Traitement de l’information

Ce travail amène à décomposer un système alimentaire au sein duquel, comme tout système, les différents éléments sont intimement imbriqués, liés, interdépendants. L’analyse et l’écriture obligent à extraire, découper, séparer les éléments selon une logique et une organisation qui ne correspondent que partiellement à la réalité. Nous avons retenu une présentation privilégiant les entrées thématiques au détriment des entrées par produits. Si ce choix oblige à revenir sur des productions examinées lors d’une entrée précédente, au risque de créer parfois une impression de redondance, il présente l’avantage de moins atomiser les aliments et de mieux refléter la complexité du système alimentaire. Ainsi il a parfois été nécessaire de reprendre des exemples déjà cités qui, à partir d’un nouveau thème, apportaient une précision supplémentaire. Il s’agit à chaque fois d’un regard différent porté sur un même aliment.

Mais pour chaque entrée thématique, toutes les productions locales et traditionnelles ne sont pas systématiquement développées. Seules les plus significatives, celles qui illustrent avec le plus de pertinence le thème, sont présentées. Ainsi, certaines reviennent plus souvent que d’autres ou font l’objet d’explications plus étendues. Loin d’être un hasard ou une maladresse, ces disparités indiquent la différence des places respectives des aliments au sein des représentations et pratiques des consommateurs bressans : certains ont plus de poids que d’autres.

Notons enfin l’emploi dans le texte, à certaines occasions, des adjectifs « certains » et « quelques » qui pourrait être perçu comme un manque de certitude et de précision. Il s’agit surtout de faire état de la nature hétérogène et polymorphe des pratiques alimentaires. Il serait en effet trompeur de croire que tous les individus réagissent de manière uniforme face à l’alimentation. D’ailleurs, les pratiques de consommation s’avèrent complexes, parfois contradictoires, rarement identiques ou totalement concordantes. Il serait illusoire et surtout absurde de chercher à masquer cette diversité. Sa mise en évidence est même, au contraire, la prise en considération d’une spécificité essentielle des systèmes alimentaires, spécificité qui rend difficile l’élaboration de généralités, de lois, de définitions strictes et précises. Nous avons retrouvé au niveau de la consommation des productions locales et traditionnelles, la variabilité que Laurence Bérard et Philippe Marchenay rencontrent dans la sphère des fabrications.

Des citations, volontairement nombreuses, prennent place dans le texte90. Mais, produites dans un contexte d’oralité spontanée et insérées au sein d’un texte écrit travaillé, elles peuvent parfois laisser penser que les informateurs maîtrisent mal le français. En réalité, cette impression est le fait de la transcription d’un langage oral à l’écrit et provient du décalage entre ces deux modes d’expression. D’ailleurs ces citations reflètent au contraire la liberté avec laquelle s’expriment les consommateurs et révèlent souvent des tournures verbales collectivement partagées. Nous avons donc conservé le plus littéralement possible les phrases collectées afin de ne pas falsifier le discours et de maintenir l’aspect vivant des entretiens. Mais nous avons néanmoins choisi, pour une lecture plus facile, de supprimer quelques hésitations, redondances ou maladresses de langage lorsqu’elles apparaissaient comme conjoncturelles et non significatives.

Enfin si la présence de l’auteur doit disparaître lors de la production textuelle de manière à conférer une valeur scientifique au travail, nous avons choisi de maintenir le pronom personnel « je » chaque fois que sont relatés les moments personnels vécus sur le terrain, qui reflètent cette expérience unique (« j’y étais ») et où le « nous » aurait été pure figure de style.

Notes
90.

Occupant une place centrale au sein de ce travail, elles sont directement insérées dans le texte sauf, lorsque dépassant généralement les six à sept lignes, il devenait difficile de les identifier. Pour des questions de lisibilité, elles sont alors détachées et disposées selon la présentation courante des citations. Nous avons procédé de même pour les citations d’auteurs.