4. Méthode de Watson : règle de décalage pour l’estimation du facteur d’échelle locale

Afin de calculer le facteur d’agrandissement sans avoir une idée préalable des données physiologiques, Watson (1987) a proposé une méthode qui permet de calculer le facteur d’échelle en se basant sur les performances réalisées par l’observateur.

Figure 19. Estimation du facteur d’échelle locale. (A) Sensibilité au contraste en vision centrale. (B) Sensibilité au contraste en fovéa (cercles ouverts) et en périphérie (cercles noirs). (C) La courbe de la vision périphérique a été glissée à droite afin de se superposer sur la courbe de la vision fovéale. La translation horizontale représente la valeur de l’échelle locale de la vision périphérique.

Tirée de Watson (1987).

Supposons que l’on présente un ensemble de stimuli dans le champ visuel central d’un observateur, ensuite on lui présente les mêmes stimuli à une excentricité donnée. Si la différence entre la fovéa et la périphérie est quantitative, alors les courbes des résultats devraient être similaires pour les deux excentricités hormis un facteur d’échelle (cf. figure 19.C, la flèche). Ce décalage entre les deux courbes est le facteur d’agrandissement nécessaire pour égaliser les performances à travers le champ visuel, appelé facteur d’échelle locale par Watson.

En représentant la sensibilité au contraste en fonction des FS sur une échelle logarithmique, on remarquera une translation horizontale nous indiquant la valeur du facteur d’agrandissement spatial qui permet de rendre égale la tâche visuelle pour deux excentricités (cf. figure 19). Si une translation verticale est observée ceci indiquera que la sensibilité aussi a changé en fonction de l’excentricité.

Grâce à cette méthode, Watson réussit la séparation entre deux paramètres jusque là confondus :

Par exemple, si f c (t) est la fonction de détection en vision centrale et f p (t) est la fonction de détection à une excentricité p.

g c (t) est l’évolution de la fonction d’identification en vision fovéale et g p (t) l’évolution de l’identification à une excentricité p.

Si la différence de traitement visuel entre excentricité 1 et 2 est simplement un facteur d’échelle pour les deux tâches:

Si f c (t) = f p (t/ε f )

et gc(t)=gp(t/εg)

t est la taille du stimulus, f et g sont deux fonctions visuelles par exemple détection et identification, respectivement. Les lettres c et p en indice représentent la vision centrale et périphérique, respectivement, ε est le facteur de l’échelle locale (la translation horizontale sur l’axe des FS représentées sur une échelle log. base 2).

Alors les deux excentricités auront la même fonction de taille pour une tâche donnée, hormis un facteur d’échelle ε. Si cette égalité s’avère vraie pour les deux tâches f et g qui évoluent différemment selon les tailles, alors on peut comparer les deux tâches en comparant leur facteur d’échelle ε.

Si l’égalité des performances est réalisable, alors une modélisation des réponses dans le champ visuel selon un filtre variable en fonction de l’excentricité serait possible (Séré, Marendaz & Hérault, 2000).

Il est important de présenter un ensemble de stimuli ayant des tailles croissantes pour chacune des excentricités afin de pouvoir comparer les deux fonctions. En effet, supposons que l’on étudie deux tâches visuelles (détection de réseaux et tâche de vernier) à deux excentricités données en présentant la même taille aux deux excentricités. La tâche vernier va se dégrader plus rapidement en périphérie que la détection de réseaux (Levi et al., 1985; Westheimer, 1982). Ce résultat en lui-même ne nous renseignera pas sur les échelles locales des deux tâches. En effet, présenter un stimulus de même taille en périphérie équivaut à réduire sa taille en fovéa. Cette réduction aura des effets différents pour les deux tâches.