Une activité féminine

Les personnes âgées soulignent, de manière explicite ou implicite (par exemple en citant leur mère ou leur grand-mère à propos de cette activité), que l’élevage de la volaille était pris en charge par les femmes. Ce sont elles qui les nourrissaient, les surveillaient et contrôlaient la reproduction en sélectionnant les coqs. Ainsi, l’un des informateurs précise : « ‘moi j’ai vu ma mère venir chercher des coqs à Pommier par exemple. La volaille, tu changeais, tu allais chercher un coq chez une voisine...’ ». Les fermières portaient une attention toute particulière aux poussins : « ‘je me souviens les petits poussins, quand ils venaient d’éclore et bien on leur donnait de la mie de pain braisée, on leur faisait tremper dans du lait, heu, on leur donnait du riz, on leur faisait cuire des oeufs, cuits durs, on les fraisait bien pour qu’ils puissent manger’ ».

La castration des poulets, destinés à devenir des chapons, était également réalisée par une femme, « la chaponneuse », qui se déplaçait de ferme en ferme. Celle qui a exercé à Saint-Etienne-du-Bois, alors âgée de plus de quatre-vingts ans, précise « ‘j’opérais à la méthode bressane. On chaponne quand ils ont un développement sexuel qu’on voit à la crête. J’en ai fait 8 000. Vous vous rendez compte ?’ ». Ce chiffre, qu’elle déclare avec fierté mais qui paraît dérisoire au regard des quantités actuelles de poulets chaponnés chaque année377, est répété par les membres de la communauté qui le véhiculent comme témoin d’une époque : « ‘elle en a chaponné au moins 8 000’ » entend-on souvent dire de cette femme.

Notes
377.

A titre indicatif, aujourd’hui le nombre de chapons déclarés sur la zone d’appellation dépasse chaque année les 20 000. La technique du chaponnage a d’ailleurs évolué. Alors que les testicules étaient retirées sur des sujets âgés de quatre à cinq mois, en opérant sur le dos, la nouvelle méthode se pratique sur des sujets beaucoup plus jeunes, ayant entre huit et quatorze semaines, et nécessite deux incisions latérales nettement plus petites.