2.2.1. Environnement socio-économique du Burundi

2.2.1.1 Le secteur privé au Burundi

On doit noter qu’à l’instar des autres pays africains, le Burundi a pendant longtemps négligé le développement du secteur privé dans sa politique industrielle. Les différents plans quinquennaux de développement économique et social ne se sont attachés en matière d’industrie, qu’à développer des entreprises publiques laissant de côté tout ce qui pouvait permettre au secteur des P.M.E. d’émerger. L’appartenance au monde des affaires était dans la société d’après l’indépendance synonyme de malhonnêteté. Les burundais instruits préféraient ainsi une carrière dans l’administration publique plus prestigieuse qui les mettait à l’abri des aléas et qui leur paraissaient prometteuse. Le secteur privé et principalement le commerce était aux mains des étrangers et plus particulièrement des grecs, des arabes et des asiatiques.

Ces facteurs expliquent pourquoi la part du secteur formel manufacturier est très marginale dans l’économie burundaise. En 1990, il occupait uniquement 20.000 salariés soit 1% de la population en âge de travailler. Dans le même temps seuls 12.700 d’entre eux étaient enregistrés à l’Institut National de Sécurité Sociale. La valeur ajoutée produite par le secteur étant de 5,5% du Produit National Brut et quand on ajoute le secteur informel, le secteur manufacturier occupe 10,1% du PNB. Quoi qu’il en soit dans l’ensemble des P.M.E. voire parfois de très petites entreprises, les entreprises locales occupent des positions dominantes au Burundi. Un bref panorama de la situation économique du Burundi fait apparaître beaucoup de rigidités structurelles qui freinent encore le développement économique et social à savoir:

  • une population de plus de 6 millions d’habitants avec un accroissement démographique de 3% l’an et une forte densité de près de 200 habitants au Km² en moyenne,

  • une économie largement dépendante de l’agriculture avec une forte contribution de 50% au PIB, de 90% à l’emploi et de 90% aux recettes d’exportation,

  • un secteur secondaire qui ne contribue qu’à hauteur de 14% du PIB et à 6% des recettes d’exportation,

  • l’état pèse encore lourd sur l’activité économique et il est pourvoyeur de plus de la moitié des emplois dans le secteur moderne,

  • le pays est enclavé et les ressources minières existantes sont faiblement exploitées.

Il faut cependant signaler que du fait des politiques gouvernementales le secteur manufacturier a cru sur la période 1970 - 1991 à un taux moyen de 4,6% dépassant le taux de croissance du PNB qui était évalué à 3,5% sur la période considérée. Ce taux n’était cependant que de 3,3% sur la période de 1988 – 1991 alors que celui du PNB augmentait de 3,7%.

Il faut cependant noter que le développement du secteur privé est fortement handicapé par le faible pouvoir d’achat de la population. Cette situation risque de perdurer car l’agriculture qui reste la source essentielle de revenu pour plus de 90 % des burundais ne semble pas décoller alors qu’elle devait être un élément d’entraînement de toute la vie économique. Pour rendre compte de la faiblesse du niveau de revenu des burundais, on estime qu’environ 58,7% en 1997 contre 34,7% seulement en 1992 de la population totale vivaient près ou en dessous du seuil de pauvreté. Devant une telle situation, il devient difficilement concevable d’imaginer que l’industrie burundaise puisse bénéficier des économies d’échelle en raison du seuil minimal que doit atteindre la production.

On notera que des efforts importants en vue de redresser la situation économique ont été faits notamment dans le domaine des entreprises publiques. Cependant, on a surtout enregistré des situations d’entreprises très peu rentables du fait des objectifs qui ne leur sont pas clairement définis, d’un manque d’études préalables rigoureuses avant la création de certaines de ces entreprises et d’une gestion déficiente avec des cadres souvent peu formés aux méthodes modernes de management.

Une autre contrainte à laquelle doivent faire face les entreprises burundaises est le coût élevé de certains facteurs de production tel que l’électricité et les autres services utilisés qui diminuent leur compétitivité. A cet élément, il faut ajouter le phénomène généralisé de fraude d’une ampleur d’autant plus important que les détournements du système fiscal et douanier assurent en quelque sorte un fonds de commerce à beaucoup d’opérateurs économiques et constituent une concurrence déloyale sur le marché national et une source de démotivation importante dans les entreprises.

Il est également important de noter que la faible intégration industrielle de l’économie burundaise constitue un facteur explicatif important de la faiblesse de la compétitivité des entreprises. Cette situation est mise en évidence par l’importance de la part importée de matières premières.