Le recours aux classiques

Si l’on s’intéresse aux auteurs plutôt cités en début de carrière par Bobin (entre 1985 et 1990) c’est qu’on les considère comme autant d’indices d’une certaine légitimité culturelle favorisant l’accession à une position particulière dans le champ littéraire. Et nous observons que les auteurs et artistes les plus anciens sont les premiers à apparaître dans ses livres, tandis que les auteurs nés au XIX° siècle se découvrent dans les oeuvres plus tardives (après 1992-1993). Au moment de son entrée dans le champ littéraire, Bobin se présente donc ainsi qu’un fervent lecteur de Saint Augustin, Montaigne, La Fontaine, Pascal ou encore Racine, fin connaisseur des oeuvres de Dürer, Rembrandt, ou Goya et mélomane averti écoutant Bach, Haydn, Mozart et Schubert. Que le domaine artistique soit littéraire, musical ou pictural, le goût porte toujours l’écrivain vers des oeuvres dotées d’une indiscutable légitimité. Une pratique fréquente de l’intertextualité, des références constantes aux peintres et musiciens consacrés des XVII° et XVIII° siècles se conjuguent pour offrir l’image d’un écrivain à l’érudition certaine et fortement légitime. Le moment où Bobin publie essentiellement dans de petites maisons d’édition, où il commence également voir ses textes acceptés à la NRF (la revue) correspond ainsi à une pratique abondante de références intertextuelles permettant l’accumulation d’un capital symbolique. Par la suite, lorsque le succès vient puis se confirme (après Le Très-Bas, en 1992, notamment), les auteurs les plus classiques ne sont plus autant mobilisés. Ils apparaissent encore, mais de manière moins significative et au contact d’auteurs du XIX°.