APPORTS DE LA RECHERCHE

Les apports de notre recherche concernent principalement les possibilités d’initier les pratiques de délégation concertée et de travail en équipe au niveau de la direction dans les PME burundaises. La deuxième catégorie d’apports concerne les possibilités induites par ces pratiques d’agir sur les capacités organisationnelles et les performances économiques et sociales ainsi que sur certaines caractéristiques culturelles des sociétés africaines en général et celle du Burundi en particulier.

Au travers de nos travaux de recherche, nous avons constaté que la délégation concertée est initiée par un dirigeant ayant le souci de dégager davantage de temps pour se consacrer à des activités de plus forte valeur ajoutée. Nous avons aussi remarqué que la délégation concertée peut être envisagée comme une action dont la nécessité est ressentie du fait de la prise de conscience permise par un début de travail en équipe. Dans la première perspective, la délégation concertée sera confortée par la mise en oeuvre des actions d’amélioration; pour le cas des dirigeants qui n’appréhendent pas spontanément la nécessité d’initier un processus de délégation concertée, la mise en oeuvre des actions d’amélioration pourrait avoir pour effet, pour ces dirigeants d’esprit paternaliste, d’être mieux éclairés sur sa nécessité à partir du diagnostic des dysfonctionnements liés à ce manque de délégation. Qu’il y ait une ouverture explicite ou non sur la pratique de délégation concertée, la mise en place des Plans d’Actions Prioritaires dans le cadre d’un projet, même peu participatif, débouche sur un début de délégation. A ce titre, nous postulons l’existence d’une boucle de rétro-action qui fait que, d'une part, la délégation concertée favorise les pratiques de travail en équipe et que d'autre part plus le niveau de compétences managériales va croissant, plus le dirigeant de PME sera lui-même demandeur de davantage de participation de ses proches collaborateurs et plus il pourra effectivement déléguer.

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La relation [ Pratiques de travail en équipe Délégation concertée] sera facilitée par l’accroissement de la confiance du dirigeant en ses collaborateurs permis par une meilleure prise en charge de leurs zones de responsabilités respectives du fait de l’accroissement de leurs compétences managériales.

Cette relation nous permet de dire que les pratiques de travail en équipe viennent renforcer la délégation concertée dans le cas où le dirigeant de PME est l’initiateur du processus de délégation concertée; et, dans le cas contraire, son ouverture sur les actions de changement lui fera découvrir la nécessité d’impliquer ses proches collaborateurs par la délégation concertée. Le développement de la communication permis par la mise en place du projet, puis l’explicitation des objectifs repris dans le Plan d’Actions Prioritaires de chacun des proches collaborateurs, ainsi que l’utilisation des Tableaux De Bord de Pilotage dans le cadre de leur mise en oeuvre, semble avoir eu pour effet de convaincre le dirigeant de la nécessité de s’appuyer plus largement sur ses proches collaborateurs.

Nous avons démontré que l’axe processus du management socio-économique : diagnostic, projet, mise oeuvre et évaluation des actions d’amélioration, peut constituer une pratique de team building pouvant faire évoluer les pratiques vers un fonctionnement en équipe permettant ainsi aux membres de la direction de mieux situer leur contribution dans le cadre de l’ensemble de l’activité de l’entreprise.

La formation intégrée soutenue par la formation-concertation et l’appropriation des outils de management socio-économique par les membres de la direction ainsi que d’autres actions de formation intégrée menées auprès d’autres acteurs, ont permis à la fois d’accroître le niveau de compétences managériales des proches collaborateurs du dirigeant et la prise en main d’activités de plus forte valeur ajoutée. Ces actions ont amené les dirigeants et leurs proches collaborateurs à se rendre en compte que des évolutions sont possibles lorsqu’on donne davantage d’importance aux investissements immatériels lesquels améliorent le fonctionnement interne. Malgré l’impact négatif de l’environnement socio-politique et l’incapacité des entreprises à accroître leurs capacités technologiques, l’accroissement des capacités organisationnelles est susceptible de contribuer au maintien, voire au progrès, à court et moyen termes, de la compétitivité de ces entreprises ( voir figure n°10: intersection des deux environnements et capacités organisationnelles). Ainsi, contrairement à l'appréhension développée par la plupart des dirigeants de PME qui ne croient pas possible d'accroître les performances de l'entreprise, nous avons remarqué que les actions mises en oeuvre ont permis à la fois d'améliorer le potentiel organisationnel et d’accroître les performances économiques et sociales de l'entreprise. Une telle approche prépare les acteurs de l’entreprise à mieux prendre en charge les actions de changement qui peuvent résulter des transformations dans l’environnement économique et technologique ( voir figure n° 10 intersection entre l’environnement économique et technologique) du fait notamment des actions de formation intégrée mises en oeuvre dans ces entreprises et de la dynamique ainsi créée. Tout cela accroît le taux de contrôle de l’incertitude souvent jugé très faible dans les sociétés africaines

Au niveau politique (environnement politique), certaines actions menées nous permettent d’affirmer d’une part qu’il existe des possibilités de mieux éclairer les décideurs politiques sur les structures d’appuis indispensables au développement des PME  et d’autre part d’inciter le dirigeant de P.M.E. à améliorer ses relations de travail avec ses partenaires institutionnels.

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Figure n°10 Possibilités de développement de la PME

Du point de vue de la distance hiérarchique jugée très élevée dans les entreprises africaines, elle peut déboucher parfois sur un paternalisme pouvant déresponsabiliser les proches collaborateurs du dirigeant. La fixation des objectifs à atteindre au niveau de chaque département et la concertation sur leur mise en oeuvre nous semblent pouvoir limiter les effets consécutifs au mouvement de retrait constaté chez certains membres de la direction du fait des contraintes liées au respect de l’autorité. Nous avons identifié que la communication était un outil susceptible de limiter les effets d’une concentration du pouvoir de décision par les dirigeants de PME dans la mesure où cette communication permet aux collaborateurs du dirigeant d’infléchir les décisions de ce dernier tout en lui reconnaissant l’autorité de conclure.

Nous avons également partiellement validé que l’un des effets des réunions de pilotage des actions d’amélioration entre le dirigeant et ses proches collaborateurs était de faire évoluer les comportements dans le sens d’accorder davantage d’importance à la gestion du temps. Une transformation plus radicale de leurs pratiques de gestion du temps nous paraît difficile à envisager car il paraît impossible d’isoler les comportements professionnels de ceux qui se manifestent dans les autres secteurs de la vie sociale.

Enfin, comme le dirigeant de PME procède souvent à des recrutements qui lui sont imposés, soit par son statut social, soit par les relations qu’il entretient avec des proches extérieurs, et que les exigences de compétence ne sont pas mises en avant, le développement de la formation intégrée à tous les niveaux permet de limiter les conséquences nuisibles, d’un tel mode de recrutement sur le fonctionnement des entreprises. Par des actions de formation intégrée mises en oeuvre dans les PME-terrain de recherche , nous avons pu nous rendre compte qu’il était possible d’éviter les dysfonctionnements dus à la seule formation sur le tas en prenant véritablement en compte dans les manuels de formation intégrée les compétences techniques et humaines dont les PME ont besoin.