CHAPITRE 4 : Psychologie des jugements prédictifs, ou les limites des aptitudes cognitives du décideur

Introduction

Ce quatrième chapitre vient faire état des limites qui frappent les aptitudes cognitives du décideur, en tant que système de traitement de l’information. Il est composé de deux sections principales.

Dans le cadre d’une première section, nous montrons que l’individu entretient communément un rapport biaisé à l’information. Pour ce faire, un important substrat empirique, accumulé par les psychologues et/ou les comportementalistes, se voit mobilisé. Nous discutons les biais ainsi consignés dans le contexte général, d’abord, de la dynamique des connaissances, des représentations, des croyances ou des probabilités que se forge le sujet. Il en ressort l’image d’un individu davantage soucieux de préserver la cohérence ou l’intégrité, que de garantir la vérité ou la pertinence, de ses diverses ’constructions cognitives’ ; une image que résume assez bien la théorie de la dissonance cognitive. On discute, ensuite, la notion de biais en nous attachant plus particulièrement à la dynamique des probabilités. C’est là l’occasion de présenter les réflexions consacrées par Kahneman et Tversky à ces diverses procédures heuristiques d’où découlent, souvent, les estimations probabilistes du décideur. Nous rencontrons, ici aussi, différents biais qui tiennent à ce que les heuristiques de jugement sont fondamentalement des ’raccourcis cognitifs’.

Dans le cadre d’une seconde section, nous illustrons d’abord la stérilité des arguments déployés par le théoricien standard désireux de minimiser la portée écologique des ’biais cognitifs’ rapportés.273 On s’attache ainsi à montrer l’étendue limitée des vertus correctrices de l’apprentissage. Pour le comportementaliste, il apparaît plus approprié de se joindre au psychologue afin de donner un portrait fidèle des aptitudes du décideur, en tant que système de traitement de l’information. De même lui semble-t-il opportun, plutôt que de nier l’existence des biais, d’apprécier leur impact sur les comportements économiques des agents. C’est ainsi que l’on présente quelques applications économiques de la théorie de la dissonance cognitive, avant de se proposer d’examiner certains travaux par où les auteurs comportementalistes s’attachent à démontrer l’incidence des biais inhérents aux jugements probabilistes sur l’opération des marchés financiers.

Notes
273.

C’est-à-dire : leur impact hors du laboratoire.