2.4 Conclusion

Comme nous l’avons vu, l’IAL représente l’un des principaux défis du monde technologique contemporain et l’étude des capacités perceptives de l’être humain est potentiellement capable de fournir des perspectives de progrès. Plus spécifiquement, les études que nous venons de présenter montrent que cette piste est exploitable et convaincante, et que les stratégies perceptives mises en oeuvre par les humains sont à la fois intéressantes, pour l’application aux machines, et complexes.

Cependant, nous constatons que le domaine perceptif est très vaste et que les études que nous venons de citer n’épuisent nullement la complexité de ces capacités. En effet, les indices discriminants révélés jusqu’à maintenant ont un caractère beaucoup trop global pour proposer un modèle fiable pour un système automatique. Par ailleurs, les langues choisies sont, en général, un regroupement hétéroclite qui privilégie surtout les langues européennes. En outre, il est difficile de comparer les résultats compte tenu du fait que les conditions expérimentales sont très variables.

En ce qui concerne le profil linguistique des sujets, la plupart des études s’intéressent aux auditeurs ayant vécu dans un milieu anglophone. De plus, il nous semble qu’une analyse réelle des stratégies n’a pas encore été faite. Par ailleurs, nous ne sommes toujours pas en mesure de circonscrire les niveaux d’analyse impliqués dans les stratégies perceptives. Enfin, la catégorisation linguistique même n’est que très peu définie, i.e. nous ne savons pas exactement comment les auditeurs naïfs procèdent pour discriminer les langues inconnues lors d’une expérience perceptive.

Par conséquent, nous nous proposons de répondre aux questions suivantes :

  1. Que se passe-t-il quand les auditeurs doivent discriminer des langues appartenant à la même famille linguistique ?

  2. Est-ce que ce type de tâche de discrimination est plus difficile ? Dans ces conditions, quels seraient les indices et les stratégies discriminatives que les sujets doivent utiliser ?

  3. Que se passe-t-il quand les auditeurs sont issus de populations dont la langue maternelle est différente? Utiliseront-ils des indices discriminants différents? Et, plus précisément, y aura-t-il une différence significative par rapport aux résultats d’une population dont la langue native n’est pas incluse parmi les échantillons de test ?

  4. Quel est le rôle de la langue maternelle dans le choix perceptif des critères discriminants ?

  5. Quel type de démarche cognitive adoptent les sujets humains lors d’une tâche de discrimination linguistique ?

  6. Existe-t-il un niveau linguistique privilégié dans le choix des indices, c’est-à-dire, niveau segmental ou supra-segmental ? Et, s’il est possible de déterminer ce niveau privilégié, arriverons-nous à identifier un indice fondamental et prioritaire dans les stratégies de nos sujets ?