2) Sujet historique et présence immédiate au monde

Beaucoup plus tard, en 1960, dans une conférence intitulée Pourquoi la littérature respire mal, Julien Gracq donne à cet ensemble d’intuitions une forme réfléchie qui permet, à la lumière de l’histoire de la littérature moderne dans ses rapports avec le siècle, de mieux comprendre le sens et la portée de cette expérience et de saisir tout ce que la poétique et la pensée gracquiennes ont de profondément subversif et simultanément lucide. Il y présente un certain nombre de positions qui analysent avec finesse l’impasse d’une littérature rabattue sur le fait social et l’Histoire, sous le prétexte douteux que s’y révélerait intégralement l’essence de la condition humaine. Gracq y réfléchit notamment à l’apport de Malraux, dont il reconnaît par ailleurs la grandeur, et de Sartre : ‘“’ ‘ ce qui me frappe dans l’expression de l’homme que donnent chacune de ces écoles, c’est qu’elle constitue invariablement une répudiation de ses pouvoirs naturels – une image mutilée, par une opération chirurgicale violente – de ce qu’un de ces romanciers justement a appelé la condition humaine. Le monde des romans de Malraux est un monde dominé par des tensions à peine supportables. C’est un monde déjà absurde, tragique, ténébreux, privé de sens, sauf qu’il est engagé dans cet écoulement sans retour, cet énorme courant aveugle qui fascine notre temps depuis un siècle et demi et qu’on appelle l’histoire’ ”465.

Qu’un subtil professeur d’Histoire, à l’époque occupé par l’enseignement dans les classes préparatoires, se livre à une critique de la substance historique, telle qu’elle est exprimée par la littérature de son époque, a de quoi surprendre. Il faut cependant lire la suite de l’analyse pour comprendre le sens profond de ce jugement. Julien Gracq ne s’y livre pas à une critique de la science historique et de ses méthodes, mais de la manière dont la littérature alors dominante fait usage de la notion d’Histoire et prétend identifier celle-ci à la seule essence réelle de l’homme, au point de devenir, autant qu’une idéologie, un motif de fascination délétère, symptomatique de ce que Nietzsche aurait appelé un nihilisme négatif ou une morale du ressentiment, c’est-à-dire les symptômes d’une maladie de la culture reversant l’idéalisme religieux dans les multiples formes d’une ontologie historiciste.

Julien Gracq déclare notamment : ‘“’ ‘ L’histoire comme obsession et comme cauchemar achève avec Malraux de culminer dans notre ciel à la manière d’un soleil noir. Quand au mouvement propre de ses livres, la toile de fond fixe et immobile, c’est la planète, une planète étrangère à l’homme, grisâtre, indifférente, d’une inertie sidérale ”’. Une telle formule révèle à elle seule l’étendue du malentendu qui oppose Julien Gracq au roman du tragique historique tel que le conçoit l’auteur de La condition humaine. A la vision abstraite, panoramique et détachée du sol, Julien Gracq oppose celle d’une humanité incorporée à la chair du monde, idée qui se retrouvera dans un tout autre contexte, purement géographique, lorsque dans Lettrines, l’auteur évoquera la décevante vision du pôle survolé au cours de son voyage vers l’Amérique. Il n’en reste pas moins que, comme le souligne Philippe Berthier, ‘“’ ‘ L’historien professionnel, mais aussi l’homme qui a vécu intensément la lente incubation de la dernière guerre, qui a senti l’Histoire accentuer peu à peu sa pression (...) s’étonne - et se scandalise – de l’absence presque complète de la dimension historique chez Valéry, Proust, Gide, Breton’ ”466. La position de Julien Gracq n’est donc pas si simple qu’on pourrait croire. Elle ne relève pas d’un anhistoricisme que les auditeurs ou les lecteurs de la conférence de 1960 auraient pu croire déceler chez lui, pas plus qu’elle ne se réduit à la fascination obsessionnelle réduisant l’homme à la seule dimension de sujet historique. C’est bien en ce sens qu’on peut parler dans l’oeuvre de Julien Gracq d’une immanence troublée.

La vision du monde, comme absurde théâtre indifférent ne saurait donc convenir pour désigner l’essence infiniment plus ténue et discrète de la condition humaine, dont on sent bien à lire Gracq qu’elle n’a pas besoin de titre pompeux qui la fige en catégorie, pour déployer mystérieusement son devenir spontané. Assez malicieusement, le conférencier de 1960 se réfère à Eluard, dont on sait l’engagement souvent aveugle et consternant en la faveur du stalinisme : ‘“’ ‘ Si oppressante que soit devenue la pesée sur notre vie de l’histoire, très circonscrits restent malgré tout les points d’impact par lesquels elle nous atteint et nous pénètre. Les neuf dixièmes de notre temps vécu, (...) se déroulent dans un monde sans passé et sans avenir, dans le monde de ce qu’Eluard a nommé la Vie immédiate, monde où l’histoire mord à peine, où le souci de l’action et de l’engagement n’a pas de prise. Le monde énorme du rêve, du rêve endormi et du rêve éveillé échappe à cette littérature. Celui des paysages (...) Celui de l’amour, qui refuse les servitudes du temps et du lieu’ ”467. C’est encore ici la revendication centrale du Surréalisme qui, dans l’Histoire catastrophique, à partir de cette expérience historique, comme réponse historiquement datée, quant à sa forme culturelle, oppose la revendication d’une autre dimension de la vie, tout à la fois familière et magique, telle qu’elle apparaît dans Nadja ou l’Amour fou.

Comme André Breton, Julien Gracq a bien compris qu’à vouloir traiter l’homme sur le seul plan de l’historicité et du schématisme sociologique, ceux-là mêmes qui prétendent le comprendre et lui offrir les moyens d’une libération, le réduisent à n’être rien d’autre que ce monstre bien digne des hybrides, mutants ou clones du laboratoire contemporain : la vivante illustration d’une théorie. L’exemple le plus actuel de ce genre de dérive, sous sa forme littéraire, ou du moins la forme littéraire dégradée en vogue depuis quelques années, est donné par la production d’un Michel Houellbecq qui prétend résumer l’homme occidental des années 1990-2000, dans des caricatures passablement obsessionnelles dont Julien Gracq, non sans ironie déclarait récemment qu’elles apportent ‘“’ ‘ un ton nouveau’ ”, pour ajouter aussitôt qu’ayant parcouru Les particules élémentaires, il ne lirait pas Plate forme.

Julien Gracq rejette en effet les approches purement techniques et déceptives de l’existence, telles qu’une certaine littérature les a glorifiées : ‘“’ ‘ L’ennui, avec les techniques, c’est qu’elles sont somme toute si parfaitement plausibles et légitimes. Elles ne sont jamais réfutées : elles se démodent, elles quittent peu à peu le champ de l’attention ”’ 468. En effet, la fascination envers les techniques participe, sous une autre forme du désenchantement de la véritable condition de l’homme, dans la mesure où elle n’exprime que l’écume la plus superficielle de l’Histoire en marche et ne dit rien de l’essence vécue de l’être-au-monde. Elle exprime davantage l’autonomie d’un mode de pouvoir scientifique, ainsi qu’un assujettissement des individus à des systèmes artificiels d’existence où ils ne sont plus eux-mêmes, mais des unités sociologiques surdéterminées jusqu’en leur être intime par les lois abstraites de l’usage et de la consommation.

De cette situation résulte donc une littérature du non, qui pense la modernité comme pure expérience de l’exclusion et dénonce tout ce qui fonde aux yeux de Julien Gracq la trame de cette vie immédiate dont il se fait le défenseur. Bien que peu suspect de fascination technique, Sartre fait alors l’objet d’une attaque vigoureuse, dans la mesure où il accompagne le désenchantement moderne d’une telle dévalorisation de l’existence humaine et de l’être-au-monde qui la sous-tend. Curieusement, cette attaque n’est d’ailleurs pas rédigée par Julien Gracq lui-même, mais exprimée à travers une longue citation de Gaëtan Picon  : ‘“’ ‘ L’obsession de la réclusion symbolise l’irréparable séparation de l’homme et du monde. La scène est toujours un lieu fermé, dont l’atmosphère ne se renouvelle pas : la boîte de nuit, le café, un quartier comme celui de Montparnasse, véritable Olympe sartrien. Acculés les uns aux autres, acculés à eux-mêmes, les héros sartriens ne connaissent que leur écoeurement, leur flottement, leur vide. L’amour est un échec, les rapports avec l’autre sont toujours décevants. Une lumière cruelle, impitoyable, s’attarde sur tout ce qui détache l’homme de lui-même ”’ 469. Essentiellement urbaine, cette vision de l’humanité ne correspond guère, en effet, à celle que Julien Gracq déploie dans ses oeuvres, et notamment dans celles qui se concentrent autour de la matière urbaine. Elle se situe même à l’opposé de l’individualisme nomade des poèmes de Liberté grande, comme de l’épaisseur subjective et mémorielle du Nantes de La forme d’une ville. La cité sartrienne des temps modernes n’offre en effet que les possibles socio-historiques déclinés en autant d’expériences déceptives qui prétendent réduire l’homme à un contexte d’une manière infiniment plus réductrice et étouffante que tout ce que le réalisme balzacien a pu se voir reprocher par André Breton dans le Premier manifeste du Surréalisme.

D’une manière générale, l’univers sartrien, surdéterminé qu’il est par les conséquences métaphysiques tirées de l’expérience moderne, se caractérise par le sentiment de l’irrespirable et de la liquéfaction. Il n’y a plus d’intervalle, d’espace du déplacement et de la vision permettant de tracer les fils secrets d’un lien, mais une forme d’engluement qui reconduit sans cesse les personnages à l’absurdité de l’existence et à son cloisonnement historique.

Julien Gracq stigmatise donc cette littérature de l’exclusion qui oublie ‘“’ ‘ cette espèce de mariage, de mariage d’inclination autant et plus que de nécessité, mariage tout de même confiant, indissoluble qui se scelle chaque jour et à chaque minute entre l’homme et le monde qui le porte ”’ 470. C’est alors que Julien Gracq fait intervenir la notion de plante humaine, renvoyant à une toute autre ontologie que celle du roman de l’expérience sociale et historique comme donnée ultime et exclusive de l’être-au-monde. Dans l’entretien intitulé Les yeux bien ouverts, l’auteur exprime déjà cette idée de plante humaine en déclarant : ‘“’ ‘ Je me fais de l’homme l’idée d’un être constamment replongé : si vous voulez, l’aigrette terminale, la plus fine et la plus sensitive, des filets nerveux de la planète ”’ 471.

Anhistorique et simultanément immémorial, l’être-au-monde gracquien subvertit les catégories de tout déterminisme qui prétendrait ramener l’homme aux seules fonctions pratiques ou conceptuelles qui lui sont assignées dans les sociétés ou les philosophies de l’Histoire. Ce n’est point que Julien Gracq oublie la réalité historique ou qu’il en dédaigne les incarnations successives, mais il ne lui concède pas le rôle de moteur unique ni de divinité positive, quelles que soient les belles et utopiques raisons de croire à la nécessité d’un progrès linéaire vers une heureuse fin dernière. On peut songer à ce passage des Carnets du grand chemin dans lequel il est justement question des processus révolutionnaires pour lesquels certains des premiers personnages de son oeuvre nourrissent une certaine fascination romantique, bien qu’éloignée il est vrai de toute logique d’engagement régulier et fidéiste : ‘“’ ‘ Les révolutions sont les locomotives de l’histoire. Mais, non moins ambivalentes que le sabre de Joseph Prud’homme, le temps passant, elles en deviennent aussi les freins. Le souvenir illuminé de la brève période du ’ ‘“’ ‘ groupe en fusion ” se paie ensuite d’un insurmontable figement mental ”’ 472.

Il y a bien du mouvement en Histoire. A l’époque d’une certaine modernité dont il faut bien se demander aujourd’hui si elle n’est pas révolue, ces phénomènes protéiformes et d’intentions variées qu’on a appelés les révolutions ont joué le rôle de catalyseurs et d’accélérateurs – on remarquera qu’à ce sujet, Gracq, moraliste de l’Histoire comme Chamfort le fut des moeurs et du coeur, ne prononce aucun jugement de valeur – elles semblent plutôt vouées à la pétrification qu’à la glorieuse assomption de la liberté et du bonheur sur terre. Le déterminisme prétendu de l’émancipation dissimule plus souvent la réaction qu’il ne le laisse a priori paraître dans la première effervescence de son irruption juvénile. Plus bergsonien que marxiste ou même marxien, Gracq sait bien que l’Histoire se lit à rebours comme l’actualisation plus ou moins aléatoire d’un certain nombre de possibles incalculables et indéfinissables a priori. De ce point de vue, la science historique consiste donc, dans cette optique, moins à rechercher des logiques qu’à tenter de ressaisir et d’épouser à distance, des mouvements et des ébullitions en cours de formation, à baliser l’advenue et la manifestation de ce que Michel Foucault nomme des événements.

Julien Gracq, plus qu’un professeur est aussi un analyste aigu de l’événementialité, cette substance paradoxale tissée de rêves, d’actions et d’errances qui se heurtent sans cesse les uns aux autres comme les atomes dans le clinamen de Lucrèce. Ce même Julien Gracq est aussi l’auteur qui affirme souverainement : ‘“’ ‘ La condition humaine c’est certes, mais c’est bien loin d’être seulement, comme tend à nous le faire croire un livre très beau, mais qui a usurpé son titre, ce combattant lucide et désespéré, enfermé dans son tête-à-tête avec le monde absurde et la mort et pour qui l’action semble parfois comme une drogue – la condition humaine c’est aussi (...) ce pacte renoué dans les circonstances les plus tragiques, les plus grisantes de l’Histoire avec les puissances d’un monde sans âge, resté fraternel et amical ”’ 473.

On le comprend donc, le recours au mariage hors du temps de l’homme avec le monde n’est pas une négligence, un dilettantisme, un dandysme ou un renoncement par faiblesse, mais une forme d’insurrection vigilante qui ne s’interdit rien et transcende de toute part, presque naturellement, la mesquinerie du réductionnisme socio-historique, étranger d’ailleurs à la meilleure science historique, celle par exemple d’un Braudel, d’un Duby ou d’un Legoff. Julien Gracq est à cet égard on ne peut plus clair : Il ne s’agit pas d’abandonner le refus et la révolte qui sont dans l’homme aussi essentiels que sa conscience même ”, ni ‘“’ ‘ de donner à ce qui est l’acquiescement pharisaïque qui a souvent été celui d’un Claudel, (...) mais de revendiquer à tout instant l’expression de la totalité de l’homme, qui est refus et acceptation mêlée, séparation constante et aussi constante réintégration’ ”474.

La mariage avec le monde n’est donc pas un déni, mais une dialectisation de la condition simultanément historique et intemporelle de l’homme. Il exprime l’autre face de la nécessité qui n’est pas seulement celle de l’agir engagé, mais aussi ce dessaisissement de la conscience qui tente de retrouver le contact perdu avec les énergies latentes du monde. C’est en ce sens que Julien Gracq fait l’éloge du Romantisme allemand, ‘“’ ‘ monde de Novalis ou de Nerval, non point, certes, coupé du tragique, mais où l’homme était constamment replongé dans ses eaux profondes, réaccordé magiquement aux forces de la terre, irrigué de tous les courants nourriciers dont il a besoin comme le pain ”’ 475.

Pour autant, cette expérience n’a rien d’une pure nostalgie, d’une forme de mystique panthéiste telle qu’elle s’exprime par exemple dans Le chant du monde de Jean Giono, ou d’une théologie telle celle des Cinq grandes odes de Paul Claudel. Paradoxalement, la nécessité de retrouver ‘“’ ‘ ces immenses réserves de calme d’où monte le sentiment aveugle, débordant, du consentement confiant et de l’accord, d’où jaillit vraiment la mélodie de la vie ’”, se présente comme un projet, un élan de devenir conforme aux impératifs d’une époque dominée par les croyances socio-historiques. Hors de toute conception politique, Julien Gracq préfigure ici certaines des dénonciations de l’unidimensionalité de la vie moderne qui s’exprimeront bientôt, il est vrai dans un cadre idéologique à son insu tout aussi coercitif que celui des croyances des années cinquante. En ce sens Julien Gracq est donc bien ce ‘“’ ‘ déserteur de l’avant-garde’ ” dont parle si justement Michel Murat. Il l’est doublement, dans la mesure où il se distingue des mouvements qui passent pour représenter l’avant-garde, mais se porte lui-même, indépendamment de toute obédience collective en amont de son époque. S’il retrouve une origine dans le Romantisme allemand, ce n’est certes pas pour en épouser la philosophie de la nature dont il sait bien qu’elle est désormais caduque, mais pour la réinventer selon ses aspirations et ce qu’il estime la véritable urgence de 1960.

Un tel discours a pu sur le moment sembler à bon nombre d’auditeurs dépassé et enfermé dans un conservatisme de mauvais aloi. Une telle distorsion peut s’expliquer par le phénomène de “ l’effet retard ” brillamment exposé par le philosophe de l’art Thierry De Duve à propos de l’oeuvre de Marcel Duchamp476. Entre tradition et modernité, le véritable créateur moderne est celui qui s’arrache simultanément à la défense conservatrice du passé, sans pour autant s’identifier aux avant-gardes militantes qui prétendent faire table rase de ce même passé et donner naissances à des formes inédites coupées de tout enracinement. “ L’imprévisible nouveauté ” de l’oeuvre authentique, pour reprendre ici la célèbre expression de Bergson, se caractérise par une dialectisation du passé et du présent qui projette l’artiste et ses créations dans un devenir non accompli au moment où surgit l’objet pictural ou littéraire, si bien que celui-ci est toujours en avance sur le temps de sa manifestation sociale. Marcel Duchamp théorise lui-même avec humour, dans ses écrits et ses travaux plastiques, cette contradiction dynamique. Une oeuvre comme In Advance of the broken arm l’affirment par son titre et anticipe effectivement, par l’effet d’un surprenant hasard un incident personnel de cette nature. De même, la célèbre valise propose la présence d’un objet esthétique en devenir, en raison même de sa nature associée au nomadisme spatio-temporel.

Ces objets affirment à leur manière le statut singulier de l’artiste moderne que toute création libre, c’est-à-dire insoumise aux formalismes théoriques de la tradition et de son double avant-gardiste, ne peut sur le moment est perçue pour ce qu’elle offre et comprise de manière adéquate, le propre des conservatismes, et plus encore peut-être des académismes du moment, étant de fixer et d’enfermer l’art dans une idée préconçue, que celle-ci se présente comme définition d’une essence irrécusable devant servir de modèle éternel, ou comme projet historiciste destiné à établir une vérité définitive par un équivalent artistique des grandes entreprises révolutionnaires affirmant la fondation d’un homme nouveau.

Sur le plan de l’histoire des arts plastiques, on trouve un bon exemple de ces fixismes dans les reproches adressés au peintre Willem de Kooning dans les années cinquante. Les expressionnistes abstraits de son entourage ont en effet perçu les premières peintures de la série Women comme un “ retour ” inexplicable et injustifié à la figuration qu’ils jugeaient, à l’instar d’autres groupes de défenseurs de l’abstraction, définitivement dépassée, tandis que de nombreux citriques stigmatisaient absurdement l’absence de style du peintre, en raison des métamorphoses incessantes de sa manière. Ce n’est que bien plus tard, lorsque Picasso produit ses oeuvres ultimes, puis au moment de l’apparition de la Nouvelle Figuration des années 1980, en Europe, que la modernité avec retard des femmes de De Kooning apparaît dans toute sa puissance novatrice477.

Dans une certaine mesure, le décalage entre la conférence Pourquoi la littérature respire mal et l’époque dans laquelle celle-ci est prononcée, révèle chez Julien Gracq une véritable capacité à déborder les apparences du modernisme littéraire militant, à les subvertir par un véritable processus d’inactualisation qui passe momentanément pour un aveu de repli. L’anhistoricisme apparent des déclarations et des positions de Julien Gracq témoigne en réalité d’une intuition féconde de son époque, de ses contradictions, de ses limites et des impasses théoriques qu’elle emprunte sans en avoir conscience. De ce point de vue, Julien Gracq est infiniment plus moderne que les écrivains dont il fait la critique, bien que cette critique semble le rejeter dans le camp du passéisme.

Comme Nietzsche, cet autre grand critique du positivisme historique, Julien Gracq est homme de l’éternel retour, c’est-à-dire du devenir en différence et en répétition variée. Les textes brefs des Lettrines, l’abandon du roman au profit de nouvelles, puis le passage de la fiction aux livres de notes de voyage, d’évocation de paysages et de villes, de réinterprétation de quelques éléments autobiographiques de méditation esthétique ou historique que sont par exemple En lisant en écrivant, La Forme d’une ville, Carnets du grand chemin, témoignent de cette diversité en devenir qui sait spontanément s’émanciper des formes et des genres et créer plus qu’une oeuvre, le sillage d’une création en mouvement. En ce sens, il n’est donc pas contradictoire de dire comme Philippe Berthier que Julien Gracq a ‘“’ ‘ l’oeil braqué de loin sur les mondes vierges à l’horizon. Mondes inédits qui, à l’instar de la planète de Lerverrier, ne peutint pas ne pas surgir, selon la projection vers l’avenir de l’évolution de la produciton littéraire ”’ 478. C’est à ce titre que Julien Gracq se situe bien par-delà le passé conservateur du traditionalisme et la modernité momentanée des modes, à la façon d’une vigie clairvoyante appelant de ses voeux les rivages inédits qu’elle soupçonne.

La Forme d’une ville offre un exemple particulièrement frappant de ce dynamisme créateur, dans la mesure où l’ouvrage prend en défaut tous les fixismes. Dès l’incipit s’affirme en effet l’esprit de mobilité : ‘“’ ‘ La forme d’une ville change plus vite, on le sait que le coeur d’un mortel ”’ 479. C’est pour aussitôt ajouter : ‘“’ ‘ il arrive aussi, il arrive plus d’une fois que, ce coeur, elle l’ait changé à sa manière ”’. D’emblée, le texte saisit donc le lecteur dans le noeud d’un double devenir où l’histoire personnelle et celle de Nantes échappent aux tautologies de l’idéologie originaire. Le point d’origine est en effet mouvement que vient compléter celui du retour généalogique, au sens nietzchéen du terme. La généalogie que Julien Gracq prétend reparcourir, et non pas identifier, n’est en effet pas celle d’un sang ou d’un nom, mais bel et bien l’écheveau d’influences mobiles qui ont orienté des parties entières de sa sensibilité et mis en orbite aléatoire celui qui s’appelait encore Louis Poirier et n’avait pas, comme tant d’autres, le projet d’être écrivain.

L’allusion à Baudelaire témoigne déjà discrètement de cet état d’esprit, Julien Gracq subsituant le ‘“’ ‘ on le sait’ ” du consentement ” au changement, à l’ ‘“’ ‘ Hélas’ ” de la nostalgie, prouvant une fois encore que les jeux de l’allusion littéraire ne sont pas chez lui des rappels, mais des carrefours d’énergie. De la même manière, l’auteur affirme quelques pages plus loin : ‘“’ ‘ Je ne cherche pas ici à faire le portrait d’une ville. Je voudrais seulement essayer de montrer – avec toute la part de gaucherie, d’inexactitude et de fiction que comporte un tel retour en arrière – comment elle m’a formé, c’est-à-dire en partie incité, en partie contraint ”’ 480. La formation dont il est question n’a donc rien d’un apprentissage au sens classique, ni dans l’ordre des connaissances livresques, ni dans celui de la sensibilité. Il ne s’agit pas d’assimiler pour les reproduire efficacement les trésors d’une tradition, ni les leçons éternelles de l’existence, mais de reconnaître après coup, avec effet retard, des moteurs d’incitation et de contrainte.

La tâche que se fixe donc l’auteur est bien différente de celle d’un quelconque mémorialiste, dans la mesure où elle consiste à saisir à l’échelle de sa propre existence la double dimension de hasard et de nécessité de toute expérience vécue de l’Histoire dans sa forme immédiate de substance en devenir venant modeler la subjectivité et lui offrir des échancrures par lesquelles opérer à son tour ses propres modelages : ‘“’ ‘ (...) comment de mon côté (...) je l’ai remodelée selon le contour de mes rêveries intimes, je lui ai prêté chair et vie selon la loi du désir plutôt que celle de l’objectivité ”.’ On dira qu’il s’agit ici de la relation personnelle du jeune Louis Poirier avec Nantes, mais fore est de reconnaître que l’attitude de l’auteur et sa méthode d’investigation relèvent aussi des problèmes de l’intelligibilité historique, telle que le pose et l’analyse ailleurs Julien Gracq, par exemple lorsqu’il revient à de nombreuses reprises espacées dans le temps, sur son expérience de la campagne de juin 1940, ou lorsqu’il cite Eluard dans Pourquoi la littérature respire mal.

La forme d’une ville, sera donc un livre des parcours en étoilement, dans une diversité que n’organise aucun centre topologique ou temporel. Le centre est en réalité nomade et se manifeste chaque fois comme le point de contact momentané de la subjectivité et des lieux explorés ou rêvés, parce qu’interdits à l’exploration. Le jeu de déplacements s’augmente d’ailleurs de cette variable supplémentaire qu’est l’entreprise d’écriture du livre, si bien que Nantes et le jeune Louis Poirier s’y trouvent constamment projetés dans de nouvelles mises en orbite qui déconstruisent plutôt qu’elles n’organisent une forme régulière. Comme la valise de Marcel Duchamp, Nantes est en effet l’objet d’une télékinésie personnelle : ‘“’ ‘ Qu’elle m’accompagne donc, comme un des ces vade-mecum qu’on promène partout avec soi, qu’on feuillette, qu’on annote, et qu’on rature sans ménagements ”’ 481.

Le lien avec la mobilité historique propre aux temps modernes est de surcroît d’autant plus manifeste que l’auteur en liberté ajoute aussitôt : ‘“’ ‘ Il se trouve d’ailleurs que le cours des choses, dans le dernier demi-siècle, me protège contre tout démenti infligé par la réalité à l’image empreinte en moi de cette ville, qui a été le milieu incubateur de mon adolescence ”’. On ne saurait mieux dire que l’Histoire et ce qu’on appelait autrefois la destinée personnelle entretiennent des rapports dynamiques, tout à la fois tissés d’indépendance et de réciproque influence, qui échappent de fait à toute inscription fixiste et historiciste. L’expression selon laquelle la ville est une image empreinte dans une subjectivité, et simultanément le milieu incubateur d’une adolescence depuis longtemps passée, réinterprétée par l’écrivain de 1985, en offre un emblème verbal particulièrement clair.

L’image du “ milieu incubateur ” est à rapprocher de celle des “ immenses réserves de calme ” de Pourquoi la littérature respire mal. Qu’il s’agisse de villes ou de la nature, le monde est dans l’esprit de Julien Gracq tout le contraire d’un sol ancestral. Il s’apparente plutôt à une réserve d’énergie latente que la conscience peut mettre à profit, pourvu qu’elle renonce à se laisser enfermer à l’intérieur du schématisme historiciste. Le oui au monde oppose à la pétrification et à l’écrasement de l’individualité une acceptation qui est indépendance et lucidité, au lieu des impasses aveuglantes préconisées par les maîtres de l’absurde et du renoncement. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que les écrivains les plus convaincus par la toute-puissance des situations historiques et sociales soient aussi ceux qui nourrissent contradictoirement des espérances révolutionnaires radicales et le sentiment définitif de l’absurdité métaphysique de l’existence. Ce n’est là qu’une des positions insoutenables de ce que Nietzsche nommait le ‘“’ ‘ nihilisme négatif’ ”.

A l’opposé de ces conceptions, le sujet gracquien se signale par son sens inactuel de l’époque qui est à la fois absence d’illusions, face-à-face avec le tragique historico-social, et bénédiction de la vie en tant qu’expérience de la présence nomade au monde. Ce nomadisme, qu’il soit celui du voyage ou de l’écriture définit, bien plus que toute logique de l’engagement, une forme vivante de l’être-au-monde en ce qu’il propose et déploie sous sa forme vécue une réponse originale et autonome à l’époque. Michel Murat a bien raison de déclarer que Julien Gracq refuse des fictions en adoptant la position qui est la sienne, préférant assumer la condition de sujet mobile, d’électron libre, pourrait-on dire. Cette vertu de la désertion de l’avant-garde semble d’ailleurs l’une des voies longtemps déconsidérées, ou louées par les esprits conservateurs, grâce auxquelles plusieurs écrivains de premier plan, confrontés aux contradictions du vingtième siècle, ont apporté une réponse salutaire à l’Histoire européenne.

Ainsi, Vladimir Nabokov, dont l’exil est à l’origine contraint, transforme cette situation en indépendance nomade, lui qui n’habitera volontairement aux Etats-Unis que des maisons louées à ses collègues et se retirera à la fin de sa vie dans un hôtel. Comme Julien Gracq, mais pour d’autres raisons, parallèles, dans une certaine mesure, Nabokov s’est trouvé en double contradiction avec les émigrés conservateurs rêvant d’un retour au tsarisme, et les intellectuels favorables à la révolution russe. On trouve sous sa plume, des considérations, exprimées sur un mode ironique qui lui est propre, assez voisines de Pourquoi la littérature respire mal : ‘“’ ‘ Il est sot de se mettre en quête d’une loi fondamentale et plus sot encore de la trouver. Tel petit homme étroit d’esprit décide que l’évolution de l’humanité entière peut s’expliquer (...) par le conflit entre les ventres vides et les ventres pleins ; il engage quelque philistin méticuleux, lui donne pour mission d’être le commis de Clio et le voilà lancé dans un gigantesque trafic d’époques et de masses. Alors malheur à l’individuum privé avec ses deux pauvres u, qui hulule désespérément dans l’épaisse forêt des causes économiques’ ”482.

Tout comme Julien Gracq, Nabokov oppose à la fureur historique et à ses théoriciens la sauvegarde de l’expérience du monde. Il l’exprime à de nombreuses reprises dans la célébration des paysages de la Russie, comme dans Le don, L’exploit, ou encore Autres rivages qui sont autant de tentatives de franchir l’intervalle spatio-temporel de l’exil sur un mode tour à tour lyrique et humoristique destiné à triompher de la nostalgie. Il est caractéristique que certains des souvenirs d’éblouissement devant le monde remontent à l’époque où Nabokov qui résidait alors à Berlin assistait à la montée du nazisme avec angoisse et le même absolu dédain pour ses acteurs, que celui de Julien Gracq.

C’est le cas des passages d’Autres Rivages, dans lesquels l’auteur évoque le premier éveil de son fils à la présence des êtres et des choses, passages dans lesquels le schématisme théorique est une fois de plus raillé avec énergie : ‘“’ ‘ (...) ce je ne sais quoi de nageant, d’oblique, de fuyant sur le noir bleuté de l’iris qui semblait retenir encore les ombres qu’il avait absorbées d’anciennes forêts fabuleuses où il y avait plus d’oiseaux que de tigres et plus de fruits que d’épines, et où dans quelque profondeur tachetée de soleil, naquit l’esprit de l’homme ; et surtout, la première incursion d’un petit enfant dans la dimension suivante, la connexion nouvellement établie entre l’oeil et l’objet accessible, que les arrivistes en biométrie ou dans la fraude du labyrinthe à rats prétendent pouvoir expliquer’ ”483.

Cependant, l’auteur ne se contente pas d’opposer, par le jeu des images duelles d’oiseaux et de tigres, de fruits et d’épines, la présence enfantine au monde et la violence historique transformant celui-ci en une impitoyable jungle ; il poursuit aussitôt en échafaudant une théorie poétique de l’hominisation qui se rapproche à sa manière, toutes proportions gardées, des thèses de Pourquoi la littérature respire mal : ‘“’ ‘ Il y a aussi un vif plaisir (...) à résoudre l’énigme de l’épanouissement initial de l’esprit de l’homme en posant en postulat un arrêt voluptueux dans le développement du reste de la nature, une fainéantise et une flânerie qui permirent avant tout la formation de l’’Homo poeticus – sans lequel l’Homo sapiens n’aurait pu être élaboré. ’ ‘“’ ‘ La lutte pour la vie ”, ah bien oui ! La malédiction de la bataille et du labeur ramène l’homme au niveau du verrat ”’ 484.

Pour les deux écrivains, l’homme ne saurait donc se définir d’abord comme un Homo Faber originairement et exclusivement voué à l’action pratique et à la “ bataille d’hommes ”485. A cette vision rationaliste, ils opposent chacun l’idée d’une essence poétique de l’exister, laquelle fonde plus authentiquement que toute autre la possibilité de l’homme, un homme qui ne se définit pas tant par l’oeuvre pratique de ses mains et sa participation à la vie socio-historique des peuples, qu’une suspension initiatrice de l’agir, une disposition native à la contemplation du monde. Malgré tout ce qui les distingue, Nabokov et Julien Gracq offrent donc l’exemple d’une même réaction de subjectivités individuelles devant le réductionnisme des événements et des théories qui prétendent enfermer l’homme dans les seules déterminations collectives de l’Histoire. Ils ne sont certes pas les seuls, comme on le verra par la suite.

La position de Julien Gracq s’affirme dans une véritable “ phénoménologie irrévélée ” pour reprendre l’expression de Michel Murat, un effort à la fois existentiel et poétique de ressaisir la conscience du monde à sa source fondamentale, dans le hors-temps de la pure présence contemplative. Dans ce passage d’Autres rivages, cette volonté passe par l’évocation de la conscience enfantine naissante. Chez Julien Gracq qui n’a pas connu la paternité, elle est visée directe du monde par le seul auteur plongé dans l’étrange face-à-face avec les paysages d’un devenir célibataire qui se retrouve jusqu’en ses personnages.

Notes
465.

Pourquoi la littérature respire mal, op. cit., p.876. Cependant, comme le note Philippe Berthier, “(...) si avec Malraux Gracq se trouve fort peu d’atomes crochus, il y a tout de même chez lui cette puissante présence de l’histoire humaine en gésine, et qui ramène hic et nunc, sur une planète brutale, incontestable, malgré toutes les aspirations à l’envol poétique”. Philippe Berthier, Julien Gracq critique, d’un certain usage de la littérature, op. cit., p.101.

466.

Philippe Berthier, Julien Gracq critique, d’un certain usage de la littérature, op. cit., p.212.

467.

Pourquoi la littérature respire mal, op. cit., p.878.

468.

Id., p.869.

469.

Pourquoi la littérature respire mal, op. cit., p.877. La citation est tirée de Panorama de la nouvelle littérature française, Collection Tel, Gallimard, Paris, 1988, p.117. Ce choix se comprend sans doute en partie par le faitt que dans le même ouvrage, Gaëtan Picon consacre un article élogieux au Balcon en forêt, et exprime ainsi doublement, la proximité de ses vues avec celles de Julien Gracq.

470.

Id., p.879.

471.

Les yeux bien ouverts, op. cit., p.844.

472.

Carnets du grand chemin, PII, op. cit., p.1058.

473.

Pourquoi la littérature respire mal, op. cit., p.880.

474.

Id., p.880.

475.

Ibid., p.879. C’est le Romantisme allemand qui fascine Julien Gracq et non, à de rares exceptions près sa pâle copie française. Philippe Berthier écrit vigoureusement à ce sujet : “Il y a chez les Français une rhétorique intempérante, qui est peut-être le sillage de l’éloquence enflammée de la Révolution, l’écho endormi (nostalgique ?) du tréteau et de la tribune, avec tout son arroi poétique s’affichant sans pudeur”. Philippe Berthier, Julien Gracq critique, d’un certain usage de la littérature, op. cit., p.67.

476.

Thierry De Duve, Résonnances du ready-made, Jacqueline Chambon, Nîmes, 1989. L’oeuvre de Marcel Duchamp n’est pas aussi étrangère à Julien Gracq qu’on pourrait l’imaginer. Il en est fait mention à plusieurs reprises dans l’essai consacré à André Breton.

477.

Les commentaires du peintre témoignent également de cette désertion de l’avant-garde qui est la signature de la liberté créatrice traversant de part en part l’écran des idéologies conservatrices et novatrices. L’une de ces remarques stylise particulièrement cette attitude pour ce qu’elle joint précisément d’un trait significatif le passé le plus ancien et la modernité en devenir de Marcel Duchamp : “Il est une voie dans l’histoire de l’art qui remonte à la Mésopotamie. (...) Duchamp la suit. Picasso et les cubistes aussi”. Cité par Jean-Luc Chalumeau, Willem De Kooning, p.56, Editions Cercle d’Art, Paris, 1998.

478.

Philippe Berthier, Julien Gracq critique, d’un certain usage de la littérature, op. cit., p.37.

479.

La Forme d’une ville, PII, p.771. Nous reviendrons plus en détail sur la portée de ce livre, en tant que modèle alétoire d’une expérience de la multiplicité du moi et du monde, dans notre troisième partie.

480.

Id., p.774.

481.

Ibid., p.774.

482.

Vladimir Nabokov, Le Guetteur, Oeuvres romanesques complètes, tome I, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris 1999, p.553. Pour d’évidentes raisons, le jugement de Julien Gracq sur Marx est infiniment plus nuancé. L’auteur évoque notamment dans Lettrines la stimulante relecture du 18 Brumaire de Louis Bonaparte : “ Rien n’atteint à la hauteur de ton, à la netteté du trait(...) à la gaîté féroce de Marx journaliste ”. Lettrines, op. cit., PI, p.170.

483.

Vladimir Nabokov, Autres rivages, Collection Folio, Gallimard, Paris, 1991, p.376.

484.

Id., p.377.

485.

La thèse selon laquelle l’homme a d’abord été un Homo Faber avant de devenir un Homo Sapiens est exposée par Bergson dans L’Evolution créatrice, P.U.F., Paris, 1941.