1.Des Langues Romanes : Histoire, CLASSIFICATIONS et Particularités

1.1 Introduction

Traditionnellement définies comme langues qui continuent de manière ininterrompue le latin des anciens romains, les langues romanes (désormais LR) représentent, sans doute, l’une des familles linguistiques les plus étudiées. De par la nature gréco-romaine d’une partie significative de la culture européenne, les LR ont fait l’objet d’études dès leur avènement, si l’on attribue une valeur normative aux gloses diverses censées, à l’aube du Moyen Age, remettre en bonne voie le latin tardif et le réconcilier avec une norme depuis longtemps révolue.

Cependant, d’un point de vue purement chronologique, la véritable naissance de la linguistique romane est due à François Raynouard (1761-1836). Il est l’un des auteurs du dictionnaire publié en 1798 par le soin de l’Académie Française où il plaide en faveur de l’étude de l’histoire du français et de son rôle dans la compréhension du lexique contemporain des LR (Jensen, 1999). Il est également l’auteur de la première grammaire d’une LR (le provençal) et de son dictionnaire. Toutefois, c’est surtout avec Bopp (1791-1867), père de la méthode comparative, que la linguistique romane et une approche rigoureuse dans son exploration sont nées. C’est à la même époque, plus précisément en 1863, que le nom de la discipline, Romanische Sprachwissenschaft en allemand, est donné par le provençaliste K.A. Mahn (1802-1886). Enfin, avec Friedrich Diez (1794-1876) et ses travaux réunis en trois volumes et intitulés ’Grammatik des Romanischen Sprachen’ (Grammaire des parlers romans), publiés à Bonn entre 1836-1843, la méthode comparative est pleinement appliquée aux langues issues du latin.

Depuis, l’étude de ces idiomes a connu plusieurs épisodes et maints avatars et controverses. Plusieurs générations de romanistes se sont penchées tour à tour, sur les époques respectives de formation des LR et leurs relations avec les diverses formes de latin tardif ; sur leur typologie et les critères sociolinguistiques et géographiques potentiels de classification ; sur le poids et la nature des influences externes ; sur l’existence et la proximité des LR d’un archétype de la famille latine, pour ne citer que quelques unes des grandes thématiques ayant marqué le dernier siècle d’études romanistes.

Dans ce chapitre, nous nous proposons de survoler brièvement un nombre de problèmes qui sont emblématiques des approches en linguistique romane. Plus précisément, nous allons débuter par rappeler les moments et les problématiques les plus significatives de l’histoire de ces langues. Une discussion sera dédiée à la typologie des LR et aux critères linguistiques ayant servi de repères dans la constitution des regroupements au sein de la famille. Ensuite, nous consacrerons un paragraphe aux particularités structurelles des LR et notamment aux configurations respectives des systèmes vocaliques et consonantiques de quelques-unes des LR qui feront par la suite l’objet d’une attention particulière. Enfin, une nouvelle classification potentielle sera envisagée en clôture de ce chapitre.