B. Mettre en forme / consulter des documents sur le web : compétences et environnements

I. Du papier à l’écran, quelques spécificités de la conception de sites Web

De nombreux ouvrages proposent des méthodes pour concevoir des produits multimédia428. De tous ces livres, il ressort un certain nombre de règles de mise en oeuvre parmi lesquelles une phase de réflexion préalable autour des projets, un découpage nécessaire des tâches et leur articulation, compte tenu de la diversité des savoir-faire convoqués... Nous ne souhaitons pas nous engager de façon détaillée sur le terrain des pratiques : dans la presse comme ailleurs, les équipes en charge de l’édition en ligne sont parfois très étoffées (parfois plus d’une centaine de personnes429) et parfois réduite au strict minimum (une ou deux personnes430). Ce type de données influe bien entendu, sur le niveau de polyvalence exigé des personnes en charge de l’édition en ligne. Les compétences sur lesquelles se centrera notre étude concernent plus particulièrement la mise en forme. Nous nous intéresserons essentiellement aux savoir-faire en matière de graphisme complétés de connaissances plus spécifiques à l’informatique. Il est bien évident que le graphiste ou le web-designer ne constitue pas nécessairement le professionnel le plus important, le plus décisionnaire dans le processus d’élaboration d’un site. Cependant, son travail doit répondre de façon satisfaisante à un cahier des charges et il donne une visibilité à des choix d’ordre stratégiques. Il doit intégrer à son projet la question de la navigation, de la multimodalité, des contacts etc... Le graphiste, sans être nécessairement le maître d’oeuvre doit impérativement avoir une vue d’ensemble pour concevoir ensuite ce qui sera plus qu’un simple habillage esthétique des contenus, un véritable système graphique qui donnera une cohérence à un vaste volume de données hétérogènes, manifestant un certain nombre de choix éditoriaux.

Avant de souligner quelques-unes des spécificités de la conception de pages Web, il nous semble important de rappeler que malgré les différences structurelles qui existent entre la feuille de papier et la page Web, la « mise en page » sur ces deux types de supports nécessite de posséder un minimum de connaissances en matière de graphisme. Permettant de développer une véritable rhétorique spatiale, ce que Jean Pain nomme « la parole graphique du journal »431, le travail de mise en page s’appuie sur plusieurs siècles d’histoire, jouant de tous les paramètres à sa disposition : travail sur la typographie, rapports de proportion entre les différents éléments de la page, gestion des « blancs », séparateurs horizontaux et verticaux, disposition et relation entre textes et images, jeu sur les couleurs etc... Ces connaissances qui sont un préalable souhaitable ne doivent cependant pas se transformer en handicap : pour aborder la nouveauté des mises en page-écran, il semble impossible de transposer les savoir-faire liés à l’impression sans remise en question, sans réflexion sur les spécificités du nouveau dispositif, sans acquisition de compétences nouvelles...

Sans entrer dans les détails techniques de la conception de pages Web, nous présenterons simplement quelques-unes des spécificités de la mise en page-écran pour que notre lecture à venir des sites de la presse quotidienne soit peut-être moins naïve, plus avertie des contraintes dispositives... Nous abordons la question des spécificités de la mise en forme des sites Web en dix points, traités succinctement mais choisis parce qu’ils répondent partiellement à des questions que l’on est amené à se poser lors de la consultation.

Notes
428.

Ce travail s’est inspiré de ces livres mais aussi de nos connaissances et relations dans le domaine. Parmi les ouvrages, citons en premier lieu, le texte très clair de SEGUY Françoise, Les produits interactifs et multimédias, Méthodologies, conception, écritures, PUG, Grenoble, 1999, 118 p., celui de Alain Milon et Franck Cormerais, peut-être plus pratique mais aussi plus complexe : CORMERAIS Franck, MILON Alain, Gestion et management de projet multimédia, Du cahier des charges à la commercialisation, L’Harmattan, 1999, 248 p. Il existe de nombreux manuels, de niveaux variés. Ils ont envahi les rayons des bibliothèques et librairies et sont perpétuellement dépassés; c’est pourquoi nous n’en indiquons pas de particulier.

429.

C’est le cas de la plupart des sites de grands quotidiens des Etats-Unis

430.

Pour rester sur le continent Nord-américain, citons le cas du site du journal québécois le Soleil qui fonctionne avec une personne à plein temps et une autre à mi-temps. (d’après un travail d’enquête réalisé par François DEMERS dans le cadre du programme de recherche sur l’information en ligne déjà cité de l’ONTICM.

431.

PAIN Jean-Pierre, « La parole graphique du journal » in Communication et Langages, n°32, Retz, Paris, 4è trim. 1976, p. 95-111