Chapitre 5. Apprentissage Perceptif

L’apprentissage perceptif se caractérise par une amélioration des performances de bonnes réponses qui a lieu rapidement après le début de l’expérience. Il apparaît sans aucun renforcement et n’engage pas de processus conscients mais plutôt des processus inconscients (Sagi & Tanne, 1994).

L’apprentissage perceptif se développe au même moment que les modifications des connexions entre l’œil et le cerveau. Ces connexions se développent pendant l’enfance et améliorent la précision de la topographie et de la résolution ( Hubel & Wiesel, 1977; Mohn & Van Hof-Van Duin Regan, 1991). Si le fonctionnement de ces connexions est perturbé suite à un manque de stimulation visuelle appropriée (i.e., cornée opaque, strabisme) l’apprentissage perceptif sera perturbé et l’acuité visuelle n’atteint pas le niveau de celle d’un adulte normal (Levi & Klein, 1985).

L’apprentissage perceptif se manifeste aussi chez l’adulte et dans différentes tâches visuelles telles que l’hyperacuité (McKee & Westheimer, 1978; Poggio, Fahle & Edelman, 1992), la détection de réseaux (De Valois, 1977; Mayer, 1983), la discrimination des phases (Fiorentini & Berardi, 1981), la détection de mouvement (Ball & Sekuler, 1987), la discrimination de la texture (Gurnsey & Browse, 1987; Karni & Sagi, 1991), l’exploration visuelle (Steinman, 1987) et l’identification de formes (Nazir & O'Regan, 1990).

Certaines études ont montré que l’apprentissage est sélectif à la localisation dans le champ visuel. Ainsi, ce qui est appris dans une zone du champ visuel ne l’est pas dans une autre (Karni & Sagi, 1991; Nazir & O'Regan, 1990; O'Toole & Kersten, 1992). Il l’est aussi à l’orientation, car l’apprentissage d’une orientation ne permet pas d’obtenir de hautes performances lorsque l’orientation est différente de celle qui était précédemment apprise (Ball & Sekuler, 1987; Karni & Sagi, 1991; Mayer, 1983; Schoups, Vogels & Orban, 1995). Enfin, il est aussi spécifique aux fréquences spatiales (Fiorentini & Berardi, 1981) et à la direction du mouvement (Ball & Sekuler, 1987). En vision périphérique, l’apprentissage perceptif est très fort et il est spécifique à la localisation rétinienne, c’est-à-dire que ce qui est appris dans une partie de la rétine il ne l’est pas dans l’autre.

L’apprentissage s’étend sur des milliers d’essais et persiste pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines même après que les observateurs aient fini de passer les expériences (Fahle & Edelman, 1992; Ball & Sekuler, 1987).

Jusqu’à présent, les techniques utilisées pour détecter l’apprentissage perceptif consistaient à estimer en fonction des sessions : 1) l’amélioration des probabilités de bonnes réponses pour discriminer les plus faibles différences (Fiorentini & Berardi, 1981), 2) la baisse des seuils (Fahle & Edelman, 1992; Levi & Polat, 1996) ou 3) l’amélioration de la sensibilité des observateurs à la cible en fonction des sessions (Ball & Sekuler, 1987). Cependant, ces techniques ne nous renseignent pas sur la règle utilisée par l’observateur pour classer une image, ni sur ce qu’il a appris.

Afin de pallier à ces lacunes et de permettre une comparaison pertinente entre l’apprentissage en vision centrale et l’apprentissage en vision périphérique, nous proposons une approche innovante de la technique d’Ahumada (1996) et Sandusky et Ahumada ( 1971).