3.4.4.4.3 Comparaison des RT avec le taux de réussite en discrimination

Afin de mettre en relation l’effet d’apprentissage tel qu’il est attesté par les RT et l’apprentissage effectif mis en évidence par la réussite en discrimination dans les deux parties du test, nous avons également comparé les scores en discrimination avec les RT. Cette comparaison a été effectuée pour chaque partie du test. Ainsi, elle a consisté en la comparaison des moyennes obtenues en discrimination pour chaque type de stimulus AA et AB, avec les moyennes en latence des réponses. Nous avons montré dans la méthodologie générale de l’expérience (section 3.2.) que le test comprend deux stimuli de type AA et quatre stimuli de type AB par combinaison. Par conséquent, la comparaison que nous effectuons ici prend en considération les valeurs moyennes par stimulus de type AA et par deux stimuli de type AB, pour chaque partie de l’expérience. Nous regardons donc le rapport entre les taux de discrimination obtenus pour un stimulus donné dans les deux parties du test et son traitement temporel.

Nous commenterons les effets statistiquement significatifs. En règle générale, cet effet s’est avéré d’une faible intensité. Cela signifie que la réussite dans la discrimination des langues ne s’est pas améliorée dans la seconde partie du test. Les différences statistiquement significatives concernent les paires de langues suivantes : Roumain/Roumain qui a été mieux traitée dans la seconde partie du test (t=2.666, p=0.0153), Roumain/Italien qui a également été mieux traitée dans la seconde partie du test (t=3.040, p=0.0067) et Espagnol/Italien, qui a été mieux discriminée dans la première partie du test (t=3.907, p=0.0009). En ce qui concerne les RT, la seule différence significative (i.e., le RT de la seconde partie du test est plus important que le RT de la première partie) concerne la paire Portugais/Italien (t=2.106, p=0.0487).

Les Américains semblent donc avoir traité mieux certaines paires linguistiques dans la seconde partie que dans la première partie du test. Ainsi, en ce qui concerne la paire Roumain/Roumain, ils ont progressivement capté des particularités linguistiques spécifiques du roumain, ce qui entraîne un score de discrimination correcte significativement meilleur dans la seconde partie de l’expérience que dans la première (t=2.666, p=0.0153). Mais, l’effet est contradictoire, étant donné que dans une paire de type AB comme la paire Roumain/Italien, le roumain a été mieux discriminé de l’italien en première partie qu’en seconde partie du test (t=3.040, p=0.0067) ! Cela signifie que des particularités linguistiques de cette langue ont été mises à profit dans des stimuli de type AA, tandis que dans les stimuli de type AB cette démarche a été plus difficile. Cependant, aucun des deux effets n’est accompagné d’un effet temporel : les différences des RT dans la première et dans la deuxième partie de l’expérience ne sont pas significatives pour les deux types de stimuli (i.e., Roumain/Roumain et Roumain/Italien).

Un cas qui nous semble intéressant concerne la discrimination de l’espagnol par rapport à l’italien, qui a été meilleure au fur et à mesure du test. Ainsi, l’espagnol a été mieux discriminé de l’italien dans la seconde partie du test et cette différence est statistiquement significative (t=3.907, p=0.0009). Toutefois, nous avons pu signaler dans la section précédente que la différence des latences des réponses de la première et de la seconde partie du test n’est pas statistiquement significative. Cela signifie que l’amélioration en discrimination n’est pas accompagnée d’une réduction dans les RT.

Les résultats que nous venons de discuter montrent qu’il existe une relation plutôt limitée entre l’apprentissage effectif durant le test qui entraîne une discrimination progressivement meilleure et les RT. En effet, les stimuli mieux traités en termes de discrimination dans la seconde partie de l’expérience ne sont pas systématiquement les mêmes que ceux qui ont nécessité un traitement temporel conséquent. Au contraire, la seule différence statistiquement significative en ce qui concerne les RT montre que le RT de la seconde partie a été plus important (i.e., le cas de la paire Portugais/Italien). Nous estimons que ces effets sont liés aux plusieurs facteurs comme la présence de langues familières et la difficulté d’apprentissage des particularités de certaines langues. Enfin, un dernier aspect que les RT mettent en évidence est lié à une grande variabilité inter-individuelle. Cette variabilité est montrée par les écarts types très importants de la grande majorité des stimuli.

De plus, le traitement du stimulus Espagnol/Italien pose un problème d’interprétation. Nous avons pu constater un effet d’apprentissage qui n’est pas accompagné d’un effet temporel.

Par conséquent, dans l’interprétation des effets en RT dépendent des trois facteurs suivants :

  1. De l’habituation au test, ce qui explique des RT plus importants pour les trois stimuli présentés en début du test, à savoir Italien/Italien, Espagnol/Portugais et Roumain/Italien, que pour le reste des stimuli.

  2. De la familiarité ou de la non-familiarité avec les langues romanes.

  3. Des traits linguistiques communs partagés par les langues de la paire.