CHAPITRE 5 : La thèse du satisficing, ou les limites de la flexibilité motivationnelle

Introduction

Le présent chapitre vient constater, au travers d’une discussion de la thèse comportementaliste du satisficing, le caractère limité de la flexibilité motivationnelle de l’acteur. Il se compose de trois sections.

Dans le cadre d’une première section, nous présentons la thèse comportementaliste du satisficing. Telle que nous l’entendons, celle-ci n’est pas l’apanage des réflexions de Simon. Sans pour autant minorer les apports de l’auteur, on se propose donc d’établir la pertinence de cette formulation générique de la thèse du satisficing, que l’on appelle de nos voeux.

Dans le cadre d’une seconde section, nous montrons que la thèse du satisficing se voit affirmée au titre des défaillances qui frapperaient, tantôt les aptitudes cognitives du décideur, tantôt ses aptitudes motivationnelles. On présente successivement ces orientations, nullement exclusive l’une de l’autre. La justification cognitive, basée sur la psychologie de l’attention ou du traitement de l’information, nous conduit au coeur de la théorie simonienne de la rationalité limitée. La justification motivationnelle, axée sur les faiblesses de la volonté, nous amène à envisager les positions de l’’école Carnegie’ et, avec plus d’insistance, la théorie leibensteinienne de la rationalité sélective.

Enfin, une troisième section aborde la question de savoir s’il est possible de donner un fondement rationnel à la thèse du satisficing. Nous présentons quelques modèles ’pseudo-comportementalistes’ qui, forts de l’inclusion des coûts inhérents à l’activité de décision, se proposent d’appuyer cette perspective. On en vient alors à examiner les contre-arguments, empiriques et logiques, qu’adressent les comportementalistes authentiques à l’endroit de ces stratégies qui réduisent la thèse du satisficing à un simple effet d’optique. A défaut d’être rationnelle, nous concluons que la quête, souvent nécessaire, d’une réponse satisfaisante plutôt qu’optimale, n’en est pas moins une orientation adaptative raisonnable pour l’acteur doté d’aptitudes limitées.