L’observation des pratiques de gestion nous permet de constater que le développement des entreprises et des organisations est miné par des «routines défensives»324 qui empêchent les acteurs de l’entreprise d’apprendre car, on n’apprend vraiment que chaque fois qu’on parvient à « détecter et à corriger une erreur »325. Or dans les P.M.E., on remarque que ces routines sont particulièrement présentes car la place centrale qu’occupe le dirigeant dans la prise de décision peut pérenniser les routines défensives du fait notamment des collaborateurs soucieux avant tout de ne pas violer les lignes de conduite et pratiques officielles et surtout de témoigner déférence au dirigeant.
Le succès d’une opération de changement repose sur une philosophie précise qu’il faut savoir respecter. Trois facteurs interviennent à parts égales dans l’approche326:
l’implication de l’équipe de direction, en particulier par l’intégration du projet dans la stratégie générale de l’entreprise,
la participation des collaborateurs, tout en sachant qu’ils seront davantage actifs s’ils trouvent un intérêt dans le changement proposé,
l’accompagnement du projet par l’information et par la formation des futurs acteurs.
Cependant il est rare que ces exigences soient toutes respectées du fait de certaines attitudes développées au sein des entreprises. Ainsi les actions de changement sont exposées à trois grandes erreurs que sont les suivantes327:
le changement est décrété sans qu’on ait aucune idée des problèmes qu’il posera,
on oublie que les moyens humains ne se plient pas aux objectifs;
qu’il existe des décalages de perceptions, de vision des menaces et opportunités qui rendent le changement impossible.
Le succès d’une action de changement dépendra donc de la façon d’adapter l’organisation à ses acteurs internes et, de la prise en compte des problèmes que pose tout changement. Ainsi face aux défis actuels de l’environnement, les membres de la direction devraient « accepter de remettre en cause la conception de leur organisation et du pouvoir, savoir passer de la dynamique au réseau, du fonctionnement par territoire à un fonctionnement transversal, des luttes de pouvoir au traitement pragmatique des problèmes »328. Pour cela, ils devraient considérer les trois maîtres mots: « direction, confiance et espoir »329 comme étant les principaux éléments pouvant permettre de surmonter les inévitables résistances au changement.
Pour pouvoir vaincre ces résistances au changement, il faudra que les P.M.E. essaient de devenir des organisations apprenantes permettant de « faire apparaître une synergie entre le développement d’une entreprise et celui des personnes qui en font partie »330. En effet, la prise en compte des compétences des acteurs est très important car « la performance de l’entreprise dépend moins de la qualité des produits que de la capacité d’exploiter le capital compétences, l’important étant de mobiliser les expertises plus rapidement que les concurrents »331. Au niveau de la direction de la P.M.E., il serait important de promouvoir un apprentissage en équipe pour que les membres de l’équipe de direction puissent apprendre les uns des autres , notamment par la pratique de l’échange . Ce travail en équipe permettrait une mise en oeuvre plus aisée des solutions préconisées pour résoudre les problèmes de l’organisation.
Pour mieux réussir le changement, les actions de changement devront être comprises comme un processus d’apprentissage organisationnel. Trois éléments pourraient guider ce processus:
‘«blabla’un cadre stratégique commun qui communique la stratégie globale et montre à chaque acteur en quoi ses activités contribuent à sa réalisation,
un processus de retour d’information sur les effets de la stratégie qui permette de tester les hypothèses sur les relations de cause à effet entre les objectifs et les initiatives stratégiques,
un processus de résolution de problèmes qui analyse et tire les enseignements des données sur la performance puis adapte la stratégie en fonction de l’évolution des conditions et des problèmes»332.
Routines défensive: Chris ARGYRIS appelle routine défensive organisationnelle toute politique ou action qui évite aux individus, aux groupes, aux intergroupes et aux organisations de connaître l’embarras ou la menance et qui les empêche en même temps d’en identifier et d’en atténuer les causes
C. Argyris avec les contributions de B. Moingeon et B. Ramanantsoa, « Savoir pour agir. Surmonter les obstacles à l’apprentissage organisationnel. », p 66, InterEdition, 1995 , 330 pages
Y. Salaün, « Pilotage et management d’une unité: l’analyse des menaces et opportunités », op cit, p 91
G. Rolland, H. Serieyx, « Colère à deux voies . Quand les organisations laminent les talents », op cit, p 107 - 109
Idem, p109
M. Crozier H. Serieyx, « Management panique à l’enreprise du 21è Siècle, op cit, p 113
Manfred Mack, « L’organisation apprenante comme système de transformation des connaissances en valeur », p 43, Revue Française de Gestion , n°105, pp 43-48, Septembre - Octobre 1995
E. Sutter, « Maîtriser l’information pour garantir lla qualité », AFNOR, 1993,133 pages
Robert Kaplan, David P. Norton, « Le tableau de bord prospectif. Pilotage stratégique : les 4 axes du succès, op cit, p 255