II. L’émergence de la notion de presse électronique

Le pouvoir d’attraction que représente la communication instantanée et planétaire n’est pas neuf. On peut, avec Pierre Musso39, faire remonter ses inspirations théoriques aux écrits de Saint-Simon et de ses disciples sur la question des réseaux, envisagés comme créateurs d’un nouveau lien universel. On peut aussi, avec Philippe Breton et Serge Proulx, considérer que L’explosion de la communication 40 remonte à l’irruption des premiers outils électroniques. Pour notre part, nous ferons commencer notre histoire de la presse électronique avec la naissance de la télématique et l’introduction de l’ordinateur dans le processus de production du journal.

Un des pionniers en la matière fut certainement le New York Times qui lança les premières études sur le sujet entre 1968 et 1972. Quant à la BBC, elle réfléchit dès la fin des années 60 à la possibilité d’exploiter les canaux non utilisés par le signal de la télévision pour proposer l’information en continu sur les écrans sous la forme de textes. La littérature scientifique se penchera sur les nombreuses expériences de cette époque, mais avec un léger temps de retard par rapport à leur mise en chantier. Ainsi, il faut attendre 1976 pour lire un article scientifique qui analyse l’expérience de teletext Ceefax de la BBC 41 , et 1979 pour qu’un chercheur rende compte de l’intérêt que porte le groupe de presse nord-américain Knight-Ridder à la diffusion électronique d’informations de presse42. À partir des années 80, une profusion de textes utilisent l’expression ’journal électronique’, expression qui peut recouvrir des sens fort différents tels que la diffusion d’informations journalistiques par fax, sur disquette ou CD Rom, sur réseau informatique de communication ou encore l’envoi par satellite de photographies de presse, la consultation d’articles sur bases de données professionnelles...

Compte tenu du sujet de notre étude, nous nous concentrerons sur les ’journaux électroniques’ diffusés sur les réseaux, consultables à tout instant à partir d’un terminal dédié, écran d’ordinateur ou de télévision.

Nous avons distingué trois périodes au sein desquelles nous traiterons en parallèle de la situation internationale et de la situation française. Il nous a semblé en effet, que l’expérience télématique française par son ampleur et ses spécificités, ne pouvait pas s’intégrer complètement, se fondre dans notre schéma général.

Nous ferons aussi quelques rappels concernant le développement de technologies qui joueront, quelques années après leur invention, un rôle important dans cette courte histoire de la presse en ligne.

Notes
39.

MUSSO Pierre, Télécommunications et philosophie des réseaux, La postérité paradoxale de Saint-Simon, PUF, coll. Paris, 1997, 395 p..

40.

Philippe BRETON, Serge PROULX, L’explosion de la communication, La naissance d’une nouvelle idéologie, éd. La découverte/Boréal, Paris/Montréal, 1989, 285 p.

41.

COHEN David, « T.V. : l’information permanente » (traduit de l’anglais), in Communication et langages, n° 32, Retz, Paris, 4è Trim. 1976, p. 85-93

42.

MARVIN Carolyn, « Delivering the news of the future », in Journal of Communication, 1979, vol. 30, n°1, p. 10-20