5.2.2.1. Le paradigme expérimental

Pour cette tâche, similaire à celle de l’expérience précédente, 40 listes de six items ont été construites (Annexe 14). La consonne V a été exclue car elle n’appartenait à aucun segment alphabétique. Pour étudier une large part du décours temporel de la restitution orale et contrôler le nombre de déclassements des items dans les listes, une charge mnésique unique de six consonnes a été présentée. Parmi les 40 listes, huit ont été proposées en entraînement et 32 ont été réparties dans la phase test en quatre blocs d’essais. Dans chaque bloc d’essais, huit listes de six consonnes étaient présentées aléatoirement. Parmi les huit listes, la moitié devaient être rappelée dans l’ordre alphabétique et l’autre moitié, dans l’ordre sériel.

Pour chaque liste, le degré de déclassement des lettres et l’étendue de leur distribution alphabétique ont été manipulés. Pour contrôler le degré de déclassement des items, deux catégories de listes ont été élaborées. La première comportait des listes dans lesquelles deux consonnes au plus devaient changer de position si la liste faisait l’objet d’une réorganisation alphabétique (ex : BGCDFH). Dans la seconde catégorie, cinq items au moins devaient être déplacés pour parvenir à l’ordre alphabétique (ex : TQBRDC).

Les contraintes d’étendue de la distribution alphabétique reposaient sur une nouvelle règle de construction intégrant la structure ordonnée de l’alphabet. Cette règle permettait de manipuler les parties de l’alphabet à partir desquelles les listes étaient construites. Nous avons défini quatre segments qui correspondaient chacun à une suite de consonnes : (BCD) ; (FGH) ; (KLMN) et (PQRST). Selon la provenance des items constitutifs des listes, nous supposions qu’une part plus ou moins importante de l’alphabet stocké en MLT serait réactivée pour la réorganisation alphabétique. Les listes comprenant un petit nombre de segments de l’alphabet correspondaient aux listes possédant une étendue restreinte , alors que les listes comprenant un grand nombre de segments, possédaient une étendue large. La subdivision des consonnes en quatre segments a donc permis de définir des étendues de distribution alphabétique différentes. Les listes ayant une étendue restreinte comportaient des consonnes appartenant à deux segments différents. Les listes ayant une étendue large comprenaient des consonnes appartenant à quatre segments différents.

A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V.

Seg.1 Seg.2 Seg.3 Seg.4

L’hypothèse sous-jacente aux segments repose sur les notions de représentation continue (Dehaene, 1997) et de discrimination (Murdock, 1960) des items au sein d’une dimension, en l’occurrence alphabétique. Elle stipule que lorsque le nombre de segments activés est faible, le risque de confusion entre les items est plus important, car les listes de consonnes alphabétiquement proches (listes à deux segments, ex : FKGHJM) sont plus difficilement discriminées que les listes de quatre segments (ex : CSFKNT), où les items alphabétiquement éloignés sont mieux distingués sur la dimension alphabétique. L’étendue de la distribution alphabétique déterminerait ainsi certaines propriétés responsables du caractère distinctif des items, lequel constitue un indice de récupération important.

Le mode de présentation des items est identique à l’expérience précédente. En revanche, des délais différents pour les latences au rappel sériel et alphabétique sont imposés pour inciter les participants à restituer très vite le premier item, les obligeant à réaliser la planification de l’ordre pendant la restitution orale. Cette contrainte vise à obtenir un maximum d’indices temporels sur les intervalles de récupération des items. Au rappel sériel, un délai de 1500 ms est prévu alors qu’au rappel alphabétique il est abaissé à 2500 ms, car les données de l’expérience précédente montrent qu’il faut en moyenne 2700 ms pour restituer le premier item. Ces délais sont restrictifs pour imposer une réorganisation alphabétique pendant la récupération orale, et non avant.