Partie Première : La liquidité du marché: fondements théoriques

Sur les marchés financiers, la liquidité est l'œuvre des marchés secondaires. Elle revêt un aspect complexe étant donné les particularités des produits financiers et l’aspect interactif des fonctions du marché.

En plus des attributs du titre, la production de la liquidité devient également liée aux performances du marché. En effet, la liquidité d’un titre est fortement conditionnée par l’existence d’un marché secondaire actif et efficace. L'efficacité d'un marché boursier dans la production de la liquidité dépend de son organisation et de l'étendue de l'intermédiation assurée par ses acteurs.

Or une grande partie de la littérature portant sur la liquidité du marché se trouve fortement conditionnée par les écrits anglo-saxons reposant essentiellement sur le rôle des market makers. Cependant, cette littérature est réductrice et une vision plus large s'impose.

Selon Courbis & Dupuy (1989), la liquidité d'un marché dépend à la fois de son environnement et de son organisation même. Si l'environnement du marché ne conduit pas à une parfaite autoliquidité, l'organisation doit y suppléer et produire une liquidité marchande (à travers le rôle des intermédiaires de marché).

Dans la même optique, Wagner (1989) adopte une conceptualisation de la liquidité qui distingue entre la liquidité naturelle et la liquidité artificielle 17 . La liquidité naturelle résulte de la rencontre d'un grand nombre d'acheteurs et de vendeurs. La liquidité artificielle est produite par les market makers dont les inventaires servent de tampon au marché.

A la lumière de ces travaux nous envisageons deux sources de liquidité sur un marché: la liquidité structurelle 18 et la liquidité additionnelle.

D'une part, la liquidité structurelle est garantie par des aspects durables liés à l'environnement du marché et à son organisation. Parmi ces aspects, le degré de développement du système financier en totalité, la diversité de ses acteurs et l'innovation financière sont considérés comme étant des conditions principales et nécessaires à la liquidité d'un marché secondaire. En effet, ces facteurs affectent l'état de l'offre et de la demande sur le marché. Ils garantissent alors le maximum de "liquidité naturelle" (ou d'autoliquidité).

D'autre part, la liquidité additionnelle est purement et simplement produite par les intermédiaires de marché.

Cette partie est consacrée à l'étude des éléments théoriques qui entourent la liquidité du marché. Ils peuvent être regroupés sous deux thèmes majeurs: la théorie de la microstructure des marchés et la théorie de l'intermédiation financière.

Le premier chapitre propose de situer la notion de liquidité du marché dans la théorie de la microstructure des marchés. La microstructure d'un marché résulte de la combinaison de toutes les règles relatives aux échanges dès la réception de l’ordre jusqu’à la livraison des titres. Elle est un facteur structurel qui influence la liquidité du marché dans la mesure où elle permet de garantir la rencontre du maximum d'investisseurs fondamentaux.

Le deuxième chapitre s'intéresse à la production de la liquidité obtenue grâce à l'intermédiation. Néanmoins, nous adoptons une analyse plus large. En effet, en plus de la production de la liquidité marchande offerte par les intermédiaires de marché, nous évoquons le rôle des intermédiaires du bilan dans la production de la liquidité par la transformation des attributs des titres primaires et par le réinvestissement sur le marché de l'épargne contractuelle.

Notes
17.

Wagner (1989): "If market have little "natural liquidity", they must be made liquid artificially, and a need for a functionary to make the market. A market is made when a market-maker stands willing to provide bridge liquidity by buying stock offered and holding it until a buyer arrives." Chapitre 9, p 112.

18.

Selon le dictionnaire Le Petit Larousse, le terme structure désigne "l'ensemble des caractères relativement stables d'un système économique à une période donnée (par opposition à conjoncture)", p 960.