Nommer, classer, ordonner est le propre de l’homme. Claudine Friedberg rappelle que « ‘classer est une opération ordinaire de l’esprit humain. Dénommer une plante, mais cela est vrai pour n’importe quel objet, c’est déjà la mettre dans une catégorie et donc la classer’ »324. Le domaine de l’alimentation, que ce soit les matières premières, les productions transformées ou les plats cuisinés, n’échappe pas à cette mise en ordre circonstanciée, qui a davantage été étudiée à propos des plantes et des animaux que des objets matériels. Au sein de chaque culture, les nourritures font l’objet de classifications populaires, classifications qui « ‘sont le reflet d’opérations rarement explicitées et qui sont exécutées au fur et à mesure des besoins’ »325. L’exemple le plus célèbre de classification alimentaire, celui relevée par Mary Douglas326 dans son ouvrage De la souillure, porte sur les catégories taxinomiques du Lévitique, fondement des interdits alimentaires dans la Bible. « ‘Le processus classificatoire est complexe et combine trois opérations plus ou moins concomitantes et pouvant se succéder dans un ordre indéterminé : identification, dénomination, insertion dans un système de référence pouvant comporter des catégories englobantes’ »327. Comme tout aliment, les productions agricoles et alimentaires locales font l’objet de processus d’identification, de dénomination et de classification complexes.
Claudine Friedberg, 1986, p.23.
Claudine Friedberg, 1991, p.154.
Mary Douglas, 1992, (1967).
Claudine Friedberg, 1986, p.24.