CONCLUSION GENERALE

Vouloir traiter à la fois des concepts de délégation concertée et de travail en équipe au niveau de la direction dans un travail de recherche est un projet ambitieux tant les contours et les notions connexes sont multiples et variés. A ce titre, nous ne prétendons pas avoir approfondi toutes les problématiques relatives à la direction des PME africaines, le terrain est vierge mais les résultats partiels auxquels nous sommes parvenus semblent ouvrir de nouvelles pistes de recherche. Nous pensons avoir jeté les premières bases de réflexion et tracé quelques pistes d’approfondissement pour faire de la délégation concertée un élément déclencheur de pratiques de travail en équipe d’abord au sein des directions de PME puis au niveau de toute l’entreprise.

Afin de bien faire comprendre la nécessité d’une plus grande implication des proches collaborateurs du dirigeant de PME pour l’efficacité de la gestion de son entreprise, nous avons apporté un éclairage théorique sur les concepts de délégation concertée et de pratiques de travail en équipe au niveau de la direction et nous avons essayé d’examiner l’actualité de ces pratiques dans les PME burundaises et proposé des pistes de développement et d’amélioration de ces pratiques.

Ainsi, lors de nos travaux de recherche sur le terrain, nous avons pu nous rendre compte que le dirigeant de PME semble souvent livré à lui-même du fait que le soutien de l’institution publique s’est étiolé tendant parfois à s’ériger en un obstacle au développement des PME. Aujourd'hui, aucune des structures dont la mission était inhérente au développement des PME n’est actuellement opérationnelle. De ce fait, malgré les observations critiques formulées par les spécialistes de la gestion envers les dirigeants des entreprises africaines en général et ceux des PME en particulier insistant particulièrement sur les effets négatifs d’une concentration du pouvoir de décision sur la gestion de leurs entreprises, aucun effort n’a été fait par les différentes agences d’encadrement pour tenter de relever le niveau de leurs compétences managériales. Les effets d’un déficit de ces compétences auquel s’ajoute cette fâcheuse tendance à vouloir toujours être le pilote exclusif de l’entreprise risquent de créer une situation contre-performante et susceptible d’hypothéquer à terme la survie de ces entreprises.

En prenant pour pari d’explorer dans quelle mesure « l’amorce de pratiques de fonctionnement en équipe par la délégation concertée au niveau de la direction dans les PME burundaises pourrait permettre de renforcer l’efficacité de leur gestion et l’amélioration des performances économiques et sociales », nous avons pris l’option de ne pas chercher à disserter davantage sur les caractéristiques personnelles du dirigeant de PME africaine. Nous préférons privilégier l’étude de l’impact sur son fonctionnement, de la faible prise de conscience par le dirigeant, de la contribution potentielle des différents acteurs de l’entreprise en général et de celle de ses proches collaborateurs en particulier.

Pour nourrir cette démarche, nous avons cherché par l’analyse dysfonctionnelle à comprendre de manière approfondie les dysfonctionnements que connaissent les PME-terrain du fait de la concentration du pouvoir de décision, à estimer les pertes de potentiel consécutives à la persistance d’une telle situation, et à explorer les différentes possibilités d’évolution existantes susceptibles de soutenir le développement de petites et moyennes entreprises.

Dans l’ensemble, les résultats des diagnostics socio-économiques effectués dans les PME burundaises ont conclu à une absence de délégation concertée et à l’inexistence quasi générale de vraies pratiques de travail en équipe. Du point de vue du dirigeant, nous avons remarqué qu’il fallait, sans doute, nuancer les propos quand on parle « d’impossible décentralisation »473 des entreprises africaines. Beaucoup de dirigeants de PME africaines exercent seuls le pouvoir de décision même si certains d’entre eux sont néanmoins ouverts à la délégation, mais il leur manque une méthodologie de délégation qui réduise les risques de les déposséder du contrôle de leur activité. L’inexistence de délégation concertée est un élément commun à toutes les entreprises-terrain de notre recherche mais les manifestations en sont quelque peu différentes selon les cas étudiés.

Notes
473.

Ph. D'Iribarne, " Face à l'impossible décentralisation des entreprises africaines", Revue française de Gestion, n°80, septembre - octobre 1990, pp 28-39