1.2.2. Les procédures non-compensatoires

Au rang des procédures non-compensatoires, la ’règle de conjonction’ (’conjunctive rule’) est couramment évoquée. Le décideur qui fonde ses choix sur la base de cette règle prédétermine une valeur-seuil pour chacune des dimensions-critère qu’il envisage. Ne seront retenues que les seules options dont la valeur, le long des différentes dimensions-critère, excède la valeur-seuil en vigueur. De la sorte, une option qui ne satisferait pas aux exigences inhérentes au respect d’une valeur-seuil particulière ne pourra être retenue et, ce, quelles que soient par ailleurs les valeurs qui caractériseraient cette option au regard des autres dimensions-critère. C’est là, en fait, la spécificité même d’une procédure non-compensatoire.189 On le comprend aisément, la règle de conjonction ne saurait généralement garantir la sélection d’une seule et unique option. Afin d’échapper à cette indétermination (pour autant que cela soit nécessaire), il conviendra donc d’adjoindre quelque ingrédient à la présentation de cette dernière règle, telle que rapportée à l’instant. Une possibilité parmi d’autres conduit à avancer que le décideur retient la première option qui respecte l’ensemble des valeurs-seuils prédéterminées. On rejoint alors le modèle simonien du satisficing, sur lequel nous reviendrons de façon détaillée à l’occasion de notre chapitre 5. Il est aussi possible de concevoir que la règle de conjonction permet au décideur de faire un tri préalable à l’application d’une autre procédure évaluative, compensatoire ou non.

A côté de la règle de conjonction, la procédure lexicographique permet également d’illustrer la catégorie des procédures non-compensatoires. Le décideur qui fait appel à une telle procédure est censé, afin d’évaluer les options en présence, hiérarchiser les différentes dimensions-critère considérées. Contrairement à ce qui prévaut, toutefois, dans le cadre d’une procédure de sommation linéaire pondérée, il n’est pas nécessaire que cette hiérarchisation revête une expression cardinale. Il suffit que le décideur soit en mesure d’identifier une dimension-critère prioritaire. Est retenue l’option dont la valeur, le long de cette dimension, s’avère la plus élevée. Si deux ou plusieurs options ne peuvent être, sur cette base, clairement départagées190, elles se verront alors comparées au regard de la dimension-critère qui occupe la seconde position dans l’ordre des priorités du décideur (etc.). Le processus prend fin lorsqu’une option donnée demeure seule en lice.

Notes
189.

A titre d’exemple, un demandeur d’emploi pourra refuser toutes les offres qui ne respecteraient pas un critère de localisation géographique plus ou moins bien déterminé.

190.

Il est supposé, communément, qu’une option n’est jugée supérieure, le long d’une dimension-critère donnée, que si l’écart de valeur qui la sépare de sa rivale immédiate est suffisamment marqué.