Si dans les P.M.E. burundaises, l’impossibilité de mettre en place une politique de développement de long terme de leur entreprise est avérée, leurs dirigeants doivent néanmoins pouvoir fixer les objectifs autour desquels ils organisent l’activité de l’entreprise pour garantir un niveau suffisant de compétitivité. Il est important qu’ils inscrivent leur action dans la logique de P. Drucker448 qui disait que les objectifs sont une direction que l’on prend, un engagement que l’on choisit, ils ne déterminent pas l’avenir, mais permettent de canaliser les énergies pour le façonner.
Dans cette optique, nous avons sur base des résultats du diagnostic socio-économique fourni notre assistance méthodologique pour aider les dirigeants et leurs collaborateurs à élaborer un projet d’amélioration de leurs entreprises. Cette mise en place du projet a permis de préciser les objectifs à atteindre ce qui permettait de se détacher de cette vision trop quotidienne de l’activité de l’entreprise. En outre, cette démarche constitue pour nous une étape importante du processus de délégation dans la mesure où en précisant les actions jugées prioritaires pour un semestre donné, on donne au responsable de l’unité l’occasion de s’approprier réellement les nouvelles tâches qui lui ont été déléguées. Ces actions reprises dans un plan d’actions prioritaires vont à côté des activités quotidiennes permettre une gestion de l’entreprise orientée vers l’amélioration du fonctionnement de l’entreprise.
La mise en place du plan d’actions prioritaires permet aux membres de la direction de se fixer des objectifs de façon individuelle mais aussi en collaboration avec ses pairs et de les traduire en actions. Toute action reprise dans un plan d’actions prioritaires doit être compréhensible, concrète et planifiée en terme de temps nécessaire. La mise en oeuvre d’une action doit se traduire par l’obtention de résultats immédiats et / ou de création de potentiel.
La mise en place des PAP a constitué un moyen de s’obliger à regarder plus loin et de rompre avec un fonctionnement routinier du fait de leur qualité de stimulation. Ils permettent la construction d’une plate-forme de base pour améliorer à la fois le fonctionnement de chaque unité et les relations existantes entre les différents micro-espaces souvent sources de beaucoup de dysfonctionnements. C’est un outil qui matérialise les bases du travail en équipe dans la mesure où la mise en oeuvre des actions prioritaires nécessite un travail en commun de manière régulière par les réunions de pilotage des actions contenues dans le PAP. Il permet en outre à chacun des membres de la direction de situer sa contribution par rapport à la marche générale de l’entreprise. Le PAP permet une cohérence accrue de l’activité de l’entreprise et constitue un support précieux du travail en équipe au niveau de la direction d’autant plus que l’élément principal d’un véritable travail d’équipe au niveau de la direction consiste en la capacité pour « les membres de la direction d’engager de véritables interactions réciproques et collectives »449. C’est en outre un véritable outil d’animation utilisé par le dirigeant pour accroître la communication - coordination- concertation sur l’activité avec ses principaux collaborateurs. De même que pour ces derniers, il constitue un outil d’animation et leur permet de préciser les actions à mettre en oeuvre afin de faire évoluer le rôle de la maîtrise. Ainsi par exemple, du fait des nombreux glissements de fonctions observés au niveau de la maîtrise, des actions de formation intégrée ont été mises dans le PAP des différentes entreprises afin de relever le niveau de compétences des opérateurs .
Du point de vue de la délégation concertée, le principe de décentralisation du PAP vient, comme signalé précédemment, renforcer le degré d’appropriation des tâches qui leur ont été déléguées. En programmant la mise en oeuvre des actions dans le temps, nous avons permis non seulement la synchronisation de la mise en oeuvre de ces actions mais aussi l’engagement des collaborateurs du dirigeant d’inscrire leur activité dans le temps.
Illustration du PAP dans le cas de l’entreprise « C »
Les objectifs prioritaires qui ont été retenus dans le PAP du Directeur Général ont été fixés en fonction des axes d’amélioration retenus dans le projet. On remarque que l’esprit qui a prévalu dans la fixation de ces objectifs est la volonté explicite à la fois de permettre l’amélioration des services pris individuellement et de synchroniser leurs différentes activités.
Ainsi par exemple , l’objectif n°2 : « Accroître les compétences managériales des membres de la direction » vise en priorité à redonner au dirigeant d’entreprise son rôle de formateur et d’animateur de ses collaborateurs tout en permettant un travail en équipe au niveau de la direction. C’est dans cet esprit que l’action 2.1 : « Mise en place et utilisation de tableaux de bord de pilotage au niveau des départements » a été retenu . Afin de permettre aux collaborateurs du dirigeant de dégager suffisamment de temps pour pouvoir devenir de véritables pilotes de leurs zones de responsabilité, l’action 2.2: « Enrichir les fonctions de l’encadrement en leur donnant plus d’importance dans l’animation » a été jugée prioritaire.
L’objectif n°6 : « Augmenter la productivité de l’entreprise » traduit l’importance que le dirigeant donne à la fonction de production. On voit que les actions prioritaires retenues visent essentiellement à réduire les temps d’arrêt de l’équipement et précisent les différents collaborateurs du dirigeant en charge de chacune des actions.
Cela a permis de prévoir à l’avance les actions dont la mise en oeuvre demande une collaboration de plusieurs acteurs et le niveau de contrôle de chacune de ces actions.
| Objectifs | Actions | Responsable de l’action et du contrôle | Planning |
| - Accroître l’implication des membres de l’équipe de direction - Accroître les compétences managériales de l’équipe de direction et de l’encadrement - Améliorer les méthodes de travail - Développer la coordination et la concertation au niveau de l’équipe de direction - Améliorer la communication entre les différents acteurs de l’entreprise - Augmenter la productivité de l’entreprise |
- Fixer et démultiplier les objectifs aux différentes unités - Préciser les indicateurs de pilotage pouvant servir au suivi de l’activité de l’entreprise - Fixer les périodes de pilotage des actions mises en oeuvre - Mise en place et utilisation des tableaux de bord de pilotage au niveau des départements - Enrichir les fonctions de l’encadrement en leur donnant plus d’importance dans l’animation - Programmer l’activité des techniciens de l’atelier de réparation et de fabrication mécanique - Accroître la concertation entre l’usine et l’atelier au niveau de l’organisation du travail - Instaurer un système de réunions régulières avec un ordre du jour précis - Mettre en place un système d’exploitation et de suivi des résolutions issues des réunions - Arrêter de concert la façon de gérer les liaisons entre l’entreprise et son environnement notamment avec les grands clients - Réduire le jeu pouvoir / contre-pouvoir entre le syndicat et l’équipe de direction - Faire un point régulier sur l’évolution des coûts de fabrication des produits - Mieux organiser la réparation des machines - Accroître le temps de fonctionnement des nouvelles machines - Suivre le coût de fabrication des pièces de rechange fabriquées dans l’atelier - Identifier les pièces qui demandent le maximum de temps de réparation - Actualiser les schémas de pièces de rechange - Concevoir une fiche de suivi des pièces de rechange fabriquées - Compléter l’équipement des techniciens de l’atelier |
DG DG, Dir tous DG, Dir tous DG, Dir tous Dir tous DP DP DG, Dir tous DG, Dir tous DG, Dir tous Dir tous DF DP DP DP, DF DP DP DP D G, DP |
Janvier Janvier Janvier Semestre Semestre Chaque fin de semaine Semestre Janvier Janvier Mars Semestre Chaque fin de mois Semestre Semestre Semestre Semestre Mars-Juin Janvier Mars |
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Légende : DG : Directeur général Dir : Directeur DP : Directeur de production DF : Directeur Financier |
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P. Drucker in M. Saadoun, « Avec le temps. Efficacité personnelle et collective. Nouveaux modes d’organisation du travail. Et nouvelles technologies ». p 84, Les Editions d’organisation, 1998, 173 pages.
Donald C. Hambrick, « Corporate coherence and the management team », p 25, Strategic Leadership, September-October, 1997, pp 24-29