2.3.1. La ’behavioral economics’ comme zone d’interaction entre les différentes sciences du comportement

La première forme de comportementalisme syncrétique apparaît avec la naissance du Journal of Behavioral Economics. Lors de sa création en 1972, le journal ambitionnait d’établir des ponts entre les différentes ’behavioral sciences’. Fondateur de la revue, Richard Hattwick pouvait nous confirmer : ’‘The JBE was established with the objective of providing a place for articles that used other social sciences to enrich economic analysis and that used economics to enrich the analysis of problems of other social sciences’’.¹⁵⁵ Cette ’behavioral economics’ instaure donc une zone d’interaction entre les différentes sciences du comportement, une zone de dialogue interdisciplinaire visant a susciter des fertilisations croisées. Ainsi conçue, la ’behavioral economics’ englobe bien, notamment, les travaux qui appartiennent au courant comportementaliste et ceux qui instaurent un comportementalisme beckerien.

Dans le contexte de l’époque, la question de l’impérialisme de la discipline économique n’était pas encore d’actualité. Aussi Hattwick, pourtant partisan affiché d’un réel dialogue inter-disciplinaire, était-il tout autant attentif aux travaux de Becker qu’à ceux de Katona. Des contradictions n’ont cependant pas tardé à apparaître, ramenant la philosophie éditoriale de la revue vers des contributions très majoritairement compatibles avec l’esprit qui anime le seul courant comportementaliste. Richard Hattwick remarque ainsi : ’The original policy of the JBE was to consider as appropriate manuscripts using the Becker approach. (...) However, I moved more and more to excluding such articles on the grounds that they would really be more appropriate elsewhere’.¹⁵⁶ On trouvera néanmoins, aujourd’hui encore, des partisans d’une caractérisation de la ’behavioral economics’ en phase avec les orientations originelles du Journal of Behavioral Economics (cf. tout particulièrement les positions de Grossbard-Schechman [1991]).