Annexes

Annexe 1
Brève présentation de la Bresse burgienne

La Bresse a une forte image auprès du grand public : elle évoque spontanément une entité à la fois géographique et culturelle. Pourtant, ses frontières ne délimitent pas une unité culturelle et varient en fonction des critères retenus (géologique, administratif, agricole, etc.).

Ainsi, la Bresse définie par les géologues comme une cuvette remplie par sédimentation s’étendant du Massif Central au Jura et de la Vallée du Doubs à Lyon dépasse largement les actuelles Bresse burgienne et bourguignonne, aux frontières plus restreintes. Celles-ci, historiquement construites544, présentent des différences marquées.

G. Lavoille fait remonter à l’époque romaine la séparation entre ces deux Bresse : « Dès cette époque lointaine, apparaît donc le dualisme ethnique et politique qui marque la destinée de la Bresse »545. Durant des siècles, les puissants Etats voisins, attirés par la fertilité de la terre et son emplacement stratégique, en tant que carrefour, vont, en se disputant cette plaine, entretenir son découpage politique. Ainsi en 1272, suite au mariage de Sybille de Bâgé et Amédée de Savoie, la Sirerie de Bâgé qui occupe le sud de la plaine devient savoyarde. Les diverses annexions et échanges des Bâgé et des Savoyards entraînent l’extension du terme de Bresse aux frontières : c’est le cas du Revermont qui, associé à la fin du XIIIe siècle à la Sirerie de Bâgé, prend le nom de Haute-Bresse. De même, au XVIe siècle, la majorité de la Dombes est incorporée au territoire bressan qui s’étend quasiment jusqu’au Rhône.

Ainsi, de la fin du XIIIe siècle au début du XVIIe, la Bresse, aux frontières fluctuantes, se trouve partagée entre la Savoie au Sud, la Bourgogne au centre et au nord (Bresse chalonnaise et Bresse louhannaise) et la Comté au nord-est qui passa à l’Autriche puis à l’Espagne. En 1601, le traité de Lyon permit au roi de France, Henri IV, d’annexer la Bresse, suite à la victoire sur le duc de Savoie. La Bresse savoyarde, ainsi que le Bugey, le Valromey et le Pays de Gex entrèrent alors dans l’unité française, rejoignant la Bourgogne (dont la Bresse chalonnaise et la Bresse louhannaise) annexée en 1477. A la Révolution, la Bresse est partagée entre trois départements : l’Ain, la Saône-et-Loire et le Jura.

Actuellement, la Bresse bourguignonne dépend du département de Saône-et-Loire tandis que la Bresse savoyarde dite Bresse bressane ou burgienne compose, avec la Dombes, le Pays de Gex et le Bugey, le département de l’Ain. Cette ancienne province représente un quart de la superficie du département.

La Bresse burgienne, sur laquelle porte le présent travail, est une plaine mamelonnée au relief peu contrasté ; l’altitude tourne autour de 200 m. Elle s’étend à l’ouest jusqu’à la Vallée de la Saône (comprenant ou non, selon les définitions, le Val de Saône), à l’est jusqu’au Revermont (contreforts du Jura dont l’altitude tourne autour de 750 m), au sud jusqu’aux étangs de la Dombes. La limite nord avec la Bresse louhannaise ne se distingue pas physiquement. Il s’agit de la frontière du département dont les limites sont politiques en raison des données historiques évoquées.

De nombreuses rivières (la Reyssouze, le Sevron, le Solnan, la Veyle, etc.) découpent le paysage, alternance de bocages et de forêts. Son sol est caractérisé par son imperméabilité, et sa faible proportion de calcaire. Il est par conséquence difficile à travailler et favorise le développement des prairies et des essences de bois tendre.

Alors que les pierres font défaut dans le sol argileux de cette région, les forêts ont fourni aux Bressans les matériaux nécessaires à la fabrication des habitations. Il s’agit de constructions en pans de bois dont la toiture basse aux tuiles creuses se différencie des bâtiments de la Bresse bourguignonne aux hautes toitures revêtues de tuiles plates à crochet. D’après Lavoille les maisons en pisé, présentes au nord comme au sud, sont plus récentes que celles constituées d’une carasse de bois, panons et croisillons dont les intervalles sont remplis de clayonnages garnis de terre et de carrons (briques). Cette architecture s’oppose aux constructions en pierre du Revermont. Les cheminées sarrasines, mitre qui coiffent les fermes bressanes, font la fierté de la région. La Bresse se caractérise également par un habitat dispersé en petit hameaux ou en fermes isolées au milieu des champs à exploiter.

Lavoille note la présence d’autres différences culturelles marquées entre les différentes Bresse en raison de leurs divergences historiques : « la Bresse bourguignonne fut de bonne heure associée à la vie nordique, tandis que la Bresse savoyarde fut plus intimement liée au sort des pays latins »546. Ainsi la limite entre droit écrit et droit coutumier qui partageait la France jusqu’à l’application du code Napoléon, traversait la Bresse : « Tandis que le centre et le sud étaient régis par le droit écrits, d’origine romaine, la zone septentrionale ne connaissait que la législation transmise par l’usage, à la mode germanique »547. De même, au point de vue dialectal, la Bresse se divisait en deux parties. Le Bressan du sud parlait un dialecte francoprovençal très différent du dialecte parlé dans la Bresse du nord. A l’heure actuelle, dans la région qui nous concerne, certaines personnes âgées maîtrisent encore le francoprovençal, contrairement aux générations suivantes qui, au mieux, comprennent mais ne peuvent pas s’exprimer avec leurs aînés, et plus généralement ne connaissent plus du tout ce dialecte. Dans certaines communes, comme à Saint-Etienne-du-Bois, des membres d’associations se réunissent pour parler patois et transmettre aux « plus jeunes » ce patrimoine548. Notons qu’il reste chez les jeunes un français très imagé, ponctué de nombreuses expressions locales et sollicitant certains termes vernaculaires.

Au Sud de la zone, Bourg-en-Bresse – Préfecture de l’Ain – est la principale agglomération. Avec, en 1999, 40 666 habitants549, elle reste une ville de petite taille. Au centre de la Bresse burgienne, Montrevel-en-Bresse compte moins de 2000 habitants, Saint-Trivier-de-Courtes moins près de 900, et Saint-Etienne-du-Bois près de 2000. La Bresse reste une région assez rurale puisqu’en 1999, sur les 219 communes de l’arrondissement de Bourg-en-Bresse, 168 sont classées par l’INSEE en zone rurale550.

Si la Bresse a la réputation d’avoir longtemps été repliée sur elle-même, Bourg-en-Bresse est désormais desservi par divers réseaux de communications : l’autoroute Mâcon-Genève, Lyon-Genève, Dôle-Bourg, le TGV vers Paris et vers Genève. L’activité économique est sensiblement orientée vers l’agro-alimentaire. Cette branche emploie plus d’un cinquième des salariés de l’industrie551 : volailles, charcuteries, aliments pour bétail. Mais hormis Renault Véhicules Industriels et Solvay Pharma, le tissu industriel est majoritairement constitué de PME, souvent de petite taille, des secteurs de la construction mécanique, de la métallurgie et de la transformation des matières plastiques.

Notes
544.

L’essentiel des données historiques proviennent de :

Lavoille G., 1938 et 1939.

Boudol, 1947 et 1949.

Bourg-en-Bresse et ses environs, 1998.

Ain –France, 1999.

545.

Lavoille G., 1939, p.54.

546.

Ibid., 1939, p.58.

547.

Ibid., 1939, p.59.

548.

Un ouvrage, réalisé par l’association de Saint-Etienne-du-Bois, recueille le patois de Saint-Etienne-du-Bois (Qu’elle était riche notre Langue ! Glossaire du Patois Bressans de Saint-Etienne-du-Bois, 1996), tandis que l’ouvrage Dictionnaire du français régional de l’Ain, réalisé par Claudine Fréchet et Jean-Baptiste Martin (1998), présente les traits régionaux du parler des habitants, entre autres, de Saint-Etienne-du-Bois - puisque cette commune a été un des points d’enquête -, lorsqu’ils s’expriment en français.

549.

INSEE, 2000.

550.

INSEE, 2000.

551.

DRIRE-INSEE-SGAR, 1996, p.62.