4.3 Des hiérarchies entre les hommes ?

Sur la seule base de l’étude de l’attitude des hommes envers les haches, il est difficile de reconnaître des inégalités entre les individus autres que des différences de statut liés à des qualités manuelles de travail des roches ou d’habileté à contrôler les circulations de belles pièces. Nous nous heurtons ici aux limites de l’analyse, faute de documents précis en particulier dans les reliefs internes des Alpes. Néanmoins, il nous semble irréfutable que les signes les plus nets de fonctionnements sociaux inégalitaires entre les hommes (et sans doute entre les hommes et les femmes) sont à placer dans les phases ultimes du Néolithique ancien et dans le Néolithique moyen I. Cette proposition rejoint les idées exposées dans d’autres régions à partir des analyses des monuments funéraires. Le gigantisme funéraire manifesté en Bretagne dans le golfe du Morbihan (Boujot et Cassen 1992) et dans la culture de Cerny dans le Bassin parisien (Constantin, Mordant et Simonin 1997) est vu comme un signe fort de la capacité de quelques hommes à mobiliser la force de travail de nombreuses personnes pour la construction de la sépulture d’un seul. De même, les propositions de chronologie des grandes lames de hache à l’échelle ouest-européenne placent celles-ci dans une fonction ostentatoire de relations de pouvoir entre les hommes, par la maîtrise des biens dit de prestige mis en circulation (Pétrequin, Croutsch et Cassen 1997). Toutes ces manifestations sont à placer dans le Néolithique moyen I, c’est-à-dire dans la première moitié du Vème millénaire av. J.-C. pour les premières manifestations, c’est-à-dire, comme le font remarquer les auteurs précités, quelque peu avant ou en tous cas en même temps que les émergences de fortes inégalités sociales liées à la métallurgie du cuivre reconnues dans les Balkans (Lichardus et Lichardus-Itten 1985 ; Collectif 1989).