3.4.2.1 Les paires de langues de type AA

Les items de type ’même langue’ ont suscité un comportement perceptif comparable à celui de la population précédente.

Comme pour l’expérience effectuée auprès de la population française, la langue maternelle a été identifiée à 100%, tandis que les autres paires linguistiques ont donné des scores inférieurs, comme le montre graphe ci-dessous.

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Figure 20 : Scores de discrimination correcte obtenus par les sujets roumains pour les stimuli de type ’même langue’ (AA).

Le roumain est significativement mieux identifié que toute autre langue romane, à savoir l’italien qui a obtenu 87,5% de bonnes réponses (t=2.517, p=0.0210), l’espagnol dont le score de bonnes réponses a été de 77,5% (t=3.943, p=0.0009) et le français avec 85% de réussite (t=2.854, p=0.0102). La différence du roumain par rapport au portugais, qui a obtenu 62,5% de réponses correctes, est également statistiquement significative (t=3.943, p=0.0009). Néanmoins, nous avons pu voir dans le paragraphe antérieur que le taux de réussite du portugais était proche du hasard. Cela signifie que ce résultat doit être considéré avec prudence.

Les pourcentages de réussite pour les trois langues romanes, à l’exception du portugais, n’attestent aucune différence significative. En revanche, le portugais a été significativement moins bien reconnu que l’italien (t=2.517, p=0.0210) et le français (t=2.269, p=0.0351). Nous pouvons ainsi remarquer que les résultats pour la paire Français/Français sont très proches de ceux de la paire Italien/Italien. Cette dernière langue doit sa connaissance à la proximité sonore avec la langue maternelle des sujets, proximité ressentie et avouée par tous les sujets roumains. Quant à l’espagnol, il ne s’agit pas d’une langue largement étudiée pendant la scolarité des enfants roumains, mais elle est en train de gagner du terrain grâce aux médias, comme nous l’avons précisé en début de cette section. La place la plus faible dans la hiérarchie des connaissances linguistiques chez les Roumains est occupée par le portugais, langue qu’on entend très peu en Roumanie. Cela s’explique par la très faible tradition de l’enseignement de cette langue à l’école. Les médias offrent seulement un faible aperçu du portugais, par le biais des fictions télévisées importées notamment de l’Amérique du Sud. De ce fait, les sujets roumains sont familiarisés surtout avec le portugais brésilien.

Cela va dans le sens de l’observation faite en ouverture de cette section, à savoir que la présence du roumain a déterminé l’adoption des deux principaux types de jugements perceptifs dépendants des critères [+/- langue maternelle] et [+/- connu] des langues entendues. Bien que le premier critère soit très important, celui lié à la familiarité doit également être pris en compte. En effet, les Roumains ont traité de manière différente les langues plutôt connues comme le français, l’espagnol et l’italien et les langues moins connues comme le portugais. Ces deux comportements permettent d’aboutir à la même division de base que celle des sujets français, à savoir la division entre la classe de langues connues (le français, l’espagnol et l’italien) et la classe des langues moins biens connues (dans ce cas, une seule, le portugais). On peut donc dire que les deux populations française et roumaine ont adopté les mêmes stratégies perceptives pour traiter les stimuli de type ’même langue’.