2.5.1. Recenser les informations et favoriser l’analyse de l’énonciation

L’analyse du contenu des entretiens a été guidée par la volonté de favoriser une analyse entretien par entretien et une analyse transversale. J’avais à saisir la spécificité des pratiques et discours énoncés par chaque enquêté et à les situer plus largement dans la configuration des relations entre les habitants.

Il apparaissait ainsi particulièrement important d’extraire, de recenser et de classer de façon méthodique les informations recueillies par entretiens.

Chaque entretien a donné lieu à la rédaction d’une série de fiches référencées. A chaque fiche correspondait un thème relativement général : le rapport à l’enquête, les circonstances d’arrivée dans la résidence, les relations entretenues avec le responsable, la structure du réseau de relations, la trajectoire résidentielle, la fréquentation des services, les catégories de perceptions associées aux habitants, etc. Les thèmes étaient identifiés selon leur pertinence par rapport à la problématique, aux hypothèses de travail, ou selon leur intérêt spécifique dans l’entretien. Ils pouvaient être proches de ceux apparaissant dans la grille d’entretien (l’utilisation des services) comme plus explicatifs (analyse de la trajectoire résidentielle). Ces fiches étaient classées, pour chaque entretien, en fonction de l’ordre d’apparition du thème. Tout fragment de discours portant une signification ou éclairant le rapport de l’enquêté au thème en question était noté et commenté. Etaient détaillées les informations les plus manifestes (par exemple les déclarations de pratiques) comme les plus dissimulées (processus et contexte de l’énonciation, figures de styles notamment). Il était précisé également à quelle page de l’entretien apparaissait le discours noté. Une même phrase ou extrait d’entretien plus long, pouvait apparaître plusieurs fois, dans différentes fiches, si l’analyse le nécessitait.

Cette méthode avait l’avantage de préserver la cohérence singulière de chaque entretien (ordre d’apparition et contexte d’énonciation des thèmes et des fragments de discours connus), et donc de permettre une analyse entretien par entretien : je pouvais rapidement extraire du fichier l’ensemble des fiches concernant tel enquêté. Les citations étant référencées, je pouvais me plonger de nouveau dans le texte de l’entretien, transcrit par ailleurs intégralement.

Ce mode de classement me permettait aussi d’aborder l’analyse d’une manière plus transversale puisque les thèmes les plus centraux étaient présents d’un entretien à l’autre. J’avais par exemple la possibilité de rassembler l’ensemble des fiches se rapportant à la trajectoire résidentielle des actifs célibataires ou divorcés.

L’analyse des entretiens a également été guidée par la nécessité de se donner les moyens de mettre au jour les aspects implicites, dissimulés, sous-jacents des discours, et cela afin de mieux saisir les représentations des habitants comme de contrôler la validité des discours recueillis sur les pratiques de voisinage. De ce fait, l’analyse thématique a été complétée par une analyse de l’énonciation. J’ai été attentive pour chaque entretien, à la dynamique et à l’organisation des discours, à la façon dont ils se développaient, se construisaient. Les associations de thèmes et de termes dans les différentes séquences de la communication ont été l’objet d’une attention particulière, comme le style de l’énonciation, les éléments atypiques (récurrences, lapsus, jeux de mots, etc.) et les figures de rhétorique.