2. Répétition et variation des noms

Lors de la consultation sur écran comme en différé sur une feuille imprimée, on remarque rapidement que les noms sont répétés, parfois associés à des précisions d’ordre stratégique et identitaire. Poursuivant notre étude des noms, il s’agit désormais, de quitter la seule en-tête de la page d’accueil pour élargir notre champ d’investigation à d’autres espaces d’inscription. Ainsi, l’étude porte sur la co-présence des noms sur la page d’accueil avec ceux qui apparaissent sur le cadre de la fenêtre ouverte par le navigateur. Nous avons regardé aussi, du côté des noms inscrits sur les pages imprimées et ceux qui sont mémorisés sous la forme de signets. Initialement, nous avions envisagé d’intégrer à cette réflexion les adresses figurant à l’écran parce qu’elles sont composées à partir du nom-du-journal. À la réflexion, nous avons préféré en faire l’analyse à part parce qu’avec la question des adresses se posent divers problèmes spécifiques, notamment concernant le mode d’écriture qu’elles imposent aux noms, leur construction complexe et par conséquent, les troubles qu’elles sont susceptibles de créer au niveau de l’identification de l’énonciateur des contenus affichés à l’écran.

Avant de procéder à l’analyse, nous présentons ci-après, l’essentiel du tableau qui répertorie les noms sur lesquels porte notre étude. Pour plus de commodité, nous les présentons en respectant leur ordre d’apparition au sein de notre commentaire. Par ailleurs, les points précis auxquels nous faisons référence apparaissent en italique dans le tableau. L’ensemble des données peut être consulté en annexe 12.

En premier lieu, notons rapidement, que ceux des éditeurs qui semblaient vouloir qu’aucune distinction majeure ne puisse être faite entre le site Web et le journal papier, poursuivent dans cette voie, faisant ainsi preuve, tout à la fois de cohérence et de détermination. Les noms sont répétés sans modification, de façon rigoureuse : c’est simple et efficace comme une évidence. Ainsi, USA Today par exemple, est toujours écrit de la même façon, sans aucune variante. Le principe est à peu près identique pour The Times, à l’exception du passage à une écriture en minuscule sur les pages imprimées, le signet et le cadre du navigateur.

Pour de nombreux éditeurs qui avaient fait le choix de composer leur nom de site à partir du nom-du-journal associé à diverses mentions « cyber », le principe de la répétition du nom, sans changement ou presque, semble acquis (voir dans le tableau les exemples du Süddeutsche Zeitung online, de El País ou Le Temps.ch).

Cette étude nous permet aussi de vérifier la validité de notre réflexion concernant les intentions des éditeurs, lorsque le nom-du-journal et le nom du site cohabitent sur la page d’accueil. Nous découvrons donc, que comme notre analyse du traitement graphique des noms de site pouvait le laisser entendre, la mention chicagotribune.com disparaît au profit du nom du journal imprimé. À l’inverse, les noms de sites washingtonpost.com et NZZ Online supplantent le nom-du-journal, comme le laissait supposer l’étude de la forme des logotypes.

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Pour de nombreux éditeurs qui avaient fait le choix de composer leur nom de site à partir du nom-du-journal associé à diverses mentions « cyber », le principe de la répétition du nom, sans changement ou presque, semble acquis (voir dans le tableau les exemples du Süddeutsche Zeitung online, de El País ou Le Temps.ch).

Cette étude nous permet aussi de vérifier la validité de notre réflexion concernant les intentions des éditeurs, lorsque le nom-du-journal et le nom du site cohabitent sur la page d’accueil. Nous découvrons donc, que comme notre analyse du traitement graphique des noms de site pouvait le laisser entendre, la mention chicagotribune.com disparaît au profit du nom du journal imprimé. À l’inverse, les noms de sites washingtonpost.com et NZZ Online supplantent le nom-du-journal, comme le laissait supposer l’étude de la forme des logotypes.

Quelques éditeurs choisissent d’utiliser les multiples espaces d’inscription dont ils disposent pour préciser le nom de la page consultée, imprimée ou mémorisée. Ainsi, ce que nous appelons la page d’accueil prend en réalité différents noms qui témoignent des diverses fonctions qui peuvent lui être assignées. Le terme de « homepage » qui rappelle la notion d’intérieur, de foyer, d’espace essentiel, revient assez régulièrement (voir notamment les sites de Die Welt online et La Stampa web ). Plus proche de l’univers de la presse imprimée, les termes de « frontpage », de « News front » et de « Une » sont fréquemment utilisés témoignant de l’univers de référence des éditeurs de sites de presse...(voir par exemple l’Electronic Telegraph). Certains parlent d’ « accueil » (Le Soir en ligne) ; d’autres en profitent pour souhaiter la bienvenue aux internautes (par exemple le Mercury Center et Libération).

Ce qui est probablement plus important que ces questions de formes de peu d’enjeu, ce sont les multiples erreurs et maladresses qui témoignent d’un manque de maîtrise technique et de rigueur. Citons par exemple le cas d’ABC.es qui n’a pas configuré son fichier correctement ; à l’impression, le nom qui apparaît sur la feuille est « sans titre ». Si l’on se réfère au signet enregistré, le site du journal elkhabar s’appelle « page d’accueil » sans autres précisions... La plupart de ces maladresses sont avant tout la conséquence du manque de rigueur des concepteurs de sites et des éditeurs chargés d’encadrer et valider leur travail. On reste souvent perplexe et on s’interroge devant tant d’approximation et de négligence. Ainsi, pourquoi le site du Miami Herald se présente-t-il sur la page d’accueil comme une « Internet edition » pour s’appeler « online » sur le cadre du navigateur et sur le signet, et changer à nouveau pour le terme de « news » sur la page imprimée ? Comment expliquer que Le Soleil qui reproduit à l’identique le logotype du journal imprimé sur son site Web, décide par la suite de s’appeler LeSoleil.com ? Pourquoi le NewYork Daily News et Le Monde présentent-ils en tête de page d’accueil des constructions de logotypes tellement alambiquées qu’on ne sait plus comment appeler ces sites, pour finir par retrouver la voie de la simplicité sur les espaces périphériques d’inscription du nom ? Nous pourrions prolonger sur plusieurs pages, cette liste de questions tant les exemples de maladresses de ce genre sont nombreux.

Il convient de s’arrêter sur le cas particulier de Fraternité Matin. En effet, en dehors de l’entête de la page d’accueil, le nom du site s’efface au profit d’Africa Online qui se trouve être l’hébergeur principal des sites d’informations en langue française d’Afrique noire. On comprend dès lors toute l’importance de la question des infrastructures et de l’équipement dans certaines régions du monde ; question qui détermine, au final, la production et la diffusion des contenus.

En dernier lieu, on note que de nombreux éditeurs utilisent ces espaces périphériques d’inscription pour expliciter un positionnement, une stratégie. Pour beaucoup, c’est le lieu de rappeler ses attaches territoriales (voir les exemples de Newsday.com et du Progrès en ligne). Certains ajoutent au territoire, un rappel du métier d’origine. Ainsi, sur les espaces à la périphérie de la page d’accueil La Dépêche en ligne préfère se présenter de cette manière : « La Dépêche du Midi – Presse quotidienne régionale : journal d’actualité et d’information ». Le Parisien en ligne en profite même pour faire un peu de publicité se présentant comme : « Le Parisien, 1 er quotidien sur Paris, Ile-de-France et Oise ». Plus surprenant sont les accents modernistes (et déjà dépassés) du site espagnol www.el-mundo.es qui s’annonce comme « diario El Mundo del siglo XXI ».

Parfois, ces façons de présenter le site témoignent de l’importance des ambitions des éditeurs. Il apparaît, de toute évidence, que ces derniers sont tentés par la perspective de développer un site « portail ». C’est clairement indiqué par le « SF Gate » du San Francisco Chronicle. C’est plus longuement exprimé avec le site du Irish Times, qui se présente ainsi : « ireland.com – news and services for the Irish Internet user and users interested in Ireland in general » ! (notons au passage l’usage significatif du singulier pour l’internaute irlandais et du pluriel pour les autres habitants de la planète !). Un peu sur le même modèle Indian Express devient : « Expresseindia.com :Virtually Everything India (News, views and much more) »... Dans ces deux cas, les éditeurs s’adressent à la communauté internationale des internautes, promettant des contenus concernant tout un pays et qui vont bien au-delà de l’information journalistique...

À l’issue de cette étude, il est évident que de nombreux éditeurs ne respectent pas les règles élémentaires, pourtant connues de tous les professionnels de la communication des organisations, en matière d’image de marque. Rigueur, cohérence et répétition demeurent les points forts de toute action qui vise la reconnaissance en toute circonstance, la mémorisation et en fin de compte, la notoriété d’une entreprise, d’une marque et de leur image... Or, les sites de presse, entreprises autonomes, filiales ou simples produits dérivés, se trouvent justement dans la situation d’objets relativement neufs, dont l’image et la notoriété sont à construire. Les éditeurs de journaux en ligne devraient donc, compte tenu des spécificités du dispositif technique énoncées dans la partie précédente de cette recherche, préférer la simplicité aux explications détaillées ; la cohérence et la rigueur aux multiples versions... La petite taille de la surface d’inscription de l’écran informatique et son encombrement par divers signes (sigles, cadres, icônes, etc...) impose une stratégie où l’à-peu-près n’a pas de place. Mais, reconnaissons le, l’exercice n’est pas simple : exprimer dans un nom, à la fois la filiation et l’existence d’un projet singulier...