Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les domaines agricoles bressans, très nombreux, étaient, pour la plupart, de petites voire très petites exploitations familiales. Leur superficie moyenne tournait autour de 7 à 10 hectares 111. Lavoille précise même que « ‘dans la Bresse septentrionale, plus de la moitié des exploitations ne dépassent pas 6 ha ’»112. Ces petits domaines n’étaient généralement exploités que par l’agriculteur, souvent propriétaire, et les membres de sa famille. Néanmoins quelques exploitations atteignaient douze, quinze, voire vingt hectares. Un habitant de Saint-Etienne-du-Bois se souvient de celle qu’entretenaient ses parents : « ‘quinze hectares, en 1920, c’était une grosse exploitation. C’était déjà un gros morceau ’». Celles qui dépassaient les trente hectares, et qui bénéficiaient d’un parcellaire groupé, étaient particulièrement remarquées. A Saint-Etienne-du-Bois, la ferme de Chaffoux avec cinquante hectares est systématiquement citée lorsqu’il est question de grands domaines. Ceux-ci étaient mis en fermage auprès de notables paysans, mais certains étaient exploités par les propriétaires terriens, eux-mêmes agriculteurs. Les fermes de plus de quinze hectares nécessitaient l’apport d’une main d’oeuvre extérieure : servantes, commis, valets, bergers louaient leur service pour l’année. Le nombre de domestiques dépendait de la taille de l’exploitation : « ‘En principe y avait toujours les enfants, mais il fallait toujours au moins un commis ou parfois deux et une servante. A Chaffoux, y avait le patron, y avait toujours au moins trois hommes pour travailler’ ». Dès l’âge de six ou sept ans, les enfants étaient placés dans des fermes plus importantes que celles de leurs parents : « ‘il y avait des grosses familles. Celui qui était dans un petit domaine qui avait sept, huit hectares, et qui avait six, sept, huit gamins, pfiou, on les dégageait. Deux étaient placés ici, une là... même tout petit, tu allais, tu étais embauché. [...] Les filles chez moi, elles allaient garder des gamins, y en a même une qui était commis ’». Les servantes s’occupaient des jeunes enfants du ménage ainsi que du bétail. Les enfants, qu’ils soient de la maison ou qu’ils soient domestiques, avaient à charge le bétail et les petits travaux de la ferme. Le 11 novembre, jour de la Saint Martin, marquait la date de renouvellement des contrats d’embauche et des baux ruraux, pour les quelques grosses exploitations affermées.
De petite superficie, ces exploitations avaient également une faible productivité. Il n’y avait souvent qu’une ou quelques vaches dont la production laitière était maigre : « ‘une ferme qui avait une dizaine de vaches, c’était déjà une belle ferme ’», « ‘une vache laitière, quand j’étais gamin, quand elle avait fait dix ou douze litres de lait par jour, c’était une bonne vache’ ».
De même, si l’aviculture était un apport essentiel à l’économie de la ferme, le nombre de volailles vendues sur le marché restait modique. Une éleveuse à la retraite remarque : « ‘nos mères quand elles avaient vingt poulets en épinette, elles en avaient beaucoup, elles allaient en vélo les vendre au marché. Et si elles faisaient vingt chapons, ça faisait déjà beaucoup’ ».
Enfin, seules les fermes un peu importantes possédaient une paire de boeufs. Ceux-ci ont progressivement été remplacés par des chevaux à l’Entre-deux-guerres, puis par les tracteurs.
A. Boudol, 1949, p.139.
Lavoille G., 1938, p.52.