1.2.1.5. Localisation fonctionnelle des activités de stockage et de répétition de la boucle phonologique.

L’analyse des fonctions cognitives à partir de l’étude des lésions cérébrales montre que dans tous les cas de déficits de la MDT, le cortex pariétal gauche est impliqué. Les études en imagerie fonctionnelle avec des sujets non lésés montrent que le cortex pariétal gauche est actif lorsque le stock phonologique est mobilisé (Becker, MacAndrew et Fiez, 1999).

Par ailleurs, l’hypothèse d’une boucle phonologique possédant deux composantes affectées au stockage et à l’entretien de l’information verbale a reçu des validations supplémentaires grâce aux études en neuroimagerie qui abordent la MDT d’un point de vue neurologique. Ces études visent à spécifier quelles sont les régions impliquées au cours de différentes activités de MDT et à déterminer quelles fonctions cognitives sont médiatisées par ces régions cérébrales. Paulesu, Frith et Frackowiak (1993) ont établit un corrélat neuronal avec les deux composantes de stockage et de répétition de la boucle phonologique en utilisant une technique d’imagerie fonctionnelle. Ils ont comparé l’activité neuronale associée à un jugement de rimes de lettres présentées visuellement avec celle associée au rappel de listes d’items présentés visuellement. La première activité impliquait principalement le système de répétition sub-vocale alors que la seconde engageait à la fois le stock phonologique et le système de répétition sub-vocale. Selon que le matériel présenté correspondait à des lettres anglaises ou coréennes, le codage phonologique était ou non impliqué. La condition de présentation d’items coréens constituait pour les deux tâches la condition contrôle à partir de laquelle les autres activités cognitives ont été comparées. Ces comparaisons ont révélé que le stock phonologique était localisé au niveau du gyrus supramarginal gauche alors que le système de répétition sub-vocale était associé à l’activation de l’aire de Broca.

Dans une série d’expériences utilisant une tâche de reconnaissance de lettres et une tâche n-back consistant à décider si un item cible contenu dans une liste est identique à celui présenté n items avant, Awh, Jonides, Smith, Shumacher, Koeppe et Katz (1996) ont également mis en évidence, à l’aide de la technique T.E.P., l’existence de deux régions distinctes impliquées dans l’activité de stockage et de répétition sub-vocale. Leurs résultats montrent que le stockage implique les régions pariétales postérieures alors que la répétition articulatoire implique les régions pariétales antérieures (aire de Broca, notamment).

L’étude de Smith et Jonides (1997) confirme ces données en montrant une nouvelle fois l’existence d’activations séparées des circuits pariétal postérieur et antérieur, selon que l’activité en MDT implique le stockage unique ou la répétition sub-vocale.

D’autres contributions neuropsychologiques ont permis de spécifier le rôle des différentes composantes de la boucle phonologique. Par exemple, Belleville, Peretz et Arguin, (1992) ont pu mettre en évidence l’existence d’un déficit spécifique de la répétition articulatoire chez un patient cérébro-lésé dont les performances en rappel immédiat montraient une réduction de l’empan mnésique et une absence des effets de longueur du mot, de similarité phonologique et de suppression articulatoire. Associées à la découverte d’un déficit sélectif du système de stockage phonologique (Vallar et Baddeley, 1984, cités dans Belleville et coll., 1992), ces données constituent un exemple de double dissociation entre un système de répétition articulatoire et un système de stockage phonologique, et offrent un argument solide en faveur du modèle d’architecture fonctionnelle de la boucle phonologique proposée par Baddeley (1986).