de savoir à quoi correspondait cette couche noire. Une prospection sur place nous a permis de constater qu’à cet endroit, les roches métamorphiques affleurantes ne sont pas des éclogites (présentes ailleurs sur le versant) ; la couche noire ne peut donc pas correspondre à un site d’extraction néolithique, hypothèse évoquée par M.R. Sauter. Peut-être s’agit-il d’un paléosol ou d’un d’incendie fossilisé. Les prospections effectuées entre 1984 et 1986 par le PAVAC dans le cirque de Zermatt, qui ont mené à la découverte de l’abri de l’Alp Hermettji, n’ont mis en évidence aucune trace d’exploitation préhistorique (comm. personnelle Ph. Curdy).

La lame de hache est une pièce exceptionnelle, décrite plus haut. Les qualités de l’objet, le lieu de la découverte et l’absence d’autres vestiges néolithiques à proximité immédiate permettent de penser à un dépôt intentionnel lié au passage du col. L’hypothèse d’un abandon accidentel n’est pas à écarter mais le parfait état de l’objet y compris son tranchant plaide pour un acte volontaire.