Un sentiment mystique

Dans certains cas, c’est un autre registre discursif qui est mobilisé. Jouant de l’ambivalence des genres littéraires mobilisés dans les textes de Bobin, quelques lecteurs relatent en terme de rencontre avec une « parole habitée » leur lecture. L’émotion relatée s’apparente à un sentiment mystique.011Il reste l’impression d’être « touché » par quelque chose d’origine sacrée.

Enquêtés Citation
Catherine, enseignante (capes) histoire et géographie, (portrait 6) « En tout cas, moi, Bobin, ça fait pas longtemps que je connais, oui, ça fait un an, mais oui, ça a été un choc , de lire Bobin. Oui, c’est difficile de mettre des mots quand on lit Bobin.[...] Et pour moi, c’était une vraie révélation , et puis oui, il se trouve que c’est un auteur qui inspire. »
Denise, 48 ans, secrétaire « Alors moi ça a été, apparemment une rencontre , ça a vraiment été ça. Et c’est vraiment le Très-Bas, ça a été vraiment, une rencontre, un bon, quelque chose de, une rencontre bien-heureuse , ben c’est exactement ça. Tout à fait, et puis vraiment ça a été une révélation [...]. Et ça, je trouve que c’est assez génial. »
Madeleine, libraire (portrait 9) « Alors je vais dire ce qui m’a touchée , ce qui m’a touchée, c’est ce que j’appellerais une parole habitée , à l’évidence. Et comme je suis comme un paquet de gens, on est saturé de mots, sans sens, donc une parole habitée, forcément, on la repère très vite. Parce que la parole c’est la vie, et malheureusement, tout le monde n’a pas ce don-là. [...] Là, y a eu une rencontre. »
Antoine, 30 ans employé de librairie « J’avais lu dans le train Le Très-bas. C’est vrai que j’ai trouvé ça après, très chouette, j’ai aimé son style. C’est-à-dire que ça ne m’a pas fasciné, mais en même temps, ça m’a intéressé. Bon, et puis voilà, ça n’a pas été du tout un souvenir impérissable, je trouvais ça intéressant, mais sans plus. Mais par contre le vrai choc ça a été celui que j’ai lu après, c’est L’Homme qui marche. »

Cette émotion peut d’ailleurs ne pas avoir été éprouvée dès le premier texte lu de Bobin. Ainsi Antoine, employé de librairie et enseignant vacataire en Français langue étrangère qui ne parle de « choc » que pour un court texte de Bobin, lu après plusieurs autres.