Un peu plus de la moitié des habitants interrogés présentent de façon neutre et plutôt descriptive la population de leur immeuble. Ce sont plus souvent des étudiants que des actifs. Plus des deux tiers des habitants des résidences B et C tiennent ce type de discours. C’est souvent lorsque je leur pose directement la question («selon vous c’est plutôt quel type de personnes qui habite la résidence ?» ou «quel portrait feriez-vous des habitants ?») qu’ils la décrivent.
Quels sont les critères communément associés aux étudiants ? La plupart des habitants (étudiants et actifs) font référence aux «étudiants», à ceux qui «font des études». Ils sont présentés comme présents massivement dans les résidences : «pour la plupart des étudiants», «bon nombre d’étudiants», «pas mal d’étudiants», «en majorité des étudiants», «beaucoup d’étudiants», «la plupart font des études», etc. Le terme «étudiant» suffit souvent à lui-même, comme une évidence. Il est parfois lié et confondu avec le terme «jeunes» (principalement chez les étudiants et les actifs les moins âgés). Les habitants lorsqu’ils emploient l’un ou l’autre de ces termes ou les deux à la fois, savent qu’ils renvoient à la même population : «jeunes... étudiants» 179 ; «il y a les étudiants... bon des jeunes en gros» 180 .
Les étudiants sont aussi perçus (surtout par les autres étudiants) comme ‘‘sociables’’.
Les propos de Delphine révèlent bien les traits positifs et valorisants qui sont plutôt associés aux «jeunes» : dynamisme, sociabilité développée et décontractée. Ceux-ci ne sont cependant pas toujours explicités : allant de soi, ils vont sans dire.
Les actifs, quant à eux, sont présentés comme beaucoup moins nombreux que les étudiants : «peu», «deux ou trois», «quelques», «une infime minorité» sont notamment les termes employés renvoyant à cette idée.
Les critères associés aux actifs visent ensuite à préciser qu’ils exercent une activité professionnelle. Les habitants interrogés font référence à «des gens qui travaillent», «des gens qui viennent pour des raisons professionnelles», «des gens actifs», «des salariés». Il y a aussi ceux qui parlent plutôt «d’hommes d’affaires», de «femmes d’affaires», de «cadres dynamiques» et de «cadres commerciaux « : ils font alors référence aux «quelques hommes cravatés» et aux «quelques femmes en tailleur» ainsi qu’à «l’attaché case» signes distinctifs des cadres moyens et supérieurs des entreprises privées.
Les étudiants font également référence à l’âge des actifs : «des personnes de 40, 50 ans», «des personnes plus vers 40 ans», «plus vieux», «des gens d’un certain âge», «des gens plus âgés», etc. Le terme «adultes» est aussi parfois employé par les étudiants. Il renvoie d’une manière générique à ces gens qui travaillent et qui sont plus âgés, soulignant la distance qui sépare les deux catégories.
Les autres traits employés par l’ensemble des habitants afin de définir les actifs renvoient à leur situation résidentielle et au sens de leur présence dans la résidence : «des gens qui viennent dormir le soir», «des gens qui travaillent la semaine ici et qui habitent à Paris», «des gens qui rentrent le week-end», «des personnes de passage», des gens présents «pour une période déterminée», «qui ne restent pas longtemps», des gens pour qui c’est «un pied-à-terre», etc. La présence dans les lieux est perçue comme temporaire et associée à la vie professionnelle. Est fait référence à un ailleurs qui est aussi le lieu d’inscription de la vie privée, de la vie familiale et qui est présenté comme justifiant l’aspect provisoire de la présence dans la résidence.
Alexandra, 25 ans, étudiante en 3ème cycle d’école de commerce.
Ralph, 22 ans, étudiant dans une école automobile.